Le jeudi 9 janvier 2025, Elisabeth Borne, nouvelle ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et la Recherche réunissait les organisations syndicales représentatives pour faire un point sur la situation à Mayotte.
Depuis le passage du cyclone Chido et les dégâts majeurs qu’il cause à l’ensemble de l’archipel de Mayotte, la fédération CFDT Éducation Formation Recherche Publiques et le syndicat CFDT Académie de Mayotte conduisent une campagne d’appel systématique des adhérent.e.s et sympathisant.e.s pour prendre de leurs nouvelles, connaître leurs besoins. Nous avons déjà transmis des synthèses et des situations critiques au ministère et au rectorat au cours des dernières semaines.
La réunion multilatérale du jeudi 9 janvier 2025, à l’invitation de la nouvelle ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et la Recherche était néanmoins l’occasion d’un important point de situation.
En conclusion de la réunion, Élisabeth Borne a affirmé trois principes : écoute, bienveillance et confiance.
Propos introductif de la ministre
Faire face à une situation dramatique
La ministre a d’emblée rappelé que l’île rencontrait des difficultés structurelles gigantesques avant le cyclone. Avec le cyclone, selon ses mots, nous avons subit la catastrophique naturelle la plus dévastatrice de ces dernières décennies. C’est donc une situation dramatique.
Elle souligne la mobilisation formidable de l’État sur place. Elle salue la mobilisation de tous, agents et salariés car chacun est sur le pont pour permettre un retour plus certain. Elle évoque plus précisément la mobilisation des agents de l’Éducation nationale pour préparer en urgence des établissements à l’accueil de la population.
Elle souhaite le retour le plus vite possible à la situation équivalente à la situation avant Chido, puis la poursuite des investissements et de la mobilisation de tous les services de l’État pour faire mieux qu’avant le cyclone.
Des équipes en renfort ont été envoyées ou le seront sur les aspects pédagogiques et bâtimentaires puisque le rectorat, touché lui aussi, ne peut tout faire.
Les priorités pour l’Éducation nationale à Mayotte
Dans l’immédiat, la ministre demande que le travail de l’administration de l’Éducation nationale à Mayotte et pour Mayotte se structure autour des priorités suivantes :
- Les personnels : le rectorat va contacter tous les personnels de l’académie de Mayotte (situations psychologique, matérielle), et elle appelle à partager les informations entre organisations syndicales et administration ;
- Accueillir dans de bonnes conditions les personnels et élèves, et donc priorité sur l’état des bâtis et sur la sécurité des biens et des personnes : pas de reprise là où l’état des bâtiments n’est pas sécurisé pour les personnels et les élèves ;
- À partir du 13 janvier l’accueil des personnels se fera progressivement, au cas par cas pour que chaque équipe pédagogique puisse réfléchir à la façon de reprendre les activités pédagogiques, et pour communiquer aux familles ces modalités de reprise. Une priorité sur les élèves des classes à examen et sur les enfants des agents et salariés indispensable à la vie sur l’île ;
- La loi d’urgence présentée au conseil des ministres.va permettre des dispositions pour raccourcir les délais administratifs pour les reconstructions en général et celles des établissements scolaires.
Pour la CFDT, il faut préparer une rentrée mais pas la rentrée
La CFDT a de nouveau rappelé que courant janvier 2025, il pouvait y avoir une rentrée, en tenant compte des conditions réelles créées par le cyclone et donc sans précipiter les choses, mais pas la rentrée comme s’il n’y avait pas un événement climatique et météorologique extrême et une situation dramatique à Mayotte.
Le desserrement du calendrier présenté par la ministre va dans le bon sens, et le fait de faire confiance aux équipes des écoles et établissements pour penser et organiser les modalités d’accueil des élèves, de reprise de l’enseignement pour tenir compte des réalités vécues est aussi de bonne politique.
Nous avons rappelé que les personnels et les élèves allaient avoir besoin de soutien psychologique et matériel dans la durée.
Structurer le dialogue social
La CFDT Éducation Formation Recherche Publiques a demandé la réunion exceptionnelle de la formation spécialisée santé, sécurité et condition de travail au niveau ministériel et au niveau académique pour suivre dans la durée la situation à Mayotte. La ministre a répondu favorablement à cette demande de dialogue social local et national.
Chercher un contact direct et individuel avec les agents pour connaître leurs besoins
Comme déjà le 18 décembre 2024, nous avons indiqué à la ministre que les agents de l’académie de Mayotte sont encore souvent dans l’incapacité d’accéder à internet voire même au réseau téléphonique de manière stabilisée. Il convient donc de les contacter directement chacun et chacune en les appelant et non d’attendre qu’ils et elles répondent à un questionnaire par mail. Nous avons indiqué à la ministre que les agents à Mayotte avaient encore un accès difficile à internet et au réseau de téléphonie, et que la communication par SMS était la plus efficace.
Ce vendredi 10 janvier 2025, les agents de l’académie ont reçu un SMS de l’Éducation nationale afin que le plus grand nombre ait enfin l’information qu’ils et elles peuvent signaler leurs besoins à leur employeur.
