L’avis du CESE, « Une école de la réussite pour tous », a été présenté le 12 mai par sa rapporteure, Marie-Aleth Grard, et soumis au vote de l'Assemblée plénière.
Dans sa déclaration pour expliquer le vote de la CFDT, Albert Ritzenthaler remarquait : « Cet avis ne dit rien sur le nombre d’heures de latin ni d’allemand, rien sur les disciplines, rien sur l’orthographe non plus, il ne traite que de la réussite de tous (…). L’écho médiatique qu’il suscitera témoignera, sans doute, de l’intérêt réel que notre société porte à cette question. »
Elaboré selon une méthode originale unanimement saluée, l’avis du Cése place chacun d’entre nous devant ses responsabilités face au type d’école et de société qu’il veut.
Le contexte
Impliqué dans la Refondation de l’école de la République, le CESE s’est enquis des initiatives partenariales, des pédagogies innovantes qui, sur le terrain, relèvent le défi d’une école inclusive où tous peuvent réussir.
En juillet 2014, Benoît Hamon confiait à Jean-Paul Delahaye (inspecteur général de l’Éducation nationale) une mission « Grande pauvreté et réussite scolaire » pour démocratiser la réussite des élèves au sein d’une école française, certes massifiée, mais de plus en plus inégalitaire.
Les deux missions ont travaillé en étroite collaboration. Ainsi, 200 auditions, des visites d’écoles et d’établissements dans huit académies ont été menées, presqu’en totalité, conjointement par la section du Cése et l’inspection générale.
La méthode
« Une école de la réussite pour tous. » Un intitulé prétentieux ? Ou don quichottesque ? Un rapport de plus, lénifiant dans le contexte actuel de vive polémique autour de la réforme du collège ?
Plutôt une mission ambitieuse portée par Marie-Aleth Grard (vice-présidente d’ATD Quart Monde), qui a appliqué la « démarche de croisement des savoirs » expérimentée à ATD-Quart Monde, en formant un groupe composé de 5 chercheurs, 5 enseignants, 5 acteurs de quartier, 5 parents solidaires et 10 parents vivant dans la grande pauvreté.
Ce groupe a travaillé sur les compte-rendus des auditions et dégagé six grands thèmes qui ont été étudiés entre pairs (entre chercheurs, entre enseignants…). Puis trois réunions de la section ont permis ce fameux croisement des savoirs dont Marie-Aleth Grard souligne qu’il a été éprouvant, car la confrontation des expériences a obligé chaque groupe à dépasser les points de vue propres au rôle de chacun (enseignants, parents…), avant de parvenir à l’élaboration commune de préconisations.
La parole aux parents… dans l’hémicycle du palais d’Iéna
La montée à la tribune de parents anonymes n’est pas la moindre des originalités de Marie-Aleth Grard : passé l’étonnement de ce moment de théâtralisation, la parole entendue est parfois rude. Or, pour les personnels scolaires, c’est aussi cela la rencontre avec les parents : essuyer la colère, l’incompréhension, la méfiance… Comment les surmonter ?
Une sélection, parmi les 59 préconisations de l’avis
• L’étude du parcours scolaire des enfants de familles pauvres révèle l’importance des orientations précoces dans l’enseignement spécialisé ou les structures du handicap. Le CESE propose de supprimer le volet social des affectations ; de rendre celles-ci réversibles ; de mieux intégrer les sections d’enseignement général et professionnel adapté (Segpa) dans les collèges.
• Les soutiens aux élèves les plus en difficulté doivent être renforcés : réseaux d’aide spécialisée aux enfants en difficulté (Rased) et dispositif « plus de maîtres que de classes »…
• Pour permettre à tout parent de jouer pleinement son rôle de coéducateur, le Cése recommande la possibilité pour les enseignants, nouvellement affectés, d’avoir un temps de formation avec des élus, des acteurs de quartier, des parents… pour découvrir l’environnement social, culturel des familles. À côté des rendez-vous scolaires formels, il faut imaginer des temps informels de rencontre, à l’École, avec les parents, pour une meilleure connaissance mutuelle favorable aux apprentissages de l’enfant.
• La formation initiale et continue des enseignants est essentielle. Les écoles supérieures du professorat et de l’éducation (Espé) doivent fournir de « vrais bagages pédagogiques et humains » (l’écoute, le dialogue, ça s’apprend).
• La formation aux pédagogies : « Toutes ne se valent pas. ».
• « Une gouvernance bienveillante, soutenante et formatrice » : exercée par les directeurs d’école, les chefs d’établissement, les inspecteurs, elle est la clé de la réussite des élèves comme des personnels. C’est la garantie d’un cadre où il est permis d’inventer. Or, un tel encadrement nécessite une formation adaptée.
Un avis du CESE sur « Les inégalités à l’école », remis en 2011 par Xavier Nau, avançait des propositions pour aider les publics scolaires les plus fragiles . Saisi par le Premier ministre, le CESE s’est prononcé sur l’avant-projet de loi d’orientation et de programmation de l’école de la République.