Alors que nous commémorons le deuxième anniversaire de l’assassinat de Samuel Paty, la publication du premier relevé mensuel du nombre de signalements pour atteintes au principe de laïcité a focalisé l’attention médiatique sur les tensions et incidents dans les écoles et établissements.
Comment agir en cas d’agression ? Si depuis le drame de Samuel Paty, elle semblent mieux prises en compte, les enquêtes montrent que de nombreux collègues confrontés à ces situations préfèrent s’autocensurer par peur des conséquences ou par défiance vis-à-vis de la capacité de leur hiérarchie à les protéger. C’est pourquoi le Sgen-CFDT tient à rappeler aux personnels les droits et les procédures dont ils disposent et aux employeurs l’obligation de mise en œuvre d’une protection fonctionnelle effective.
Voici les bons réflexes à adopter quand un agent.e est victime de menaces ou d’agression.
Alerter l’employeur : le droit d’alerte en cas d’agression ou de menace
Ce qui est arrivé à Samuel Paty nous rappelle que les menaces contre les personnels liées au fanatisme religieux ou politique doivent être traitées avec la plus grande vigilance.
Outre l’appel aux services de secours en cas d’urgence, l’agent ou les personnels concernés doivent alerter immédiatement l’employeur ou son représentant (chef d’établissement, IEN..) qui doit prendre les mesures immédiates. C’est le « droit d’alerte », prévu à l’article 5-6 du décret 82-453 du 28 mai 1982 : « L’agent alerte immédiatement l’autorité administrative compétente de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé… »
Cette situation donne lieu ultérieurement à la rédaction d’une fiche qui sera transmise à l’employeur et consignée dans le RDGI (registre des dangers graves et imminents). L’autorité administrative ou son représentant (IEN, chef d’établissement) doit procéder sur le champ à une enquête.
En fonction des circonstances, le ou les agents concernés ont aussi la possibilité de rédiger une fiche de signalements dans le registre santé et sécurité au travail (RSST) qui mettra également en responsabilité l’employeur. Celui-ci devra l’intégrer dans le Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUERP) de l’établissement ou du service mise à jour annuellement
Il faut rappeler qu’en dehors des situations de menaces ou d’agression, les atteintes à la laïcité font l’objet d’une procédure de signalement et de traitement spécifiques : un formulaire de signalement est accessible en ligne (https://eduscol.education.fr/1621/le-formulaire-atteinte-la-laicite).
Dans chaque académie, une équipe »Laïcité et fait religieux » doit apporter aux équipes pédagogiques et éducatives une réponse concrète en cas d’atteinte au principe de laïcité. Elle les forme et aide les établissements à réagir de manière appropriée.
Demander la mise en œuvre de la protection fonctionnelle
Les agents publics bénéficient d’une protection spéciale prévue par les textes et mise en œuvre parl’employeur : c’est la protection fonctionnelle.
Elle concerne les atteintes volontaires à leur intégrité physique, les violences, le harcèlement, les menaces, injures, diffamations ou outrages dont ils et elles pourraient être victimes dans l’exercice de leurs fonctions. L’administration doit prévenir ou prendre les mesures adéquates pour faire cesser les attaques dont est victime ou pourrait être victime un agent ou ses proches.
Le choc créé par l’assassinat de Samuel Paty a conduit le Gouvernement à rappeler et préciser cette obligation dans une circulaire du 2 novembre 2020. Elle évoque les nouvelles problématiques liées aux réseaux sociaux et un délit spécifique a été créé par la Loi du 24 août 2021 »confortant le respect des principes de la République ».
Elle précise qu’en cas d’urgence, la protection fonctionnelle peut être accordée à titre conservatoire et menace « de procédure disciplinaire » les responsables hiérarchiques (chef d’établissement, IEN, DASEN, recteur ..) qui feraient preuve de négligence dans sa mise en œuvre.
La protection fonctionnelle n’est pas de droit. L’agent en fait la demande par écrit à son chef de service (DASEN, Recteur) par la voie hiérarchique.
Accordée, elle doit prendre des formes adaptées à la nature de la menace ou de l’attaque. Des mesures insuffisantes ou inadaptées à la situation peuvent être sanctionnées par le juge et engager la responsabilité de l’employeur.
Précision importante : Même s’il est souvent conseillé de le faire, il n’est pas nécessaire de porter plainte pour bénéficier de la protection fonctionnelle.
Porter plainte
Le Sgen-CFDT conseille de porter plainte dans un commissariat ou une gendarmerie, et non de se limiter à une main courante qui laisse juste une trace et n’entraîne aucune suite.
Il arrive que l’agent victime essuie un refus, celui-ci est illégal.
Dans ce cas, il est possible d’adresser sa plainte directement au procureur de la république territorialement compétent et de lui signaler le refus de prendre la plainte.
Déposer une préplainte en ligne est également possible (https://www.pre-plainte-en-ligne.gouv.fr/).
L’agent est convoqué dans les jours suivants au commissariat ou à la gendarmerie compétente pour finaliser sa plainte.
Si la protection fonctionnelle est accordée, l’agent peut bénéficier d’une assistante juridique (avocat) et de la prise en charge des frais de procédure dans le cadre d’une convention spécifique.
Les autres démarches individuelles en cas d’agression
Vivre une telle situation peut impacter fortement la santé physique et psychologique.
Il est important de ne pas rester seul.e.
Si vous êtes dans cette situation, le Sgen vous conseille de rencontrer le médecin du travail pour qu’il constate l’impact que vous avez subi et vous conseille dans les éventuelles suites. Vous pouvez aussi contacter les psychologues du réseau Pass ( 0 805 500 005).
Les militantes.es et équipes du Sgen-CFDT sont aussi là pour les accompagner dans ces démarches et ces procédures
Quelles que soient les circonstances, rapprochez vous de nos équipes académiques qui seront à vos côtés.