Nous avons souligné que tous les agents auraient besoin de soutien à leur réinstallation, même celles et ceux dont le logement reste habitable, car ils et elles vont devoir racheter tout ou partie du mobilier, de l’électroménager, des autres appareils électriques et électroniques, de leurs vêtements… D’où notre lecture critique de l’aide exceptionnelle qui ne concerne pour le moment que les agents rémunérés sous l’indice 448, le rappel de notre demande de mesures pour tous les agents.
Aider au retour des agents à Mayotte
Nous avons insisté sur le fait que le prix des billets d’avion était prohibitif pour beaucoup d’agents et que celles et ceux qui ont été évacués n’ont pas d’information sur la marche à suivre pour revenir à Mayotte. La ministre a pris note sans apporter à ce stade de réponse opérationnelle mais elle a demandé à ses services d’y travailler. Nous avons affirmé qu’il était pour la CFDT hors de question que des agents empêchés de revenir, y compris parce que les billets d’avion sont à des prix prohibitifs, aient des retenues sur salaire. C’est notamment en réponse à ce propos que la ministre a réaffirmé que les absences justifiées par les circonstances exceptionnelles post-cycloniques seraient étudiées avec bienveillance.
Sécuriser les agents contractuels de nationalité étrangère
Nous avons attiré l’attention de la ministre sur le risque pour certains collègues de se retrouver hors délais pour le renouvellement de leur titre de séjour du fait d’une préfecture inaccessible depuis octobre 2024 et désormais évidemment absorbée par la gestion de crise.
La CFDT a affirmé que c’était à l’État employeur de protéger ses agents, de sécuriser leur situation administrative. La ministre a pris note de ce risque et demandé à ses services d’y travailler.
Scolariser tous les enfants présents à Mayotte
Alors que certains responsables politiques continuent ou recommencent à tenir des discours d’exclusion des enfants étrangers, nous avons réaffirmé notre exigence que tous les enfants soient scolarisés. En réponse, la ministre a affirmé que c’était l’évidence car c’était cela l’école de la République.
Les réponses aux questions soulevées dans la réunion
La ministre dans ses réponses à l’ensemble des organisations syndicales a annoncé qu’il y aurait progressivement un appel systématique des agents pour recenser leurs besoins et ce sont les services de l’Éducation nationale qui solliciteront les autres administrations en tant que de besoin.
Elle a promis écoute, bienveillance et confiance dans le pilotage du service public d’éducation et dans l’accompagnement des agents de l’académie de Mayotte.
La sécurité d’abord
La ministre l’a affirmé à plusieurs reprise pendant la réunion : il n’y aura pas de reprise des personnels ou des élèves là où l’état des bâtiments ne garantit pas leur sécurité.
Une visite de prévention est menée ou va l’être dans les prochaines heures dans tous les établissements, et des préconisations sont faites pour assurer la sécurité. L’acheminement des alarmes incendies, des extincteurs est en cours et donc des équipes de prévention et de sécurité qui seront mis en place pour quelques temps pour compenser l’absence de ces équipements.
400 tentes – écoles sont commandées pour compenser certains battis ou pour des besoins plus importants.
Le logement des agents
Élisabeth Borne a affirmé qu’il était évidemment impossible de reprendre son poste pour un agent qui n’as pas de solution de logement.
Elle rappelle que les destructions sur l’île sont telles, qu’il n’y a pas de logements en réserve, ni mobilisables immédiatement pour reloger. Des constructions temporaires vont être installées.
L’Éducation nationale travaille avec les autres services publics pour trouver des solutions pour les agents qui n’ont plus de logement.
Le soutien financier aux agents de Mayotte
À propos de la prime de 2000€ versée aux agents rémunérés sous l’indice 448, la ministre explique ne pas avoir cherché à générer de la défiance ou de la conflictualité. Le ministère, par prudence et en urgence, a cherché à utiliser l’argent qui restait pour l’année 2024 donc a été obligé de choisir pour le moment certains critères mais elle a entendu les critiques des personnels et des syndicats et demande à ses services de construire des mesures de soutien pour tout le monde. Elle annonce des procédures simplifiées pour accéder à l’action sociale et à des aides d’urgence classique au bénéfice de tous les agents.
Le gouvernement veut par ailleurs prendre des mesures pour bloquer les prix d’un certains nombre de biens et service, ainsi que les loyers.
Les mesures pour les élèves de Mayotte
Des fonds sociaux sont débloqués pour aider les familles et les élèves pour se rééquiper, et il est envisagé d’acheminer des kits scolaires pour que les élèves disposent du matériel scolaire nécessaire pour étudier.
La ministre demande de vérifier que la collation pourra bien être servie partout, de s’assurer que le transport scolaire pourra être assuré.
Elle va travailler avec les autres services de l’État pour envisager un examen de santé pour tous les élèves, dans le cadre scolaire.
Plusieurs organisations dont la CFDT ont indiqué que nos adhérent.e.s témoignent de difficulté d’accès à la nourriture pour une partie importante de la population.