Le Sgen CFDT s'inquiète du bilan 2022 des accidents du travail, de service et maladies professionnelles à l'éducation nationale, bilan présenté en formation spécialisée ministérielle (ex CHSCT). La surreprésentation des femmes dans ce bilan n'est ni expliquée , ni analysée.
La synthèse statistique des accidents de service, des accidents du travail et des maladies professionnelles pour l’année 2022 a suscité de nombreuses interrogations du Sgen-CFDT.
Comment expliquer la surreprésentation des femmes ?
Les femmes représentent 73,1% de l’effectif total à l’éducation nationale en 2022.
Elles sont surreprésentées dans les accidents du travail (79,1%) et les maladies professionnelles (82,2%).
Les données collectées doivent être analysées avec prudence. Si ces proportions se confirment, comment les expliquer ?
Une hypothèse peut être avancée : les lieux (classe, cour, ..) et la nature (chute, glissades,..) des accidents indiquent majoritairement des personnels en poste dans les écoles et établissements et donc plus exposés. Le même constat peut être fait pour l’exposition aux risques de maladies professionnelles.
Or les femmes sont surreprésentées dans ces fonctions. Cette hypothèse issue des observations militantes de terrain demande à être vérifiée.
Le Sgen-CFDT demande au ministère une analyse de cette situation. Une politique de prévention tenant compte des éléments caractéristiques de la santé des femmes doit être mise en œuvre. Les travaux menés dans le cadre de l’élaboration du nouveau plan d’action pour l’égalité professionnelle pourrait bien apporter des éléments de réponse.
Une grave sous-estimation
En 2022, 15 471 accidents ont été déclarés dont 12 893 reconnus. 341 n’ont pas été reconnus et 2237 sont encours de traitement.
Rapporté au nombre d’agentes et d’agents, cela représente 1,4 % d’accidents déclarés dans les champs de notre ministère .
Or, la moyenne pour la fonction publique d’état est d’environ …7% (10% dans l’ensemble de la fonction publique et 11 % dans le privé) .
Les personnels de l’éducation nationale déclareraient donc 6 à 8 fois moins d’accidents de service, de travail ou de missions que dans le reste de la fonction publique !
Les chiffres proposés par le bilan du ministère semblent donc très loin de refléter la réalité.
De même pour les maladies professionnelles. 600 ont été reconnues dans la fonction publique d’état en 2021. C’est seulement 45 dans l’Éducation nationale en 2022 alors que ce ministère représente 1/5 des effectifs.
Des chiffres très inquiétants au regard des problématiques d’exposition des agents de ce ministère aux polluants et agents CMR , notamment l’amiante.
Les accidents du travail et maladies professionnelles apparaissent gravement sous estimés pour les personnels de l’éducation nationale.
Cette situation semble due à une sous déclaration des personnels concernés, par peur, méconnaissance des procédures, habitude de « prendre sur soi »… Mais, les circuits incomplets de collecte des données par les rectorats expliquent aussi cette sous estimation.
Principaux accidents du travail : trajet et chutes.
Les causes principales d’accident sont les chutes (24,7%) et les accidents de trajet (21,3%) .
Pour le Sgen-CFDT, la proportion très importante et la gravité potentielle de ces derniers doit conduire à une véritable politique de prévention, notamment envers les personnels itinérants.
Exigence rappelée aux chefs de service, DASEN et recteurs/trices dans les orientations stratégiques ministérielles 2024. qui précisent que ce risque doit figurer dans le DUERP.
En juin 2023, le ministère a bien signé l’appel et la charte des employeurs pour la sécurité routière mais nos syndicats constatent encore peu ou pas de déclinaisons locales auprès des agents concernés.
Suicide et tentatives de suicide
Autre risque grave sous évalué pour les organisations syndicales : les suicides et tentatives de suicide imputables au service.
D’après ce bilan , il y aurait eu 9 tentatives. Cependant, aucun suicide n’est imputable au service en 2022 parmi le million deux cent mille agents.
Des chiffres qui laissent sceptiques les organisations syndicales de la formation spécialisée ministérielle au regard de leurs propres retours de terrain..
Très peu de maladies professionnelles… malgré l’amiante ?
191 maladies professionnelles ont été déclarées en 2022 :
- 155 par des femmes, soit 81.2 % des maladies déclarées
- 36 par des hommes, soit 18.8 % des maladies déclarées.
L’instruction des dossiers expliquent les délais importants – parfois plusieurs années – entre déclaration et reconnaissance.
Par ailleurs, sur 178 maladie déclarées avant 2022 et reconnues en 2022, seulement 2 sont imputables à l’amiante.
Le Sgen-CFDT dénonce là une véritable carence et un grave manquement de l’employeur.
Le recensement de la présence d’amiante dans les bâtiments est défaillant, notamment pour les 42 000 écoles primaires.
De nombreux agents travaillent ou ont travaillé au cours de leur carrière au contact de l’amiante sans le savoir.
Les conditions de diffusion et de traitement de l’auto questionnaire sur l’amiante destiné aux agent.e.s ne permettent pas à de nombreux agents d’accéder aux informations.
Beaucoup échappent à ce repérage et au suivi médical auquel ils auraient droit.
La défaillance de la médecine de prévention aggrave cette situation.
Une baisse des agressions reconnues en accidents du travail (de service) ?
80% des accidents de service causés par des agressions ont été reconnus en 2022 (1010 agressions avec ou sans arrêt).
Un pourcentage de reconnaissance en baisse par rapport à l’année précédente (83,7 % en 2021) mais en hausse en comparaison de 2020 (74,9 % -mais année COVID-) et 2019 (78%).
Des chiffres qui apparaissent une nouvelle fois peu fiables.
Le rapport sénatorial paru le 5 mars fait état de près de 100 000 cas annuels de menaces avec ou sans armes et de bousculades intentionnelles contre les enseignants du 1er et du 2nd degré.
Même si toutes ces situations ne relèvent pas d’un accident de service, ces chiffres mettent en avant un grave phénomène de sous déclaration.
Pour le Sgen-CFDT, le manque d’accompagnement et le déficit d’information des agents conjugués à la persistance du « pas de vague » expliquent sans doute cette situation.
Pour le Sgen-CFDT, l’amélioration de la fiabilité des données collectées par le ministère est une priorité. C’est une condition indispensable pour mener une véritable politique de prévention des accidents du travail et maladies professionnelles auprès des agents et agentes.