Première partie de la déclaration liminaire du Sgen CFDT à la Formation spécialisée santé, sécurité et conditions de travail du CSA Ministériel du MENJS du lundi 10 juillet 2023
Le drame qui s’est produit à Nanterre et qui a provoqué la mort de Nahel, jeune homme de 17 ans, est profondément choquant. Les violences urbaines qui ont suivi ont provoqué d’autres drames humains et de nombreuses dégradations.
Soutenir nos collègues
Les établissements scolaires, notamment les écoles maternelles et élémentaires, n’ont pas été épargnées.
Nous témoignons notre soutien à nos collègues et aux agents travaillant dans ces établissements. Notre fédération leur a adressé des premiers éléments d’informations et de conseil pour les accompagner.
Beaucoup d’entre eux et elles ont été impactés psychologiquement, parfois matériellement par ces évènements, mais heureusement, à notre connaissance, aucun n’a été victime de violences physiques.
La question de leur accompagnement pour leur retour au travail aurait nécessité une communication claire du ministère et des rectorats et un échange avec les représentants des personnels.
Nous avons été étonnés que les formations spécialisées départementales (ex CHSCT) des territoires concernés ne soient pas réunies en urgence la semaine dernière pour évoquer la situation des agents, leur accompagnement et leur protection.
Le Sgen-CFDT réaffirme son opposition à toutes violences, contre les personnes et contre les biens. Notre fédération ne trouve pas d’excuses à ceux qui les ont commis, notamment lorsque des élu.e.s ou leurs familles ont été pris pour cible.
Des violences urbaines qui doivent interroger notre « système » scolaire tout entier
La plupart des auteurs de dégradations sont nos élèves, actuels ou anciens. Mais, la grande majorité des jeunes de ces quartiers n’a pas participé, voire a dénoncé ces actes. Le Sgen-CFDT et la CFDT dénoncent les amalgames, les raccourcis et l’instrumentalisation politique qui a été faite de ces évènements.
Les comportements des auteurs de violences et l’approbation passive de certains interrogent le système éducatif tout entier, les programmes et la pédagogie que l’on nous demande de mettre en œuvre auprès d’eux.
Ce sont bien les écoles et établissements publics de l’éducation nationale et leurs équipes pédagogiques qui sont en première ligne sur le sujet. Les établissements privés sont quasiment absents des quartiers où se sont déroulées ces émeutes.
Notre service public est le seul à être aussi massivement présent auprès des jeunes qui étaient dans la rue ces dernières nuits et dont beaucoup sont d’âge scolaire. À travers ces évènements, c’est aussi notre relation avec leurs familles, leurs parents qui est interrogée.
Quels temps dans la scolarité pour construire la citoyenneté ? Quels moyens humains, mais aussi en temps et en matériel donné aux équipes pédagogiques, de la maternelle au lycée, pour construire le vivre ensemble, la solidarité, la coopération, la confiance et l’estime de soi, la tolérance, l’appropriation des valeurs républicaines et associer parents et familles à ce travail ?…
Finir le programme, le français et les maths, évaluations par-ci, évaluations par là, travailler la résolution de problème dès la grande section de maternelle pour remonter dans les enquêtes PISA !….. est-ce bien cela les objectifs prioritaires pour les jeunes de ces quartiers ? Et, au-delà, pour tous nos jeunes ? D’autres priorités tout aussi importantes ne devraient-elles pas également être mises en œuvre et faire partie de nos objectifs pédagogiques ?
Structurer le dialogue social
Le Sgen-CFDT tient à apporter son soutien et à remercier tous les agents des services publics mobilisés pendant ces évènements : collectivités territoriales, services d’urgence, police nationale et gendarmerie. Comme le rappelait récemment le secrétaire général de la fédération CFDT Alternative police :
Le problème de fond par la réponse sécuritaire, c’est un faux débat et ce n’est pas la police qui va régler tous les problèmes de fond que l’on a aujourd’hui dans notre société.
Comment ne pas mettre en parallèle les milliers de cortèges festifs et conviviaux contre la réforme des retraites, qui se sont déroulés pendant des mois sans incident, hormis dans trois ou quatre grandes villes.
Des cortèges qui ont défilé sans aucun problème dans ces mêmes villes concernées par les violences urbaines et les émeutes…
C’est bien la question des corps intermédiaires, du mouvement social et de l’éducation populaire, de leur disparition dans ces quartiers, de la reconnaissance et de leur participation à la vie sociale et sociétale de notre pays qui est aujourd’hui posée à travers ces actualités. Au lieu d’adopter la posture du mépris et de l’arrogance, le gouvernement ferait bien de s’attaquer d’urgence à cette question et de les écouter.
Dans l’immédiat, le système éducatif fait face à une crise majeure. Pour le Sgen-CFDT, dans pareille situation, il est indispensable que les autorités académiques structurent le dialogue social avec les organisations représentatives des personnels : partager des informations, des analyses, des propositions pour faire face à une situation difficile à vivre professionnellement. C’est aujourd’hui très rarement le cas, tout se passe comme si les organisations syndicales n’étaient pas considérées comme des interlocuteurs majeurs pour agir, pour définir ensemble les voies et moyens de soutenir, protéger, mais aussi préparer l’après. Il est aussi indispensable que les autorités académiques prennent la mesure d’une double responsabilité : au titre de la mise en œuvre des politiques scolaires et au titre de la mise en œuvre des politiques de jeunesse, des sports et de la vie associative.