Le conseil supérieur de l’éducation étudie les programmes de cycle 3 de français et mathématiques dont la mise en œuvre est prévue à la rentrée 2025. Voici la déclaration liminaire de la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques.
Ces programmes de cycle 3 vont être adoptés au pas de course : 11 semaines entre la publication des projets par le CSP et le passage devant le CSE, sans aucune concertation en amont ou pendant l’écriture, des temps d’échanges uniquement en multilatérale et sans aucune possibilité de changer la structuration et la philosophie de ces textes.
La CFDT demande un dialogue social, qui prenne en compte le travail réel des personnels, ce n’est pas le cas ici.
Cette instance a adopté en janvier un vœu demandant le report de l’entrée en vigueur à la rentrée 2026. Cette demande a depuis été réitérée par un courrier intersyndical adressé à la ministre. Nous le redisons ici :
un report est impératif pour respecter le travail des personnels.
Ces programmes sont denses, très denses. Cette charge va venir réduire les possibilités d’utiliser des modalités différentes d’apprentissage. Ces modalités qui demandent plus de temps mais permettent d’ancrer les apprentissages dans le réel, dans la vie des élèves, de leur donner un sens, notamment celles nécessitant sorties hors les murs et interventions dans les classes.
La densité des programmes oblige à maintenir une rythme d’apprentissage élevé, incompatible avec les besoins de certains de nos élèves qui ont besoin de plus de temps pour apprendre, ou d’un temps différent. La disparition des cycles et la disparition d’objectifs sur plusieurs années vont mettre ces élèves encore plus en difficulté. Pas de moyens pour compter sur les RASED…
On est bien loin des conditions nécessaire pour faire une école pour toutes et tous.
Ces programmes prescrivent une méthode d’enseignement, l’enseignement explicite. Les études montrent qu’elle est très efficace effectivement mais uniquement pour l’apprentissage de procédures. Quels sont donc les objectifs de ces programmes ? Améliorer les résultats des élèves français aux évaluations internationales ? Oui, nous devons améliorer la réussite de nos élèves, s’assurer qu’ils maîtrisent des compétences de calcul ou d’écriture. Nous devons tout autant s’assurer de la maîtrise de compétences qui leur permettent d’analyser les résultats obtenus, de prendre du recul sur les informations d’un texte, ces compétences indispensables pour former de futurs citoyens émancipés, dotés d’un solide sens critique qui leur permette de faire face au flot d’informations sans filtre de notre société et aux remises en cause des connaissances scientifiques et de la science en elle-même.
Ces programmes interrogent les finalités du système éducatif. Quelles sont-elles ? Une convention citoyenne sur l’école, que la CFDT, avec d’autres organisations de cette instance appelle de ses vœux, permettrait d’apporter une réponse partagée.
Ces programmes, outils de travail au quotidien des enseignants, sont très prescriptifs. Ils laissent peu de place à leur autonomie. Il font des enseignants des exécutants d’une démarche unique. Ce n’est pas ce à quoi nous sommes formés.
Il s’agit plus de savoir gaver les oies que d’apprendre à apprendre et à penser. Cet écart entre le prescrit par le référentiel métier et le réel demandé par les programmes aggrave la perte de sens du métier alimentant le mal-aise enseignant.
Enfin cerise sur le gâteau, la formation (information) sur ces nouveaux programmes de cycle 3, que nous avions demandée pour les équipes, a été annoncée alors que l’année avait déjà débuté, sans moyen pour la déployer et alors que les plans de formation sont pluriannuels dans les départements. Demander de trouver 6 h avant la fin de l’année scolaire a mis toutes les équipes en tension des circonscriptions aux écoles. L’exemple parfait d’une décision en mode « l’intendance suivra » qu’à la CFDT nous ne voulons plus voir, tant elle fait de mal aux personnels : une décision imposée du ministère, sans cohérence avec les choix adoptés localement, sans s’occuper de la faisabilité, ni de l’impact sur les conditions de travail des enseignants, ou des équipes de circonscription, et sans respect pour leur travail. Certaines académies ont même surenchéri en délégant ce temps de formation aux enseignants eux-mêmes dans les écoles mais en réussissant l’exploit supplémentaire, de ne leur laisser aucune autonomie sur la date ou la méthodologie.
La CFDT et la communauté éducative n’étaient pas demandeuses de nouveaux programmes de cycle3
Ceux-ci ne vont en rien venir résoudre les inégalités sociales ou permettre une école pleinement inclusive. Par contre, ils vont dégrader les conditions de travail des enseignants. Il est urgent de changer de méthode pour élaborer les programmes.