Le 25 mars 2020, le Sgen-CFDT « a rencontré » le ministre de l’Éducation nationale, le DGRH et le directeur général de l'enseignement scolaire (DGESCO) lors d’une visioconférence. Interventions du Sgen-CFDT au cours de l'audience, informations et réponses du ministre, du DGRH et du DGESCO.
Nous appuyant sur les témoignages des personnels, sur les remontées de notre réseau de militant·es locaux et sur les réponses données à leurs interventions auprès des hiérarchies académiques, nous avons pu faire entendre et reconnaître la réalité vécue par les personnels ainsi que notre analyse de la situation.
En préambule, Jean-Michel Blanquer a tenu à se démarquer du récent dérapage de la porte-parole du Gouvernement : « Elle n’a pas voulu dire que les profs ne sont pas au travail. Je dis tout le contraire depuis de nombreux jours ; Prof est un métier, les parents s’en rendent compte actuellement. La période révèle une conscience professionnelle exceptionnelle.»
Interventions du Sgen-CFDT au cours de l’audience, informations et réponses du ministère.
Accueil des enfants de soignants
Informations communiquées par le ministre :
- 30 000 enfants sont actuellement accueillis par 20 000 volontaires.
- L’accueil est étendu au mercredi, samedi et dimanche.
- La taille de référence des groupes est de 10 enfants, moins dans les faits.
- Les personnels qui s’engagent bénéficieront d’une reconnaissance sur le plan financier.
Demandes du Sgen-CFDT
Le Sgen-CFDT soutient le principe d’organiser l’accueil des enfants de soignant·es et autres personnels exerçant des missions indispensables dans le contexte pandémique. Nous demandons cependant un lien renforcé avec les ARS pour mieux organiser cet accueil et pour définir des recommandations claires et précises afin de protéger au mieux les personnels qui y participent.
Le Sgen-CFDT est conscient de la pénurie actuelle d’équipements de protection et de la nécessité d’en doter en priorité les soignant·es. Mais nous demandons que les agent·es qui assurent ces accueils bénéficient dès que possible d’équipements adaptés (masques et lunettes).
Les personnels qui participent à l’accueil doivent bénéficier d’équipements adaptés.
Nous proposons aussi que des équipes d’appui médicales, sanitaires et psychologiques soient déployées. Des personnels de l’Éducation nationale peuvent d’ailleurs y contribuer.
Le ministre partage notre souci de garantir la protection des personnels mais s’en tient à la doctrine sanitaire en cours : la nécessité absolue de disposer de gel hydroalcoolique et de savon (fermeture du point d’accueil en leur absence). Les préfets doivent se substituer aux collectivités territoriales si nécessaire. Il ne reconnaît pas cependant la nécessité de masques, en tout cas, tant que les soignant·es n’en seront pas pourvus.
Il accueille a priori favorablement notre proposition de constitution de pools médico-sociaux de soutien aux accueillants.
Continuité éducative
Jean-Michel Blanquer considère que les ENT fonctionnent, dans l’ensemble… Il indique que les classes virtuelles du CNED comptent 2,16 millions d’inscrits (dont 307 000 enseignant·es) et que 125 000 classes virtuelles ont été créées.
Le ministère ne soutient pas l’usage d’outils de communication (notamment les mails) qui ne répondent pas aux normes fixées par le règlement général sur la protection des données personnelles (RGPD). Il ne critique cependant pas leur utilisation compte tenu du contexte.
Le Sgen-CFDT a rappelé au ministre le fort investissement des enseignant·es pour mettre en œuvre l’enseignement à distance « au pied levé », la surcharge de travail que cela représente et la nécessité d’une régulation.
Le ministre reconnaît la réalité du travail des enseignant·es.
Risque d’inégalités entre élèves
Maintien du lien avec les familles défavorisées et sans équipements numériques
Pour le Sgen-CFDT, la volonté de relever le défi du lien pédagogique avec les familles les plus précaires et celles n’ayant pas accès aux outils numériques amène à des solutions qui placent tout le monde dans des situations contradictoires (interruption du confinement) et potentiellement conflictuelles (familles verbalisées faute d’un motif de sortie de légalement reconnu).
Nous demandons que d’autres voies soient étudiées, que le ministère et les hiérarchies admettent que tout ne puisse être immédiatement mis en place et parfait. Il faut travailler sur la durée au regard de l’évolution des modalités de confinement sans oublier d’anticiper les conditions de la reprise.
Le ministre annonce que :
- Des solutions sont recherchées pour que plus de familles puissent bénéficier d’un prêt de matériel ;
- Un accord va être signé avec La Poste. Il permettra de déposer des documents sur une plate-forme en ligne. Ces documents seront ensuite acheminés par La Poste aux familles évitant ainsi aux enseignant·es comme aux parents de quitter leur domicile.
- Un soutien scolaire gratuit sera mis en place à l’issue de la crise, en mai-juin et surtout fin août.
Consolidation et différenciation au moment du retour en classe
Le ministre se dit ouvert à toute proposition. Une réflexion est en cours sur l’élargissement du dispositif « devoirs faits », l’utilisation des temps en péri scolaire et des cités éducatives.
