Le bilan 2023 a été présenté à la formation spécialisée ministérielle du 11 décembre dernier. Pour la CFDT, c'est une nouvelle alerte concernant la dégradation de la santé, de la sécurité et des conditions de travail des agents. Notre fédération réclame des actions de prévention.
Données issues de l’application ANAGRAM, ce bilan annuel synthétise les statistiques des accidents de service, du travail et maladies professionnelles pour l’année 2023. Il concerne les personnels en fonction dans les 30 académies et en administration centrale, soit environ un million deux cent mille agents.
L’augmentation importante des accidents, notamment en raison d’agressions, est également très préoccupante.
Siégeant depuis deux ans en formation spécialisée ministérielle, la CFDT s’est étonnée une nouvelle fois de la surreprésentation des femmes concernant les accidents et maladies professionnelles.
Les femmes davantage concernées : la CFDT interpelle le ministère
79,68 % des accidents (de service, de travail ou de mission) et 78,8% des maladies professionnelles déclarés concernent des femmes alors qu’elles représentent 74 % de l’effectif total du ministère (source RSU 2022).
Ces pourcentages sont très inquiétants. La CFDT avait déjà réclamé des mesures l’an passé.
Le phénomène de sous déclaration fait craindre qu’un nombre beaucoup plus important de nos collègues soient concernées.
Premier employeur de femmes en France avec 880 000 agentes, notre ministère n’a pourtant mené aucune action particulière.
La CFDT et les organisations syndicales siégeant en formation spécialisée ont obtenu que des recommandations spécifiques sur la santé au travail des femmes figurent dans les orientations stratégiques ministérielles 2024 et 2025.
Mais de son côté, le ministère n’a mené aucune analyse qui permettrait d’identifier les causes et de mettre en place des actions de prévention et d’information.
C’est pourtant une obligation qui lui incombe en tant qu’employeur, au titre du code du travail.
Comme pour le bilan précédent, notre fédération demande une analyse de la situation. Une politique de prévention de la santé des femmes doit être mise en œuvre dans notre ministère.
Une inquiétante augmentation des accidents du travail : + 11, 6 %
17 269 accidents ont été déclarés en 2023, en nette augmentation par rapport à 2022 (15 471).
7 644 des accidents reconnus ont donné lieu à un arrêt de travail.
Un grave phénomène de sous déclaration ?
Le taux d’accidents déclarés dans notre ministère (1,4%) est 7 fois moins important que dans le reste de la fonction publique (10%) et du secteur privé (11%). Source : portail de la fonction publique.
Comment expliquer de tels écarts ? Les équipes syndicales de la CFDT constatent un phénomène de sous-déclaration par les agents de l’Éducation nationale. Situation due au manque d’information et d’accompagnement des agents sur leurs droits et les procédures.
Face à ce constat, la CFDT demande depuis plusieurs années que les assistants de prévention, disposent du temps et des moyens nécessaires pour leurs missions.
Agressions et RPS en très forte hausse
La CFDT a contesté la distinction de l’administration entre RPS et agressions (verbales et physiques) dans les typologies d’accident. Ces dernières font partie intégrante des RPS.
La CFDT, comme les autres organisations syndicales dénoncent des chiffres qui ne reflètent pas la réalité.Le nombre des agressions déclarées en accident du travail peut être précisé sans être distingué.
Le risque d’une telle présentation est d’exclure les agressions d’un plan ou de mesures de prévention des RPS.
Si toutes les typologies d’accidents déclarés augmentent entre 2022 et 2023, l’augmentation des RPS en général (+67%) et des agressions en particulier (+60%) est alarmante.
- 1010 accidents déclarés pour agression en 2022, et 1600 en 2023.
- 213 pour RPS en 2022, et 357 en 2023.
Là encore, le phénomène de sous déclaration fait craindre une ampleur bien plus importante.
À titre de comparaison, la hausse dans les deux autres principales typologies d’accident n’est « que » de + 17% (heurts de personnes) et + 15% (chute de plain pied).
Pour la CFDT, il est urgent que l’administration mène une véritable politique de protection des personnels et de prévention des RPS.
Notre ministère doit notamment clarifier et simplifier la procédure de protection fonctionnelle.
Maladies professionnelles : l’amiante totalement sous évalué
Le bilan présente un nombre de maladie professionnelle déclarées en 2023 très faible (252) mais en forte augmentation par rapport à 2022 (191).
Les reconnaissances par l’administration augmentent logiquement de la même manière : 45 MP déclarées et reconnues en 2022, 62 en 2023.
Les déclarations liées aux RPS augmentent de 25 % par rapport à 2022 (de 98 à 124) .
Mais c’est concernant l’amiante que la situation est la plus préoccupante.
Seulement 2 pathologies liées à l’amiante déclarée en 2022, 6 en 2023… et 10 reconnaissances de l’administration en 2023 pour des déclarations antérieures.La CFDT, comme les autres organisations syndicales dénoncent des chiffres qui ne reflètent pas la réalité.
Des statistiques qui n’ont aucun sens alors que la dernière enquête menée dans l’éducation nationale révèle que des dizaines, voir des centaines de milliers d’agents restent exposés à ce cancérigène.
Alerte syndicale sur l’amiante
Des chiffres à comparer aux autres données officielles. L’amiante est responsable chaque année de 3 à 4 000 maladies reconnues comme étant liées au travail.(source INRS).
En France, c’est la deuxième cause de maladies professionnelles et la première cause de décès liés au travail (hors accidents du travail).
Selon un rapport du Haut Conseil de la Santé Publique publié en 2014, d’ici 2050, le nombre de décès par cancer du poumon dus à l’amiante serait de 50 000 à 75 000, auxquels s’ajoutent de 18 000 à 25 000 décès par mésothéliome. Ce chiffre est sous-estimé puisqu’il n’intègre pas les décès par cancer du larynx ou de l’ovaire liés à l’exposition à l’amiante.(source ANSES)
C’est le sujet prioritaire en matière de maladie professionnelle dans l’éducation nationale.
La situation est très grave pour les agents en raison d’une tripe défaillance :
- absence de médecine de prévention, censée les informer et assurer leur suivi médical, y compris post professionnel (missions rappelées dans le guide ministériel pour les agents)
- une procédure d’auto-diagnostic d’exposition à l’amiante par l’agent lui même qui n’est pas opérationnelle.
- une double responsabilités et obligations entre collectivité propriétaires du bâti (commune, département, région,..) et employeur (éducation nationale) qui conduit à l’inertie.
À cela s’ajoute l’éclatement du bâti scolaire et le coût des travaux. Notamment pour les communes qui gèrent les 48 000 écoles du 1er degré.
La CFDT, comme les autres organisations syndicales dénoncent des chiffres qui ne reflètent pas la réalité. Nous pour exigeons un plan d’action à la hauteur des enjeux sanitaires.
Plusieurs actions sont menées, une conférence de presse commune sera donnée le 13 mars pour alerter sur la situation. L’intersyndicale y fera part de propositions et revendications pour la protection des agents.