Le ministère a réuni les organisations syndicales pour présenter et échanger autour des critères de labellisation des manuels qu’il souhaite mettre en place en direction des éditeurs. Une réunion inutile pour le Sgen-CFDT qui a rappelé son opposition. Lettre intersyndicale à Mme la Ministre.
La mesure de la labellisation des manuels scolaires a été rejetée à l’unanimité lors du Conseil Supérieur de l’Éducation. Pourtant, le Ministère persiste. Il est vrai que le CSE n’est qu’une instance consultative… alors pourquoi tenir compte de l’avis de l’ensemble de la communauté éducative ? Encore une fois les organisation syndicales écrivent à la Ministre pour dénoncer cette vision du pilotage du système éducatif qui dénie toute ingénierie aux enseignant.e.s.
Des critères de labellisation qui dénient l’expertise des enseignant.e.s
Cette labellisation ne doit pas conduire à une restriction de la liberté pédagogique.
Non, les enseignant.e.s ne sont pas que des exécutant.e.s.
La diversité des élèves, l’hétérogénéité des niveaux dans la classe, les obligent à concevoir leurs séquences en s’adaptant à cette réalité. Avec cette mesure, le Ministère laisse croire que les équipes pédagogiques ne sont pas capables de discerner ce qui est à prendre ou à laisser en fonction des programmes en vigueur.
Les manuels ont toute leur place au sein de la classe. Ils doivent répondre aux objectifs d’inclusivité, d’égalité fille/garçon ou encore de transition écologique. Mais ces éléments sont insuffisamment pris en compte dans les critères de labellisation. Pourtant en demeurant une banque de données permettant de développer l’esprit critique des élèves, des jeunes, les manuels sont très utiles dans le bagage pédagogique des collègues.
Pour le Sgen-CFDT, la formation initiale et continue reste fondamentale pour se les approprier.
Labellisation : volonté politique contre réalité économique
Si le Ministère entend prendre en charge les manuels pour le CP et le CE1, il souhaite que les collectivités territoriales en fassent de même pour les autres niveaux. Il s’agira ainsi pour les personnels de choisir un manuel parmi une gamme de produits labellisés.
Rien n’est dit sur la fréquence de renouvèlement des manuels et donc sur le coût que cela engendrera pour l’État et pour les collectivités territoriales. Car on peut légitimement penser qu’un changement de programmes entrainera automatiquement une modification des critères de labellisation en direction des éditeurs et donc la nécessité d’acheter de nouveaux manuels.
Au rythme où les programmes bougent, il n’est pas sûr que les finances des collectivités territoriales puissent suivre. En cette période de restriction d’autres choix auraient sans doute été plus judicieux. Certains éditeurs, n’ont pas attendu la grille de critères pour apposer sur les spécimens déposés dans les établissements scolaires et les écoles « en attente de labellisation ».
Un outils de contrôle qui pourrait servir tous les excès
Le Sgen-CFDT a rappelé son opposition au principe même de labellisation.
Cette pratique est déjà à l’œuvre en Hongrie, un pays qui ne brille pas par son approche démocratique notamment en matière d’éducation.
La labellisation n’est une demande de personnes notamment pas des principaux intéressés, les enseignant.e.s.
Pour le Sgen-CFDT, les collègues doivent pouvoir utiliser les ressources qui leur semblent les plus appropriés pour conduire leur ingénierie pédagogique au service des élèves.
Pour le Ministère, il ne s’agit pas de faire le choix à leur place mais plutôt de les aider à faire ce choix. Pourtant, la frontière entre guider et orienter leurs choix est ténue.
Dans un contexte politique incertain, installer aujourd’hui une telle labellisation pourrait avoir des conséquences importantes demain, en fonction de qui en définira les critères..