Déclaration liminaire prononcée par le Sgen-CFDT lors de la réunion du Conseil supérieur de l'Éducation du 20 septembre 2018.
En cette année scolaire qui débute le Sgen-CFDT s’interroge sur la feuille de route qui guide notre ministère.
Lors de sa première rentrée l’an dernier, monsieur le ministre avait mis en avant trois piliers pour fonder son action : les comparaisons internationales, la recherche scientifique et la tradition scolaire nationale. Mais le rétablissement de fait de la semaine de 4 jours a rapidement décrédibilisé le comparatisme international comme fondement de l’action ministérielle.
Les références à la recherche dans le discours ministériel se sont concentrées sur une petite partie de celle-ci en en laissant de côté des pans entiers, et sont paradoxalement passées au second plan avec la création du Conseil scientifique de l’Éducation nationale.
Les rappels à la tradition scolaire dans sa version la plus conservatrice ont enfin été multiples durant l’année écoulée, au risque d’épuiser le filon. La renaissance des rumeurs nauséabondes sur l’éducation à la vie affective et sexuelle et sur l’enseignement de l’arabe montre en tout cas qu’il est vain de vouloir piloter le système éducatif en cherchant à se concilier une certaine frange de l’opinion.
un agenda caché ? une contrainte budgétaire subie ?
Cette rentrée sans ligne claire est marquée par un retour des suppressions de postes et du recours annoncé aux heures supplémentaires. S’agit-il d’un agenda caché enfin révélé ? S’agit-il d’une contrainte budgétaire subie ? En tout état de cause la conduite de la politique publique d’éducation se doit d’être précisée.
Pour le Sgen-CFDT une politique publique d’éducation doit pouvoir être co-déterminée avec les personnels qui ont à la mettre en œuvre.
C’est la condition essentielle de sa cohérence et de son efficacité. Il est peu de dire que cette démarche n’a pas été celle adoptée par le ministère depuis son installation.
La communication sur les annonces a trop souvent primé sur l’effectivité de leur mise en œuvre, et l’interdiction du téléphone portable en est l’exemple le plus flagrant.
La verticalité a trop souvent primé sur le dialogue social et par là même sur la prise en compte du professionnalisme des enseignants. Les ajustements de programmes qui ont conclu l’année sont sur ce point révélateur. Le calendrier imposé, un passage en CSE le 12 juillet pour une mise en œuvre au 1er septembre, avec des repères annuels publiés à la rentrée, montre bien que ces ajustements ne sont pas en lien avec le métier enseignant. La méthode utilisée montre aussi que ces ajustements ne sont pas destinés aux enseignants. En effet, un texte institutionnel aussi important que les programmes de 2015 demande, on le sait, un temps d’appropriation, en appui sur les ressources déjà importantes proposées par le biais d’Éduscol, qui dépasse une seule année scolaire.
réforme du lycée
Tous les chantiers en cours ou qui ont été ouverts doivent impérativement passer par une co-détermination pour que l’expertise des agents soit entendue.
C’est le cas de la réforme du lycée contre laquelle le Sgen-CFDT a voté dans cette instance.
Les équipes devraient pouvoir engager le travail de préparation de sa mise en œuvre dans le cadre des conseils pédagogiques de lycée. Mais pour l’instant trop d’inconnues demeurent qui rendent ce travail impossible, que se soit sur le choix des combinaisons par les élèves, sur ses effets en terme de ressources humaines ou sur les programmes.
fusion des académies
C’est le cas de la fusion des académies décidée unilatéralement.
Depuis le début, le Sgen-CFDT rappelle l’importance du dialogue social dans la préparation et la mise en œuvre d’une telle réforme. Pourtant, comme dans le rapport Weil, les ministres se contentent de demander aux recteurs et rectrices de faire des propositions d’organisation pour janvier 2019. Si le dialogue avec les élu·e·s des collectivités locales est cité explicitement, cela ne nous satisfait pas. Élaborer des schémas d’organisation doit pour nous se faire dans le cadre d’un dialogue social et d’un dialogue territorial élargis. Les recteurs et rectrices doivent travailler dès maintenant et non a posteriori avec les représentant·e·s du personnels dans les CTA et CTSA, mais aussi avec les représentant·e·s des usagers dans le cadre des CAEN, CDEN et CIAEN le cas échéant. Il faut structurer le dialogue social autour de l’accompagnement des personnels qui seront concernés par des mobilités et autour de la construction de la nouvelle organisation.
voie professionnelle
C’est le cas de la réforme de la voie professionnelle.
La co-intervention voulue par le ministère ne se décrète pas. Si le ministère veut par cette mesure, que le Sgen-CFDT juge plutôt positivement, faire évoluer les pratiques enseignantes vers plus de travail d’équipe, il faudra que l’accompagnement par des actions de formation filées réponde aux attentes et aux besoins des enseignants dans les académies. Mais tous ces chantiers sont d’ores et déjà compromis par la contrainte budgétaire qui s’est traduite par l’annonce programmée de 1800 postes à la rentrée prochaine, avant sans doute d’autres à venir puisque le président avait promis 120000 suppressions de postes de fonctionnaires sur le quinquennat. Il n’y a pourtant pas de politique publique sans budget à la hauteur des enjeux.
parcoursup
L’exemple de Parcoursup est significatif à cet égard : c’est l’engagement des professeurs principaux, des psychologues de l’Éducation nationale, des personnels de direction, des personnels des CIO, des SAIO et des SCUIO, des contractuels recrutés spécifiquement qui a permis, avec une pression importante, 30000 inscriptions supplémentaires par rapport à l’an dernier. Sans reconnaissance de cet investissement, sans création de postes de PsyEN et sans maintien des CIO et de l’intégrité de l’ONISEP cet engagement n’est pas pérennisable à long terme.
conditions de travail
Une dégradation des conditions de travail s’annonce
A contrario, avec 1800 suppressions de postes à l’Éducation nationale, le couperet est tombé. Cette annonce augure d’une intensification du travail pour les personnels administratifs et pour les enseignants et enseignantes du second degré. Cette dégradation des conditions de travail s’annonce particulièrement sensible dans les services déconcentrés à la veille d’une réforme organisationnelle. Par ailleurs, le ministère de l’Éducation nationale est déjà celui qui compte le moins de gestionnaires par agent. Cela signifie que la gestion, par exemple, des remplacements va se faire plus que jamais dans une tension forte : moins d’agents pour ajuster et faire correspondre moyens et besoins, moins d’enseignant·e·s disponibles pour les remplacements de plus de 2 semaines…
personnels administratifs
Le travail des personnels administratifs est essentiel au bon fonctionnement du système éducatif.
S’il se confirme que 400 postes sont supprimés, cela revient à annuler en un an toutes les créations de postes du quinquennat précédent. Avec les 200 suppressions de l’an dernier, cela signifie qu’il y aura moins de personnels administratifs qu’en 2012. Entre temps, le nombre d’élèves et le nombre d’enseignant·e·s à gérer a augmenté.
La logique purement comptable ne fait pas une politique publique
Le Sgen-CFDT considère que les orientations en termes de postes ne sont pas tenables et vont mettre sous tension le système éducatif et dégrader fortement les conditions de travail des personnels. Le gouvernement doit en prendre la mesure. La logique purement comptable ne fait pas une politique publique.