Il est sensible à la proposition du Sgen-CFDT de développer les formations en situation de travail dans le cadre de l’obligation de formation jusqu’à 18 ans afin de contrer le risque de moindre insertion professionnelle des élèves diplômé·e·s de la voie pro en 2020. Nous proposons également de recourir au CAP en 3 ans pour lutter contre le décrochage et être attentif à l’enjeu des 16-18 ans.
Conditions de la reprise
Ne pas faire comme si rien ne s’était passé…
Le Sgen-CFDT rappelle sa conception de la continuité pédagogique. Elle doit permettre de faire du lien et de consolider les apprentissages antérieurs ou en cours avant la fermeture, pas de finir le programme pendant la phase de confinement et d’enseignement à distance. A la reprise des cours, il n’est pas question de poursuivre et finir le programme comme si rien ne s’était passé.
Tout ne pourra être fait dans le cadre strict de l’année 2019-2020, il faut préparer la reprise de l’année scolaire en cours mais aussi le déroulement de 2020-2021 pour prendre en compte le réel. Toutes les équipes pédagogiques devront avoir les moyens d’adapter la formation à ce que les élèves auront pu faire ou non en 2019-2020.
Créer du lien entre la période de confinement et la reprise
Pour le Sgen-CFDT, une reprise sèche en fin de confinement, est inenvisageable. Un dialogue en amont doit être organisé dès que possible au niveau national, mais aussi localement, et en présentiel, dans les écoles, les établissements, les services. Il doit permettre de définir les modalités de reprise.
Il faut faire confiance à l’intelligence collective, donner du temps de concertation aux personnels, dialoguer avec les syndicats au niveau national et académique, avec les associations de parents d’élèves, les représentants des élèves, mais aussi les associations complémentaires de l’école.
Le Sgen-CFDT insiste sur les enjeux de résilience.
Une reprise sèche en fin de confinement, est inenvisageable…
Le ministre et le DGESCO reconnaissent les enjeux du « rallumage du moteur ». Il faut penser à ce qui va se passer pour les personnels, les collectifs, en particulier à ceux qui auront perdu un·e collègue (accompagnement psychologique).
Sur le plan pédagogique, il faudra faire face à un contexte inédit et remettre de la cohérence dans des classes où certains auront plus décroché que d’autres.
Concours et examens
Concours de recrutement :
Le ministère compte pouvoir les organiser en juin – juillet avec à l’étude des modalités qui pourraient un peu évoluer par ordonnance. Par exemple uniquement admissibilité en 2020 et admission en 2021.
Baccalauréat :
Le ministère envisage plusieurs hypothèses : maintien en l’état si la reprise a lieu début mai ; contrôle continu avec des oraux de rattrapage ; en passant deux épreuves et le reste en contrôle continu.
Pour le ministre, le contrôle continu permettrait de travailler jusqu’à la fin de l’année scolaire, avec une clause d’assiduité.
Le Sgen-CFDT n’est pas favorable à l’hypothèse du maintien des examens en l’état pour 2020. Une adaptation au contexte est indispensable.
Continuité administrative
Pour le Sgen-CFDT, le plan de continuité d’activité des services administratifs, publié avant le renforcement du confinement est trop ambitieux.
Il ne hiérarchise et ne priorise pas assez les missions à assurer
Il ne tient pas compte du fait que le télétravail est insuffisamment déployé et qu’en conséquence beaucoup d’agents ne peuvent accéder à distance aux applications leur permettant de travailler.Nous alertons également sur le sur-contrôle, les demandes de reporting quotidien, et les témoignages d’agents qui se voient reprocher de ne pas travailler suffisamment. Ici aussi, nous demandons que les personnels puissent travailler en confiance.
Le ministre et le DGRH sont sensibles aux problématiques soulevées par le Sgen-CFDT. Ils affirment qu’ils sont opposés à tout sur-contrôle et reconnaissent qu’une réflexion sur l’organisation du télétravail devra être engagée après la crise.
Gestion des ressources humaines
Le Sgen-CFDT a rappelé les inquiétudes et les difficultés des personnels non-titulaires et des détachés directs à l’étranger.
Nous demandons aussi que soient identifiées les opérations collectives qui peuvent être décalées, tout en ayant un effet rétroactif, afin que les agents ne soient pas perdants et que la situation reste gérable pour les personnels des services déconcentrés.
Renouvellement des contrats
Le DRH rappelle qu’il a donné consigne aux DRH des académies de reconduire les contrats. Les non renouvellements de contrat n’ont pas lieu d’être et doivent lui être signalés. Cela concerne notamment les AED et les AESH.
Mouvements et promotions
Pour le DRH, les opérations de mouvement doivent être privilégiées.
Les mouvements intra du 2nd degré doivent se poursuivre. L’ouverture des serveurs des académies de Versailles et Créteil va être prolongée.
Pour les mouvements départementaux du 1er degré il y aurait moins d’urgence pour le ministère, les professeur.e.s ayant déjà une affectation départementale et donc sur un périmètre géographique plus limité que dans le second degré.
Rendez-vous de carrière
Une réflexion est en cours pour étaler le calendrier.