Lors du Conseil supérieur de l’Éducation, réuni le 30 janvier, la ministre E. Borne a confirmé l'abandon de quelques mesures du choc des savoirs mais n'est pas allée au bout de la démarche et, contre l'avis unanime de l'instance, a maintenu, au moins pour la prochaine rentrée, les groupes de niveau.
Tant que de nouveaux textes n’existaient pas, nous nous devions de penser qu’à la prochaine rentrée l’essentiel des mesures du « Choc des savoirs » ne serait plus qu’un mauvais souvenir (voir notre article du 17/01). Des prises de parole de l’actuelle ministre, Élisabeth Borne, pouvaient le laisser penser. Des choix très marqués idéologiquement de l’ancien ministre Attal ont, en effet, été remisés sans ménagement :
- le DNB ne sera pas obligatoire pour poursuivre en classe de seconde,
- l’expérimentation des classes de Prépa-seconde ne préfigure plus leur généralisation future
- l’enseignement des maths et du français en « groupes de besoins »pour le choc des savoirs ne sera pas étendu aux classes de 4ème et 3ème.
La ministre a donc acté que cet ensemble de mesures visant à trier et à sélectionner les élèves était mauvais, comme nous n’avons cessé de le clamer depuis les annonces du choc des savoirs de fin 2023. Aussi comme l’a confirmé le conseil d’État en retoquant le décret qui avait permis la mise en œuvre de la plus emblématique de ces mesures : les « fameux » groupes.
L’erreur est humaine, elle a été corrigée pourrions-nous penser… mais non !
UNE OCCASION MANQUÉE
Ce jeudi 30 janvier de nouveaux textes ont été présentés en CSE et malheureusement ils actent que ce gouvernement ne va pas jusqu’au bout de la démarche consistant à jeter aux oubliettes le « Choc des savoirs ».
Alors que la décision du conseil d’État actait la fin des groupes, le gouvernement décide d’imposer deux nouveaux textes, un décret et un arrêté, qui réinstaurent en 6ème et 5ème l’enseignement des maths et du français en groupes de besoins sur l’ensemble de l’horaire, avec possibilité de regroupement par classe pour 1 à 10 semaines.
Ces deux textes ont, comme les précédents, été rejetés à l’unanimité des organisations syndicales siégeant en CSE mais « la ministre veut poursuivre l’expérimentation du dispositif prévu pour se déployer sur deux années, 6ème et 5ème ».
Plus d’un an que nous clamons et expliquons combien cette mesure est mauvaise, la Degesco a reconnu à demi-mot que nous avions probablement raison de craindre le « tri » provoqué par ces mesures mais on va continuer encore une année, « le temps que le dispositif soit évalué » ! Les textes présentés n’ont pourtant pas de durée limitée. Si l’erreur est humaine, persévérer est diabolique.
Alors qu’en est-il pour la prochaine rentrée en collège ?
De fait, les textes, même unanimement rejetés, devraient être publiés rapidement. Alors en ces temps de DGH, quels paramètres prendre en compte ?
6ème et 5ème : groupes de besoins
Pour les 6ème et 5ème le texte reste le même mais durant les temps de dialogue social le ministère n’a jamais nié la réalité de l’actuelle mise en œuvre, extrêmement disparate sur tout le territoire, allant, quelquefois, d’une application très respectueuse du texte à aucune mise en œuvre en passant par une multitude d’adaptations et dérogations à ce qui était prescrit par le texte de 2024. Alors continuons !
Ce n’est pas le moindre des paradoxes que de constater le nombre de fois où la ministre et sa représentante ont dit vouloir faire preuve de souplesse ainsi que leur volonté de prendre en compte l’expertise des personnels sur le terrain. Il est à nouveau écrit, par exemple : « les groupes sont constitués en fonction des besoins des élèves identifiés par les professeurs ». Il y a là une belle marge d’autonomie, déjà bien exploitée par de nombreuses équipes : continuons à creuser cette piste !
4ème et 3ème : pas de changement…
… Si ce n’est qu’il est désormais inscrit que « les enseignements communs sont renforcés par un accompagnement pédagogique adapté aux besoins des élèves » notamment en vue de la préparation du DNB. Aucune modalité n’est prescrite et, nous n’avons pas manqué de le rappeler, il nous semble que les équipes ont déjà à l’esprit de mettre en œuvre un accompagnement pédagogique de leurs élèves. Ce qui limite les actions étant en général le manque de moyens à se répartir dans la DGH.
Session 2026 du DNB
Autre nouveauté à compter de septembre 2025 : de nouvelles modalités d’attribution du DNB.
Le contrôle continu ne comptera plus que pour 40 % et il ne sera plus constitué par les niveaux d’acquisition des différents domaines du socle mais par la moyenne des moyennes des enseignements obligatoires.
Côté épreuves terminales, outre le fait qu’elles compteront désormais pour 60 %, la grande nouveauté sera de diviser en deux sous-épreuves histoire-géographie d’un côté et EMC de l’autre afin de « renforcer » l’EMC ! Oui, vous avez bien lu, la République va beaucoup mieux se porter grâce à cela !… Rajoutons qu’alors que les autres épreuves (désormais toutes notées sur 20) seront dotées d’un coefficient 2, la sous épreuve histoire-géographie comptera pour 1,5 et celle d’EMC pour 0,5 : tremblez ennemis de la République, le ministère a trouvé comment vous terrasser !
Consternés, vigilants et combattifs… nous continuerons à porter nos propositions en faveur des réussites de tous et toutes les élèves
Autant dire que nous sommes consternés par ces choix, par cette occasion manquée par notre ministère. Mais nous allons rester combattifs. Le texte doit permettre d’évaluer 2 ans de mise en œuvre des groupes, nous seront là pour le rappeler et demander que les conséquences soient tirées de cette évaluation. Et, avant même d’en arriver aux conclusions de l’évaluation, nous porterons auprès de la ministre nos exigences en interrogeant sur ses modalités et en pointant la nécessité d’évaluer les effets sur le plan de la pédagogie, sur le plan organisationnel mais aussi d’évaluer les conséquences sur les conditions de travail.
Quant au coup porté au socle commun de compétences, de connaissances et de culture en le faisant disparaitre de l’évaluation du DNB, nous continuerons à le dénoncer et à œuvrer pour une école qui n’a pas pour seul objectif de « noter » pour classer et sélectionner comme le prévoit ce « choc des savoirs ». Le collège doit permettre d’aider chacun·e à progresser et ce n’est pas en transformant le DNB en Saint Graal plus difficile à obtenir que le collège atteindra cet objectif. Inlassablement nous le répèterons et continuerons à porter nos propositions en faveur des réussites de tous et toutes les élèves.