Écouter les personnels pour changer l'organisation du travail!
Sécuriser le parcours des agents
« Bien évidemment quand on arrive au CNED on pousse un soupir de soulagement parce qu’on y arrive après un parcours difficile avec la maladie et tout ce que cela implique comme souffrance physique mais aussi morale. L’anxiété au sujet de son avenir professionnel mais aussi économique : va t-on demain avoir encore une rémunération décente ? va-t-on pouvoir nourrir sa famille ? pouvoir rembourser les traites de sa maison ? et payer des études à ses enfants ? Ce soulagement ne permet pourtant pas de se sentir, pour autant, détendue car on sait que cet abri sera remis en question régulièrement : en effet à peine a-t-on reçu l’assurance de son poste pour la rentrée prochaine (les Commissions Paritaires se tiennent en avril) qu’on sait qu’il faudra dans quelques mois à peine (septembre, octobre) déjà penser à postuler pour l’année prochaine et que rien n’est acquis. On se sent un peu comme assis sur un strapontin au bord d’un précipice. »
Construire de véritables équipes de travail
« À ma connaissance l’accueil est très variable selon les sites. Personnellement j’ai vécu une expérience assez désagréable et décourageante : personne ne s’est adressé à moi avant le mois de janvier (bien que pendant tout ce temps j’ai corrigé scrupuleusement toutes les copies qu’on m’avait adressées), et encore ce fut pour me passer un savon en raison d’une mauvaise note donnée à une copie pour cause de copié-collé du corrigé. J’ai ressenti alors un grand isolement et une frustration. Pour rompre cet isolement il ne s’agit pas seulement de pouvoir échanger sur l’un ou l’autre des forums qui ont, je le reconnais, le mérite d’exister, et sur lesquels les PN peuvent échanger avec leurs collègues, car il s’avère que ce type d’échanges spontanés, n’est pas toujours “bienveillant” et on n’y trouve pas forcément le réconfort attendu… Or ce à quoi j’aspire surtout, c’est de faire partie d’une vraie équipe de travail, une équipe qui tisse des liens notamment professionnels, mais qui tienne compte aussi de ma situation personnelle. Ce que j’attends, c’est une reconnaissance à la fois individuelle et institutionnelle, et des relations de travail basées sur la confiance et le respect. »
Reconnaître la diversité des compétences des PN
« Le rôle des PN est malheureusement envisagé surtout avec le prisme “de la correction des copies”. Et si parfois on veut bien nous confier d’autres tâches, c’est souvent « en plus », c’est à dire sans nous décharger de la correction des copies, du moins après avoir largement rechigné à nous accorder cette décharge pourtant légitime.
La correction des copies est une tâche que l’on peut qualifier au minimum de « pas vraiment excitante », surtout lorsqu’elle n’est pas assortie des autres facettes du métier d’enseignant « ordinaire ». Il est d’ailleurs étonnant qu’à l’heure de l’Intelligence Artificielle et du e-learning, l’activité essentielle du CNED et du PN reste celle de corriger encore et toujours des copies. De plus, la durée de la correction d‘une copie semble avoir été minutée par l’institution. Il se trouve que je ne suis pas rapide, car je passe en moyenne 1 h par copie et parfois plus, voire beaucoup plus (plusieurs heures), ce qui d’ailleurs est un problème pour ma santé que de rester des heures assise sur ma chaise devant mon écran, sans bouger. Le minutage officiel est très optimiste et ma charge de travail réelle, y compris le temps pour aller sur le site CEL télécharger la copie, puis pour la redéposer une fois le travail de correction fini est donc très largement supérieure à celle estimée par l’institution.
Si cette tâche reste centrale pour les PN elle doit trouver sa place dans un véritable parcours d’évaluation. Pourquoi ne pas réfléchir selon les termes de la FOAD actuelle ? Permettre d’ouvrir des chats, des forums, associer les correcteurs à un ensemble d’outils d’évaluation plus cohérent et valorisant… »
Écouter les acteurs pour améliorer le service aux publics
« Il se trouve que je suis correctrice mais aussi parent et qu’à ce titre j’ai pu juger le CNED de l’extérieur en tant que « client ». Il faut dire que je suis scandalisée de la qualité de certaines corrections portées sur les copies de mes enfants, sur la copie est portée une note, et une bonne note, (parce que personne ne conteste une bonne note), 2 ou 3 remarques sibyllines, mais sans relever ni corriger les erreurs, pourtant, hélas, nombreuses sur la copie de mon fils et au final une bonne note sans aucun lien avec la médiocrité réelle du travail réalisé par mon fils !
En tant que correctrice je vois aussi le CNED de l’intérieur et j’ai constaté que quand on met un “0” ou “non noté” à une copie qui ressemble terriblement au corrigé, il faut prouver le bien-fondé de cette notation. Autrement dit, d’un côté, c’est la pression du minutage : vous devez corriger le maximum de copies, donc faire cela le plus vite possible, mais d’un autre côté, lorsqu’il y a tricherie, à charge pour le PN de passer des heures à faire des recherches sur le net pour prouver la fraude. Ce qui pose question : le CNED est-il une entreprise au service de clients qu’il faut satisfaire à tout prix en donnant de bonnes notes à leurs enfants ? même celles obtenues, en quelques clics, grâce au copié-collé de sources trouvées sur Internet (sources qui peuvent même fournir le corrigé officiel du CNED mis en ligne par un camarade complaisant) ? Est-ce vraiment cela que l’on attend de nous ? Et comment trouver du sens et de la satisfaction dans son travail, quand l’absurde atteint ce niveau ?
Aujourd’hui, je suis déçue et dans l’incompréhension face au non-sens du travail qui m’est demandé et je ressens de la frustration et de l’impuissance. Je regrette de ne pas avoir la possibilité de transmettre, d’apprendre encore de nouvelles choses, d’être utile, de contribuer à l’évolution des mentalités, à l’évolution du regard qui est posé sur le handicap, et d’apporter ma pierre à la construction du bel édifice qu’est le CNED dans sa vocation première de mettre le Savoir à disposition de tous. »