Au comité technique du ministère de l'Enseignement supérieur et de la recherche (CTMESR), le Sgen-CFDT a fait part de ses inquiétudes à la ministre de l'Enseignement supérieur et de la recherche.
Le Sgen-CFDT est sensible à la présence de Madame la ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche au CTMESR. Nous y voyons le signe d’une attention renouvelée au dialogue social et d’une volonté d’entendre la parole portée par les organisations représentatives du personnel. Nous tenons à l’en remercier.
Des manques de moyens qui pèsent sur les agents
C’est l’occasion de faire part de nos préoccupations en cette rentrée universitaire. La première source d’inquiétude est, évidemment, la question des moyens. Cette question était très présente dans ses premières interventions, où elle faisait sienne notre revendication d’une loi de programmation pour l’enseignement supérieur. Ce vocabulaire a malheureusement rapidement disparu des prises de paroles, alors que les effets du manque de moyen se font ressentir de manière croissante.
Dans les universités en particulier, la tendance à long terme à un accroissement de la charge de travail (augmentation du nombre d’étudiants et ajouts de nouvelles missions) sans que les moyens humains évoluent en proportion entraîne une crise qui, pour être durable et progressive, n’en est pas moins grave.
Les enseignants et enseignants-chercheurs croulent sous heures complémentaires qui les empêchent de se consacrer à la totalité de leurs missions, et le système ne tient que par un engagement des collègues au-delà de ce qui est raisonnable en termes de santé, combiné au recours démesurés à des vacataires dont les conditions d’emploi sont scandaleuses. On est proche de l’effondrement, et, en particulier dans les établissements soumis à d’interminables plans de retour à l’équilibre, on s’y dirige à grands pas.
Nos représentants au CHSCT ministériel nous font remonter des constats inquiétants :
Nous attirons votre attention sur la situation générale des établissements de l’Enseignement Supérieur où nous constatons une dégradation notable de la qualité du dialogue social accompagné d’une dégradation de la santé des personnels. Les nombreuses alertes auprès des représentants du CHSCT-MESR en sont une illustration. Depuis deux ans maintenant, les risques psychosociaux sont la deuxième source des accidents de service et de travail. De plus en plus, des pratiques managériales peu en rapport avec l’esprit d’une administration rénovée et loin les préconisations dictées par la fonction publique (voir le Guide de l’encadrante et de l’encadrant dans la Fonction Publique édité par la DGAFP) apparaissent dans nos établissements. Elles sont mises en place par des cadres mal formés et peu sensibilités aux domaines de la prévention professionnelle, du handicap et de l’égalité professionnelle.
Améliorer le pouvoir d’achat des agents
Le RIPEC pour tous les agents de l’ESR
Alors, certes, nous ne devons pas abandonner l’objectif d’améliorer le pouvoir d’achat des agents. Il faut y travailler par plusieurs moyens simultanément : l’indemnitaire, qu’il faut continuer de ramener au niveau de la moyenne servie dans l’ensemble de la fonction publique. Rappelons à ce sujet notre demande d’adhésion au RIPEC des personnels enseignants et d’éducation des premier et second degrés affectés dans le supérieur (ESAS) : la simple justice salariale l’exige. Nous demandons de plus qu’on nous confirme que la trajectoire financière du RIPEC et l’objectif de convergence entre filières du RIFSEEP seront bien respectées en 2023…
Compenser l’inflation
Les mesures générales de compensation de l’inflation sont tout aussi nécessaires. Nous regrettons que, malgré les garanties obtenues au comité technique précédent ainsi qu’auprès du ministère de la fonction publique, de nombreux établissements n’appliquent pas la revalorisation dont la rémunération est exprimée en euros et non en points, et nous regrettons que le taux de rémunération de l’heure complémentaire n’ait pas non plus été réévalué alors que la réglementation le prévoit.
Réduire les inégalités salariales Femmes/Hommes
Rappelons de plus la nécessité d’une vigilance particulière sur l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. On sait qu’un rattrapage est nécessaire, nous regrettons que les dispositifs indemnitaires ne fassent pas systématiquement l’objet d’études d’impact concernant ces inégalités.
Nous réclamons un véritable plan d’emploi dans l’ESR
Mais cela n’entame pas l’urgence première : il faut, comme nous le réclamons depuis des années, un véritable plan d’emploi dans l’enseignement supérieur et la recherche.
Un véritable plan d’emploi, comme stipulé dans la loi de programmation
En ignorant totalement ce volet, la loi de programmation recherche a été une occasion manquée, nous l’avions dit dès le début du processus législatif. Que les seules créations de postes réellement actées dans ce cadre aient été des chaires de professeur junior qui ne contribueront que marginalement à l’effort d’enseignement, d’accompagnement des étudiants et d’investissement collectif a été vécu par les collègues comme une provocation. Nous rappellerons dans les concertations en cours sur la simplification des mesures réglementaires issues de cette loi l’urgence qu’il y a à revenir sur un dispositif dont tout indique qu’il a de toute façon manqué sa cible.
Une simplification annoncée à négocier
Concernant ces négociations, dans lesquelles nous nous sommes d’ores et déjà pleinement engagés, nous défendrons les revendications qui ont été les nôtres lors de la négociation du protocole : la simplification annoncée ne nous fera pas renoncer à ce que nous avons négocié dans l’intérêt des agents. On voit par exemple la tentation pour les établissements de contourner l’esprit dans lequel le protocole avait prévu les primes individuelles (RIPEC C3) : nous n’accepterions pas que ces tentations soient officialisées dans les textes !
Des promesses non tenues
Dans le même esprit, nous ne pouvons que souligner que les promesses du protocole « parcours professionnel, carrières et rémunération » de 2015 (PPCR) n’ont pas toutes été tenues. Soulignons à ce sujet l’urgence d’une mise en œuvre effective du déroulement de carrière sur au moins deux grades pour l’ensemble des personnels, tel que prévu par PPCR et explicitement confirmé par la loi de programmation recherche. On en est encore loin, en particulier dans les organismes de recherche !
Accompagnement étudiant, mission de service public
Nous avons mentionné l’accompagnement des étudiants dans leur parcours de formation. Cet accompagnement fait aussi partie des missions du service public en dehors de leur temps de présence à l’université, et nous sommes ravis que vous ayez insisté depuis votre nomination sur le rôle en la matière du réseau des œuvres universitaires.
La fonctionnarisation des personnels ouvriers, qui est loin d’être achevée, est un marqueur fort de l’appartenance des CROUS au service public. Cependant, l’augmentation des missions et la prise en compte des impératifs sociaux doit être prise en compte dans le modèle économique des CROUS : le faire reposer avant tout sur le principe de l’autofinancement ne peut qu’amener à des déséquilibres structurels qui se répercuteront et sur les personnels, et sur les usagers.
Voilà, Madame la ministre, quelques-unes de nos préoccupations en cette rentrée universitaire. Nous serons présentes et présents dans les établissements, dans les instances et dans la discussion avec vos services pour mener le dialogue que vous appelez de vos vœux afin d’améliorer la situation des agents et d’améliorer le service public de l’enseignement supérieur.
La délégation était composée de Christophe Bonnet, Laetitia Grimaldi et Élisabeth Sioudan-Devailly.