Le CNESER examinait le 11 mars 2025 la répartition du budget de l'enseignement supérieur et de la recherche. La CFDT est intervenue pour faire état de ses inquiétudes vives sur le financement de l'ESR public.
Enfin un budget 2025 pour l’ESR, mais…
L’État a finalement un budget 2025 pour l’ESR et c’est, en soi, une bonne nouvelle. Le fonctionnement en service voté n’était pas viable pour le service public, et mettait déjà en grande tension les services et les agents. La situation n’était pas tenable et aurait eu des conséquences graves si elle s’était prolongée. Nous avons donc un budget ; mais, soyons clair, ce n’est pas un bon budget. Il laisse l’enseignement supérieur et la recherche publique dans la situation de sous-financement chronique dans laquelle on s’enfonce depuis de trop nombreuses années, un sous-financement qui met en danger les conditions d’études et de travail, et pour dire les choses, qui broie les équipes et la santé des collègues.
Des nouvelles moins mauvaises
Certes, certaines nouvelles sont moins mauvaises qu’on le craignait.
Du côté de l’enseignement supérieur, la compensation intégrale de la hausse du CAS pension était une revendication de la CFDT qui a été satisfaite, mais ça aurait dû être une évidence ; les charges de la partie non compensées des mesures Guérini continue à peser sur les établissements.
Le maintien, même au ralenti, des mesures du protocole carrière et rémunérations sont indispensables pour le crédit de la parole de l’État, mais c’est très insuffisant. Nous continuons à demander :
- l’alignement de l’indemnitaire des BIATSS sur la moyenne de ce qui est servi pour des corps analogues dans le reste de la fonction publique,
- l’intégration des ESAS au RIPEC,
- l’augmentation massive du taux de l’heure complémentaire, qui comme les heures supplémentaires de l’enseignement scolaire, devrait être alignée (avec majoration et non minoration) sur l’équivalent horaire de la rémunération des enseignants et enseignants-chercheurs,
- d’autres mesures catégorielles sont urgentes, notamment pour les ATER. Il y a un effet d’accumulation du retard que l’on est très loin d’avoir soldé, et comme on l’a dit, l’effet pour les collègues, y compris pour leur santé, est terrible.
Si la CFDT ne s’oppose pas à ce que les établissements recherchent des ressources propres pour améliorer leurs marges de manœuvres, cela ne saurait se substituer au financement par la collectivité publique de l’enseignement supérieur. Le Conseil constitutionnel a rappelé en 2019 que le principe de gratuité de l’enseignement à tous les degrés s’appliquait à l’enseignement supérieur. C’est donc bien au budget de la nation d’en assurer le financement, comme pour le reste du service public de l’éducation.
Les budgets « vie étudiante » patinent
Le dispositif d’emploi des CROUS ne permet déjà pas de répondre à la demande. Si celle-ci devait encore s’accroitre, ce serait catastrophique et pour les agents et pour les usagers.
Rappelons qu’une proposition de loi a été adoptée à l’Assemblée nationale sur la généralisation du repas à 1€. Le budget actuel ne permet aucunement de se préparer aux conséquences qu’aurait l’adoption définitive de cette proposition de loi.
Sur le volet des aides sociales aux étudiants, on est dans une situation paradoxale. Du fait du blocage des critères d’attribution, la proportion de bénéficiaires s’érode. Nous demandons que soit enfin remis sur la table la révision de ces critères, annoncée depuis longtemps, mais jamais réalisée.
Une stratégie pour la recherche ?
Les annonces du PDG du CNRS sur les prétendus key labs avaient fortement ébranlé la communauté. Nous voulons croire que ce projet est définitivement enterré, mais le doute n’est pas levé.
Quelle est la vision du rôle des ONR ? Quel rôle, finalement, pour les fameuses agences de programme, dont on aimerait d’ailleurs connaître le budget consolidé ? Comment anticiper les nombreux départs à la retraite prévisibles dans les années à venir, dans les EPST comme dans les EPIC ?
Concernant les EPST, on n’a d’ailleurs pas d’information sur les conséquences pour ces établissements de la hausse du CAS pension.
Quant à l’ANR, on ne peut que se réjouir de l’augmentation du taux de succès mais, nous le rappelons, le financement sur projet ne doit pas être la base principale du financement de la recherche. Il ne peut être qu’un complément. Un rapport récent d’Eurocadre montre les effets nocifs du règne du tout-appel d’offre sur la recherche dans de nombreux pays européens. Il est temps d’entendre les alertes formulés notamment par la commission d’étude spécialisée de cette assemblée et rééquilibrer le financement de la recherche vers les financements récurrents, seuls à même de garantir l’indispensable liberté de la recherche.
Quant à la dépense fiscale du crédit impôt recherche, elle demande certainement à être réformée, mieux contrôlée et mieux orientée, mais la suppression du dispositif jeune chercheur, même si ses effets étaient trop modestes, n’était certainement pas la bonne approche. Il faut d’urgence rouvrir ce dossier.
Nous regrettons donc que ce budget, dans un contexte certes contraint, n’ouvre aucune perspective pour l’ESR, indispensable investissement pourtant pour l’avenir du pays.