Le 30 janvier dernier, les textes fixant les modalités du DNB à compter de la session 2026 ont été présentés au Conseil Supérieur de l’Éducation. La CFDT Éducation Formation Recherche Publiques a voté contre, nous vous expliquons ici pourquoi nous nous opposons à ces changements.
Resituons ce DNB 2026. Le Diplôme national du Brevet (DNB), selon le code de l’éducation, « sanctionne la formation acquise à l’issue de la scolarité suivie dans les collèges ou dans les classes de niveau équivalent […]. Ce diplôme atteste la maîtrise du socle commun de connaissances, de compétences et de culture dans des conditions fixées par décret ».
Le DNB à partir de la session 2026
Fin 2023, Gabriel Attal alors ministre de l’Éducation nationale, annonçait son lot de mesures dites du « Choc des savoirs » avec l’objectif de « rehausser le niveau ». Pour cela, il renforce (encore !) la place accordée aux fondamentaux et impose même de trier les élèves en dispensant les enseignements de maths et de français, en 6ème et 5ème, en groupes de niveaux, mais aussi en rendant le DNB obligatoire pour accéder à la classe de seconde.
Le ministre est passé, plusieurs lui ont depuis succédé et les derniers textes votés début 2025 ont enterré l’idée du DNB sésame pour accéder au lycée, mais pas l’idée de modifier ses modalités… toujours dans le but de « rehausser le niveau d’exigence et d’ambition pour tous les élèves ». La formule peut sembler belle, dommage qu’elle soit vide de sens au regard des mesures dont elle justifie la mise en œuvre.
La prochaine formule du DNB 2026 sera donc la suivante :
- le contrôle continu sera constitué de la moyenne des moyennes des enseignements obligatoires pour l’année de 3ème (et prise en compte des points supérieurs à la moyenne d’une option). Cette note de contrôle continu comptera pour 40 %,
- les épreuves finales restent les mêmes, toutes notées sur 20. Leur moyenne comptera pour 60 %,
- une mention « TB avec félicitations du jury » est créée pour les élèves obtenant 18 de moyenne ou plus.
Qu’en pense la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques ?
Aucune de ces évolutions ne nous convient : il s’agit là de la mise en œuvre d’une vision rétrograde de l’examen mais aussi d’une vision du collège qui ne correspond pas à celle que nous portons.
Quel sens au retour des moyennes, à la fin de la prise en compte des compétences et à l’augmentation de la part de l’épreuve finale ?
La fin de la prise en compte des niveaux de compétence pour le controle continu est sans doute le changement qui aura le plus de conséquences sur les dynamiques d’enseignement et, en conséquence sur les apprentissages. Et ces conséquences prévisibles, nous les déplorons.
Dans notre système actuel, le risque est grand qu’en n’étant plus un élément pris en compte pour l’obtention du diplôme, les compétences seront moins visibles, voire moins présentes donc moins travaillées. Nous y voyons une suppression des compétences qui ne dit pas son nom, anéantissant par là même ce qui se fait en formation initiale et l’engagement des personnels dans cette démarche depuis 10 ans. Or, la diversité des compétences présentes dans les cinq grands domaines est une possibilité de pouvoir valoriser des élèves qui ne sont pas « en réussite » mais qui ont des réussites dans certains domaines. Et c’est vers un collège permettant les réussites du plus grand nombre que nous souhaitons aller.
Là, c’est l’inverse qui se produira. Avec un contrôle continu basé sur la moyenne des moyennes de l’année, le but du plus grand nombre d’élèves sera « la moyenne générale ». C’est un renforcement de la motivation extrinsèque, celle qui permet le moins de donner du sens aux apprentissages. De plus, c’est une évaluation au regard d’une norme commune préalablement établie qui aboutira à une logique de classement et de tri. Reconnaissons au moins la logique de l’ensemble du projet qui là encore vise à « trier »… et déplorons-la à nouveau !
