Avec le cadencement unique, la mise en œuvre de PPCR rend inutiles les notations chiffrées concernant les personnels d’enseignement, d’éducation et d’orientation.
Sortir enfin d’une inspection infantilisante
Des négociations sont en cours pour rénover l’évaluation des personnels du premier et du second degrés. Le système actuel est infantilisant et produit des effets à l’aveugle.
Infantilisant car les personnels sont relégué∙e∙s dans une position de passivité : l’inspecteur∙trice décide quand il∙elle inspecte, observe, fait son rapport et arrête la note chiffrée. Si de nombreux∙ses inspecteur∙trice∙s demandent aux personnels de fournir des documents pédagogiques, ou compléter des documents de type autoévaluatif afin de pouvoir prendre en compte des éléments qu’ils ne pourraient pas observer pendant l’inspection elle-même alors que cela fait bel et bien partie des pratiques professionnelles enseignantes. Mais ce sont des inspecteur∙trice∙s qui les demandent, qui sont à l’initiative, et toutes et tous ne le proposent pas systématiquement. Il est hors de question pour l’évalué∙e de demander révision de la note ou du rapport.
Pour les personnels du 2nd degré, le chef d’établissement élabore souvent seul∙e l’évaluation de trois pavés, une appréciation littérale et une note chiffrée (dont l’évolution est strictement encadrée). Les personnels peuvent demander révision de la note et des pavés mais pas de l’appréciation littérale.
Aveugle car les effets de l’évaluation sur la carrière sont incertains pour les évaluateur∙trice∙s. Quand bien même il∙elle∙s estiment qu’un∙e professeur∙e exerce ses missions de manière très satisfaisante, quand bien même les notes de ce∙tte professeur∙e sont augmentées, rien n’assure ensuite que cela ait un effet sur le déroulement de carrière.
Bref, aujourd’hui les modalités officielles d’évaluation sont descendantes et font le pari que les personnels n’ont pas grand-chose à dire de leurs pratiques et de leur engagement professionnel.
D’un département ou d’une académie à l’autre, d’une discipline d’enseignement à l’autre, les notes moyennes varient sans qu’aucune explication puisse légitimer des écarts qui ont un impact sur la carrière à chaque changement d’échelon. La carrière de chacun·e dépend du rythme des inspections, du lieu d’exercice et de la discipline. Qui peut considérer que c’est juste, d’autant que l’on sait que les femmes ont plus souvent des retards d’inspection que les hommes ?
Pour le Sgen-CFDT, l’état des discussions à la mi-septembre 2016 permet d’envisager un processus d’évaluation qui reconnaît l’expertise et la professionnalité des enseignant·es, et leur donne beaucoup plus la parole sur leur évaluation à l’occasion des 4 rendez-vous de carrière, au même rythme pour toutes et tous.
Déroulement prévu du rendez-vous de carrière
1) Un « document d’appui » (ou bilan professionnel) rédigé par l’évalué·e.
Le document d’appui comprend :
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La description du parcours professionnel de l’agent, notamment la liste des postes occupés (données récupérées via i-prof), il sera possible de préciser des éléments de contexte d’exercice ;
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La présentation par l’enseignant∙e de ses réalisations et démarches caractérisant ses pratiques pédagogiques en classe (modalités de travail avec les élèves), sa participation au suivi des élèves (travail en lien avec les CPE et les COP par exemple), à la vie collective de son école ou de son établissement (participation à des instances) et aux relations avec les partenaires de l’école (travail en lien avec des établissements culturels par exemple), et enfin ses démarches pour développer ses compétences professionnelles (formation continue par exemple) – le tout en une cinquantaine de lignes ;
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Les souhaits d’évolution professionnelle et de diversification de ses fonctions (10 lignes).
2) L’enseignant∙e transmet son document d’appui (bilan professionnel) à son Inspecteur∙trice et [dans le Second Degré] à son Chef d’Établissement 15 jours avant le RDV.
3) Inspection pédagogique en classe suivie d’un entretien professionnel avec l’Inspecteur∙trice qui doit aussi prendre en compte le document d’appui (pas de note, pas de rapport).
4) [Dans le Second Degré] Entretien avec le∙a Chef d’Établissement.
5) L’Inspecteur∙trice et [dans le Second Degré] le∙a Chef d’Établissement remplissent une grille d’évaluation dont les items sont issus du référentiel de compétences détaillées au BO du 25/07/2013. Certains items sont communs et demandent une validation commune.
6) L’Inspecteur∙trice et [dans le Second Degré] le∙a Chef d’Établissement portent (chacun∙e) une appréciation générale (qui fait l’objet d’un échange préalable) (10 lignes pour l’Inspecteur∙trice et [dans le Second Degré] 10 lignes pour le∙a Chef d’Établissement).
7) L’enseignant peut formuler des observations (10 lignes maximum).
8) L’autorité académique formule une appréciation finale :
À consolider, Satisfaisant, Très Satisfaisant, Excellent (appréciation communiquée à l’évalué∙e).
9) L’évalué∙e peut faire appel de son appréciation finale.
10) L’autorité académique détermine un avis sur l’avancement accéléré des enseignant∙e∙s concerné∙e∙s par le rendez-vous de carrière.
11) La CAP propose, parmi les avis exceptionnels, les enseignants qui bénéficieront de l’accélération de carrière. Leur nombre est limité à 30% des promouvables.
Réactions syndicales au 15/09/2016
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Les représentant∙e∙s des Inspecteur∙trice∙s et des Chefs d’Établissement, tous syndicats confondus, n’ont émis aucune opposition à ce projet négocié.
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Le Sgen-CFDT et l’UNSA, en dépit d’un certain nombre de remarques et de regrets concernant la grille notamment, reconnaissent que les négociations ont néanmoins permis de faire évoluer le projet positivement.
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FO, qui n’a pas signé les accords PPCR, demande le retrait du projet d’accompagnement et du document d’appui et déclare qu’il « se mobilisera pour que le projet ne voie pas le jour ».
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La FSU ne relève pas de difficultés concernant l’accompagnement, dit que les RDV de carrière sont ainsi clarifiés, mais s’inquiète d’items pouvant permettre au Chef d’Établissement de s’immiscer dans la pratique pédagogique des enseignants.
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Enfin la FSU, par la voix du SNES, est totalement opposée au document d’appui au RDV professionnel. « C’est un point de crispation pour le SNES-FSU… Il est hors de question que ce document soit envoyé avant l’inspection car cela représente une charge supplémentaire de travail et ce n’est pas dans la culture professionnelle des collègues. Cela serait anxiogène et traumatisant. »
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Pour le Sgen-CFDT, il est indispensable que l’enseignant∙e prépare son RDV de carrière en ayant un regard réflexif (voire d’auto-évaluation) sur son parcours professionnel.
un élément de reconnaissance de la professionnalité et de l’expertise
L’évolution de l’évaluation professionnelle des personnels passe par un changement de rapport évaluateur∙trice/évalué∙e. L’évalué∙e devient acteur∙trice de son évaluation et c’est son bilan professionnel (document d’appui ou bilan d’activités) qui est le point de départ/support de son évaluation.
Le Sgen-CFDT considère que tou∙te∙s les cadres A de la fonction publique sont en capacité de rendre compte de leurs pratiques et de les formaliser par écrit. Le projet de document d’appui demande à l’enseignant évalué, après 8 ans et 14 ans de carrière, de rédiger 40 lignes.
Pour le Sgen-CFDT, l’existence de ce document constitue un élément de reconnaissance de la professionnalité et de l’expertise des personnels d’enseignement, d’éducation et d’orientation.