Le Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco) et le Centre International d’Études Pédagogiques (CIEP) ont organisé deux journées de réflexion et de débats, les 28 et 29 janvier 2016, sur le thème de l’éducation inclusive pour laquelle l’école a un rôle essentiel à jouer.
Cette conférence de comparaisons internationales sur les politiques favorisant l’inclusion des élèves en situation de handicap a été menée en partenariat avec le secteur de l’éducation de l’UNESCO et l’Agence européenne pour l’éducation inclusive et adaptée.
Un processus engagé par les pays des l’OCDE dans les années 1990
Depuis les années 1990, les pays de l’OCDE sont engagés dans un processus d’inclusion scolaire visant à adapter l’école à la diversité de ses élèves, dont les enfants en situation de handicap. Cette logique succède à la logique d’intégration qui partait des déficiences de l’élève, visant à les combler pour l’adapter à l’école : c’est désormais l’école qui doit s’adapter aux enfants.
Les préconisations induites par la loi du 11 février 2005 – mobilisation de tous les acteurs, inclusion, orientation, sécurisation des parcours, accès à l’emploi, rappelées par la loi de refondation de l’école du 9 juillet 2013 – visent l’inclusion de tous, non seulement à l’École mais aussi dans la société.
École inclusive et accessibilité du système éducatif
L’éducation inclusive ne peut être dissociée de l’accessibilité du système éducatif, de la manière de penser l’Ecole. Il s’agit avant tout de favoriser le bien-être de chacun, de favoriser les apprentissages de tous.
Mettre en place un parcours pour chacun des élèves, tout au long de la scolarité, nécessite un glissement de perspectives : c’est placer la réussite de tous au cœur des missions de l’école et non de lutter contre l’échec scolaire, précise S. Ebersold (INSHEA).
Accueillir et inclure tous les élèves, quelles que soient leurs difficultés, est une obligation. Il convient de définir l’éducation inclusive comme l’accès à l’école des enfants au nom des droits. L’éducation inclusive est un moyen au service de la citoyenneté, précisent conjointement l’Unesco, l’ OCDE, la commission européenne , le conseil de l’Europe.
Celle-ci est très variable d’un endroit à l’autre et d’un pays à l’autre, selon les cultures d’acceptation, de vision de l’autre, les institutions. En Europe, la désinstitutionalisation a été adoptée mais n’est pas imposée : c’est une recommandation.
Passer d’établissements résidentiels à des services dans la communauté génère l’inquiétude des associations gestionnaires des établissements et de nombreux enseignants.
EN ITALIE :
Sous la pression de la société et des associations, une loi pédagogique de refonte au nom de l’intégration, adoptée en 1977, visait la fermeture des établissements et des classes spécialisées… La loi décrète la présence des enfants porteurs de handicap dans les classes ordinaires avec projet éducatif individuel et alliance entre diagnostic médical et pédagogique. Elle a également permis l’attribution de personnels supplémentaires avec l’appui d’associations qui représentent aujourd’hui 15% des enseignants. Ces personnels sont formés en université. Ils sont professeurs de soutien avec le même statut et une formation supplémentaire. Le professeur de soutien est en appui à la classe où il y a un enfant handicapé
EN FINLANDE :
La loi sur l’Ecole pour tous date de 100 ans. La volonté ministérielle prend en compte l’inclusion dans la formation initiale comme moyen de la réussite de tous. Le soutien existe pour tous. Il est intensifié pour les élèves rencontrant des difficultés et défini par le plan d’apprentissage et un soutien spécial individualisé est mis en place pour les élèves les plus en difficulté. Le co-enseignement se développe et les écoles spécialisées ferment. Les écoles sont très autonomes et peuvent s’organiser en ayant ou pas recours aux professionnels spécialisés.
EN SUÈDE :
Il s’agit davantage d’équité que d’inclusion dans le langage courant. Les différentes réformes de décentralisation permettent des initiatives locales pour une éducation inclusive. Les besoins de soutien, d’interventions précoces sont importants. La tendance à externaliser s’accentue, la remise en question de « l’inclusivité » du système est posée, en lien avec le développement de la compétitivité !
AUX ETATS UNIS :
Les lois sont très variables d’un état à l’autre. La plupart du temps, on ne parle pas d’inclusion mais d’environnement le moins restrictif possible. L’enseignement différencié, le co-enseignement et la participation active de tous les enfants sont des pratiques courantes.
EN AUTRICHE :
La volonté d’éducation inclusive est très variable selon les régions. Les parents décident de l’orientation de leurs enfants, conseillés par les centres spécialisés. L’enseignement élitiste est très fréquent au-delà de l’âge de 10 ans. La loi définit un maximum de 5 élèves à besoins particuliers par classe. Au-delà, elle attribue un adulte en plus. La nécessité de formation des maîtres, de concertation des différents acteurs est criante.
EN ANGLETERRE :
La politique inclusive est guidée par le marché. Les enfants sont constamment testés. Il est nécessaire de travailler avec l’école dans son environnement pour viser plus d’équité et de justice. L’idée de l’éducation inclusive est un tournant dans l’éducation pour tous, à tout niveau. En Ecosse, la pédagogie inclusive existe déjà dans la formation initiale.
Travail en équipe et partenariats
Tous les participants s’accordent à reconnaître la place du travail d’équipe et du partenariat avec les parents et les collectivités. La place de « leadership », jouée par le responsable de l’établissement, est primordiale. La santé publique et l’éducation doivent être la préoccupation de tous dans toute société.
Réduire la marginalisation, l’exclusion et l’échec scolaire nécessite un partage des compétences, des connaissances, entre et en dehors de l’école.
Pas d’inclusion scolaire sans inclusion communautaire
Tous les participants s’accordent à penser qu’il est nécessaire d’avoir un cadre pour l’école inclusive permettant de fournir aux écoles les aides nécessaires. Il s’agit aussi de travailler l’individualisation de chaque enfant pour penser différemment. L’inclusion est une attitude à adopter. Il ne peut y avoir d’inclusion scolaire sans inclusion communautaire.
Les différents ateliers sur les thèmes du parcours de scolarisation, des inégalités territoriales, des projets éducatifs, de la formation, du rôle du numérique, de l’établissement, du bien-être scolaire ont permis de réfléchir, plus spécifiquement, aux préconisations issues de ces deux journées de conférence.
Il s’agit de faire en sorte que l’inclusion scolaire devienne l’affaire de tous, condition indispensable pour sa mise en œuvre et sa réussite. Cet objectif ne sera atteint que si l’ensemble des acteurs de la société (politiques, législateurs et praticiens…) ont cette volonté.
Les conditions de la réussite
Comme le revendique le Sgen-CFDT, l’éducation inclusive doit permettre de :
- favoriser la réussite de tous ;
- offrir un accueil bienveillant à tous les élèves ;
- développer la coopération entre l’école et les partenaires, notamment le secteur médico-éducatif ;
- faire de la diversité un atout pour l’Ecole ;
- penser l’accessibilité comme un processus physique mais aussi technique, humain et pédagogique : les besoins sont ceux des élèves mais aussi des acteurs de l’Ecole ;
- penser la formation initiale et continue de tous les acteurs en ce sens ;
- mettre en cohérence les aides autour de l’élève, du maitre et de la classe.
Pour aller plus loin
> École inclusive : après les choix il faut passer aux actes !
> Loi de refondation : vers une école inclusive
> École inclusive : préconisations du CNESCO