Le Sgen-CFDT exprime dans cette déclaration au CSAMEN son inquiétude pour la rentrée prochaine : quelles sont les perspectives pour l'Education nationale ? Budget amputé, annonces imprécises, charge de travail densifiée, réformes tardives,... L'inquiétude monte...
Depuis le remaniement gouvernemental, et plus encore depuis les annonces de coupes budgétaires à hauteur de 10 milliards d’euros alors que l’exécution du budget 2024 débutait à peine, le pilotage d’ensemble de notre ministère et donc du service public d’éducation est défaillant. Cette situation fragilise le système éducatif et l’ensemble de ses agents, elle rend difficile le dialogue social.
Coupes budgétaires annoncées : quel impact ?
Nous manquons toujours d’informations claires, partagées et stabilisées sur l’impact des coupes budgétaires et sur la trajectoire budgétaire pour l’Éducation nationale. L’annonce, le 1er mai, que les HSE étaient restituées pour la fin de l’année scolaire est loin d’épuiser le sujet, et loin de rapporter la sérénité dont l’ensemble des personnels ont besoin pour envisager la fin de l’année scolaire, sans compter qu’il faut finir la préparation de la suivante. Dans un tel brouillard, c’est compliqué.
HSE, IMP qui ne donnent plus jamais lieu à décharge de service d’enseignement, et parts fonctionnelles attribuées dans le cadre du « pacte » sont autant d’éléments qui accroissent la charge et le temps de travail des personnels. Jusqu’à présent, nous n’avons jamais pu travailler à un bilan sérieux des conséquences de cette organisation du service public d’éducation en termes de conditions de travail.
Cela relève d’une forme d’aveuglement sur l’intensification du travail et ses effets sur les personnels.
Depuis les annonces en février de coupes budgétaires, le gouvernement n’assume pas sa responsabilité politique d’expliquer à la population quels services ne pourront plus être rendus. Les personnels de direction et leurs représentants découvrent au compte-goutte les décisions budgétaires et se retrouvent en première ligne pour les expliquer aux personnels d’abord, aux élèves et à leurs parents ensuite.
Il est pour nous inenvisageable que le gouvernement attende des personnels, quel que soit leur métier, de réaliser toutes les missions que ces enveloppes budgétaires maintenant disparues permettaient de rémunérer. Une trop grande partie du travail des personnels est déjà insuffisamment reconnue. Un trop grand nombre de nos collègues est déjà en situation d’épuisement professionnel.
Nombreux sont celles et ceux, quel que soit leur métier, leur niveau de responsabilité qui témoignent de cette situation dégradée, de leurs interrogations sur les conditions dans lesquelles exercer les missions à l’avenir. Perte de sens sur le plan des politiques éducatives avec le « choc des savoirs » dont nous refusons la philosophie d’ensemble et des mesures, perte de sens sur le plan de l’organisation du travail avec des décisions ces derniers mois qui conduisent nos collègues à considérer qu’ils et elles sont contraints de mal travailler alors qu’ils et elles aspirent à bien travailler.
Les coupes budgétaires ont aussi des conséquences sur les revalorisations envisagées pour différentes catégories de personnels.
Pour la CFDT, des concertations corps par corps telles qu’elles se déroulent, sans visibilité sur les enveloppes et leurs évolutions entre décembre et maintenant, ne permettent pas une concertation de qualité.
Par ailleurs, sur les rémunérations, nous rappelons notre demande d’engagements pluriannuels pour l’ensemble des catégories de personnels afin de donner de la visibilité. Ce n’est qu’ainsi que les personnels comme leurs représentants pourront porter une appréciation correcte des propositions ministérielles.
De nouvelles modalités de rémunération dans le viseur ?
A l’occasion de plusieurs groupes de travail récents, nous constatons que le ministère envisage, sans doute du fait du rapport de la Cour des comptes, de soumettre toute nouvelle évolution des rémunérations de plusieurs catégories de personnels à une augmentation de leur temps de travail. Pour la CFDT c’est inacceptable. D’une part, les modalités actuelles de calcul du temps de travail sont le résultat d’une négociation. Par ailleurs, les insinuations que les personnels ne feraient pas 1607 heures par an ne sont pas entendables.
Cela revient à nier des problématiques majeures : la sous-administration chronique de notre ministère, l’inadéquation des moyens humains face aux missions, les heures supplémentaires réalisées et non payées par refus de regarder la réalité du temps de travail des agents.
L’amélioration des conditions de travail et des rémunérations sont indispensables pour redonner de l’attractivité aux métiers. Tout autre politique en la matière aggraverait encore les difficultés chroniques de fonctionnement de l’ensemble du système éducatif.
La PSC, un retard annoncé
Les perspectives de report de la mise en œuvre de la PSC se confirment et s’y ajoute le refus du gouvernement de doubler dès 2025 la participation forfaitaire de l’employeur à la protection sociale complémentaire des agents. Cela revient à faire des économies sur le dos des agents alors que l’Etat devait programmer les dépenses afférentes.
Nous réitérons la demande de la CFDT fonctions publiques : l’Etat doit tenir les engagements pris vis-à-vis des agents, les engagements pris avec les signataires de l’accord fonctions publiques sur la protection sociale complémentaire.
Quel avenir pour le dialogue social ?
Le dialogue social est donc grandement fragilisé par ce contexte d’ensemble. Les reprogrammations successives d’un grand nombre de réunions en témoignent. Nous mesurons à quel point cette situation met en difficulté les services de la DGRH. Et nous exprimons notre solidarité avec nos collègues en administration centrale qui doivent par moment avoir elles et eux aussi l’impression de travailler dans l’urgence pour rien puisque la réunion est finalement reportée de nombreuses semaines plus tard, ou de devoir changer de direction de travail au gré des annonces de tel ou tel membre de l’exécutif gouvernemental.
La réforme de la formation initiale et la grande concertation sur l’autorité (dont nous contestons les fondements et les intentions telles qu’elles sont exprimées par le Premier ministre) en sont des exemples parfaits ou plutôt infernaux au regard de ce que devrait être un dialogue social de qualité, et au regard des conditions de travail imposées aux personnels pour concevoir puis mettre en oeuvre des politiques qui risquent fort d’être mal conçues et donc de ne construire de progrès pour personne, et encore moins pour le système d’éducation et de formation. Courir ainsi à l’échec est délétère pour toutes et tous.