Lors de la séance d'installation du CNESER en présence de la ministre de l'Enseignement supérieur et de la recherche, et dans le contexte d'annonces inquiétantes sur les moyens de l'ESR, la délégation CFDT a tenu à rappeler la situation préoccupante de nos établissements.
Installation du CNESER
Madame la Ministre, les membres de la délégation CFDT au CNESER, première délégation au sein de cette assemblée, vous remercie de votre présence à nos côtés pour cette séance d’installation. Cela témoigne de l’intérêt que vous portez à cette instance et, nous l’espérons, présage de votre volonté d’en entendre les avis.
Les membres de la délégation CFDT, élus ou nommés, qu’ils soient issus des EPSCP, des EPST ou des EPIC auront à cœur d’y travailler à l’amélioration du système d’enseignement supérieur et de recherche de notre pays, et de porter la voix de ceux qui en sont les meilleurs experts : les agents qui y œuvrent au quotidien, malgré tout, pour faire fonctionner ce pan fondamental du service public.
Les difficultés humaines et budgétaires sont immenses…
“Malgré tout,” en effet : les difficultés sont immenses, vous le savez. Dans les universités en particulier, l’accroissement considérable du nombre d’étudiants ces vingts dernières années n’a jamais été accompagné d’une augmentation en proportion des moyens financiers et humains nécessaires pour assurer la formation de ces jeunes. Le résultat, vous le connaissez : un sous-financement considérable des premiers cycles universitaires, qui ne tournent plus que par le recours massif à des ESAS mal reconnu, à des vacataires payés mal et très tardivement, et, globalement, à des agents titulaires ou contractuels qui s’épuisent à la tâche, au point souvent d’y laisser leur santé. Et, plus généralement, c’est l’ensemble des établissements représentés ici, EPSCP, EPST comme EPIC, qui sont en grave difficulté pour accomplir leur mission avec les moyens dont ils disposent.
Dans ce contexte, vos récentes déclarations sur la non-compensation des mesures “fonction publique” et, plus encore, celle du président de la république déclarant “qu’avec leur budget, les universités peuvent faire mieux”, ne sont pas entendables et ont, disons-le, quelque chose de désespérant. Non, madame la ministre, on ne peut pas dire à nos collègues, vos collègues, qu’ils “peuvent faire mieux” sans moyens supplémentaires. Après des années d’écart croissant entre ce que la Nation exige de l’enseignement supérieur et les moyens qu’elle consent à lui donner, non : on ne peut pas faire plus, on ne peut pas faire mieux. Et peut-être, par épuisement et faute de ressources, sera-t-on contraint de faire moins – mais lorsque des établissements envisagent de diminuer leurs capacités d’accueil, ce sont les services du ministère et les recteurs qui les somment de maintenir, voire d’augmenter ces capacités.
Où le président veut-il emmener les universités ?
Mais peut-être les propos du président de la République, combiné à vos annonces, sont-ils le signe d’un changement de cap radical, peut-être entendez-vous renverser la tendance longue à la hausse du niveau de diplomation qu’atteignent nos jeunes ; peut-être la rigueur budgétaire qui s’annonce est-il un changement de projet, où l’accès à la connaissance et à des compétences élevées ne serait plus encouragé, mais limité et orienté vers des besoins immédiats ? Si ça devait être le cas, cela mériterait d’être dit clairement, et débattu non seulement entre nous, mais au sein de la société toute entière. La CFDT est historiquement attachée à la hausse de la qualification de la main d’œuvre et voit les progrès du savoir comme une nécessité absolue pour préparer les diverses transitions que nous allons devoir mener à bien. C’est à partir de ces éléments fondamentaux que nous construirions notre position dans ce débat si jamais il devait avoir lieu.
Mais aura-t-il lieu ? Ou serons-nous condamnés à cette évolution de manière rampante, par étranglement progressif des moyens de nos établissements et par l’épuisement de notre force de travail ? Pour les représentants syndicaux que nous sommes, qui voient au jour le jour les conséquences du sous-financement sur les conditions de travail de nos collègues, voire sur leur santé, cela ne serait pas acceptable. Madame la Ministre, le premier souhait que nous ayons à formuler en ce début de mandature, c’est que vous entendiez leur voix et que vous nous aidiez à les faire entendre à tous les niveaux de l’État.