Le ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports lance une consultation sur le bâti scolaire. Faut-il s'en saisir ? Un questionnement qui doit aussi irriguer notre action syndicale au plus près des collectifs de travail.
Les modalités de la consultation
Le Ministère de l’Éducation nationale de la Jeunesse et des Sports a lancé le 25 février une concertation au sujet des espaces scolaires. L’objectif affiché est de « dessiner ensemble une École plus sûre, plus verte, plus ouverte, favorisant l’inclusion et le bien-être ». Cette démarche concerne toutes les parties prenantes, élèves, parents, personnels, élu·es, spécialistes du bâti scolaire et grand public.
La consultation se termine le 8 avril 2021 et donnera lieu à une synthèse puis à des référentiels qui doivent être publiés « à partir de septembre 2021 ».
Un système de vote désignera les propositions les plus populaires et le ministère associera à ses travaux les contributeurs les plus actifs.
Concrètement, on peut répondre à une courte enquête, selon son statut (avec authentification pour les personnels EN), partager des propositions sur une boîte à idées. Travailler avec ses élèves à l’aide de kits pédagogiques.
Le site est fourni par Cap Collectif qui développe des applications participatives clé en main.
C’est l’un des aspects intéressants de ce projet : initier nos élèves à une forme de processus participatif sous la forme d’un « atelier d’idéation en classe ». Un kit est proposé pour réaliser l’atelier avec des élèves de collège ou de lycée sur une plage de 1h30 à 2 heures (groupe de 12 à 30 élèves).
On ne peut que se réjouir de la diffusion de ce type de pratiques qui offre l’opportunité de former des citoyen·nes plus engagé·es. Sans naïveté cependant car ne peut être occulter le risque que cette consultation ne rejoigne dans son fonctionnement et ses résultats ce que nous avons connu pour le Grenelle de l’éducation.
Le Sgen-CFDT a participé au Grenelle jusqu’à son terme mais son résultat ne nous satisfait guère, d’autant que la mise en œuvre des propositions reste suspendue à des temps meilleurs.
Faut-il participer à cette nouvelle consultation ? Chacun·e en jugera.
Mais il est certain que la préoccupation autour du bâti scolaire n’est pas apparue au moment de la crise sanitaire, même si cette dernière a pointé un certain nombre d’enjeux.
Les nombreuses problématiques soulevées par le bâti scolaire
Le bâti scolaire a en effet des implications nombreuses, quoique non exclusives d’autres facteurs.
La transition climatique nous oblige à repenser nos lieux d’enseignement en tenant compte de leur empreinte carbone. Il met l’accent en particulier sur l’isolation thermique et la thermorégulation, en plus de la question de la ventilation si importante pour faire face à la crise actuelle. Comment procurer des conditions d’étude et de travail satisfaisantes lorsqu’il fait trop chaud ou trop froid ou dans des conditions d’éclairage insatisfaisantes (lumière naturelle) ?
Le bâti scolaire a également une influence sur les pédagogies que nous mettons en œuvre.
La différenciation, l’inclusion, l’utilisation du numérique… quel·le enseignant·e ne s’est pas heurté à des locaux trop étroits ou mal adaptés aux choix qu’il/elle souhaitait réaliser ? Sans parler évidemment de la question de la distanciation et celle du brassage si importantes dans la crise sanitaire.
Qualité de vie au travail
Le bâti scolaire c’est aussi un des éléments importants de la qualité de vie au travail. Les salles de travail, d’étude, de repos, pour les personnels comme pour les élèves, nous font trop souvent défaut. Comment développer la coopération, l’inclusion, lorsque les locaux ne s’y prêtent pas ? L’ascèse devrait être un choix, pas une contrainte. Nous défendons un métier qui ne se limite pas aux heures devant élèves mais favorise le travail collectif, le bien-être tant des élèves que des personnels.
Le bâti scolaire intègre également l’aménagement des espaces de restauration, la gestion du bruit, l’égalité professionnelle…
Sur ce plan par exemple, l’aménagement des cours de récréation doit tenir compte à la fois de la sécurité, des enjeux écologiques (réchauffement, biodiversité, cultures, etc.) et de la mixité. L’accès aux sanitaires des élèves comme des personnels, leur utilisation et leur hygiène sont aussi des questions récurrentes (ce sont des espaces souvent genrés et qui doivent tenir compte de la proportion importante de femmes dans nos métiers).
Le bâti scolaire renvoie encore à la double responsabilité de notre ministère et des collectivités territoriales. On ne construit pas, on ne rénove pas pour un mandat, ou pour suivre une mode architecturale ou procurer une sensation esthétique.
Il faut être visionnaire sans perdre de vue les finalités.
Et ces finalités ne sont pas toutes connues au moment où l’on agit. La modularité doit aussi tenir compte des autres usages auxquels on peut destiner ces locaux qui appartiennent aux collectivités territoriales. Ces locaux peuvent accueillir d’autres activités en dehors du temps scolaire, qu’il s’agisse d’activités périscolaires (restauration, accueil du matin ou du soir, du mercredi ou des vacances, TAP/NAP) ou d’activités associatives par exemple. Les espaces scolaires pourront aussi avoir d’autres vocations en fonction de l’évolution de la démographie et des formes scolaires.
Des impératifs de sécurité incontournables
Un défi majeur à venir pour le bâti scolaire sera de concilier ces problématiques avec les impératifs de sécurité qui, depuis une vingtaine d’années, prennent une part grandissante dans la vie et le fonctionnement des établissements. La prise en compte des évènements climatiques extrêmes (canicule, inondation, tempête…) liés au réchauffement climatique et la persistance des menaces terroristes sont aujourd’hui des données incontournables de cette réflexion.
Des synergies avec les autres fédérations de la CFDT et les organisations du Pacte du Pouvoir de Vivre
Sur toutes ces questions, nous pouvons aussi nous associer à d’autres fédérations de la CFDT qui disposent d’une expertise qui peut nous aider à appréhender la question. Il s’agit en particulier de la Fédération Interco qui est directement intéressée par ces questions, avec nos collègues ATSEM en particulier. Mais aussi des fédérations du bâtiment, du bois…
Nous avons également des partenaires dans le cadre du Pacte du pouvoir de vivre qui peuvent aussi nous permettre de développer des actions, au cours de cette consultation officielle ou dans notre action syndicale au sein de nos établissements, de nos circonscriptions ou de nos collectivités.
La fédération est preneuse de vos contributions à ce sujet.