Quant au passage à 60 % de la part de l’épreuve finale au lieu de 50% jusqu’à présent, nous y voyons aussi au minimum trois conséquences délétères :
- le renforcement du risque de « bachotage » et la perte du sens des apprentissages qui va avec,
- les effets sur la santé des élèves sont aussi à prévoir. Les études montrent une dégradation de la santé mentale des jeunes et le constat est fait que ni la médecine scolaire, ni la médecine de ville ne sont en capacité de prendre ce problème en charge correctement. Le ministère part du principe que cette plus grande importance donnée aux épreuves finales va permettre d’engager plus les élèves dans leurs études, en particulier les élèves les plus en difficulté ! Une telle méconnaissance des élèves est stupéfiante. Et surtout, comment est-il possible d’ignorer le stress que cela va générer sur ces élèves, mais peut-être encore plus sur certains aux résultats moyens à très bons ?!…
- … qui dit élèves plus stressés, dit climat scolaire dégradé, mais là encore, cela semble totalement impensé.
Tous ces changements auront aussi pour conséquence d’augmenter le taux d’échec : quel but, quelle utilité à cela ? (Résultats du DNB 2024 sur le site du ministère)
Quel DNB souhaitons-nous à la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques ?
Peut-être pourrions-nous déjà interroger la pertinence de l’examen lui-même, à ce moment-là de la scolarité ! Ce qui est certain, c’est que nous ne sommes pas favorables à un DNB calqué sur le bac qui reflète bien l’esprit du collège vu comme un « petit lycée ».
Lors de notre dernier congrès fédéral (Lorient 2024), une motion collège a été adoptée, dans laquelle l’un des deux grands objectifs que l’on souhaite pour le collège est « permettre à tous les élèves de valider un socle commun de connaissances et de compétences dont les modalités seraient définies par une convention citoyenne qui prendrait en compte la diversité des réussites et qui permettrait à chacun de devenir un citoyen libre et émancipé, acteur de sa vie dans la société ».
Au regard de notre projet, il va donc sans dire que notre inquiétude est forte de voir l’abandon du travail sur les compétences du socle alors que ce devrait être au cœur de l’organisation des enseignements au collège. Quant à des épreuves terminales « sanction » du travail de l’année de 3ème dans certaines disciplines, nous n’y sommes pas attachés.
En revanche, l’épreuve orale portant sur l’un des parcours (parcours avenir ou parcours citoyen ou parcours d’éducation artistique et culturelle ou parcours éducatif de santé), pourrait être bien plus investie et trouver une plus grande place dans les enseignements tout au long de l’année. Mais, elle n’a quasiment jamais été évoquée ces derniers mois. Et, lui accorder plus d’importance nécessiterait plus de travail transversal, interdisciplinaire et donc des moyens, en temps notamment, pour lui donner plus de sens et de réalité !
Pour mémoire : rappel historique
L’ancêtre du D.N.B. était le Brevet d’études du premier cycle du second degré (BEPC), créé en 1947 et succédant lui-même au Brevet élémentaire. En 1959 s’était ajouté le Brevet d’enseignement général qui sanctionnait la formation dans les nouveaux collèges d’enseignement général, qui offraient un cycle court, en parallèle des lycées modernes, classiques ou techniques, qui proposaient un enseignement général long… Jusqu’à ce que la loi Haby réunisse les différentes filières dans le collège unique à partir de 1975.
C’est à partir de l’année scolaire 1980-1981 que l’on parle de Diplôme national du brevet des collèges et la première session avec épreuves d’examen est organisée en 1986.
Entre cette date et 2020 il y a eu une dizaine de « formules » pour ce DNB, avec des modifications diverses jouant sur :
- les disciplines prises en compte pour le contrôle continu,
- des variations de la part accordée aux différentes épreuves,
- la création des mentions,
- la diminution du nombre de séries,
- le remplacement des moyennes par les niveaux de maîtrise des compétences pour le contrôle continu…
Et ceci, jusqu’à l’année 2020 où, COVID oblige, les épreuves ont toutes été annulées et seul le contrôle continu a été pris en compte.