Ce mardi 11 février 2020, a lieu la conférence nationale sur le handicap. 15 ans après la loi l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, les avancées ont été importantes, mais il reste encore beaucoup à faire.
Dans le champ éducatif, l’inclusion scolaire est un objectif que le Sgen-CFDT partage tout en rappelant que réussir l’inclusion suppose des changements de paradigmes. Tous n’ont pas encore été conduits.
Pour l’inclusion scolaire, passer des paroles aux actes
Ce matin sur France Inter, Madame Cluzel dessinait des pistes pour l’école inclusive :
- AESH formé.e.s et sur des contrats Éducation nationale ;
- Enseignants formé.e.s ;
- Équipes pluriprofessionnelles travaillant ensemble dans les écoles et établissements.
Sauf à rejeter le principe même de l’inclusion, ces pistes ne peuvent que faire accord. Le Sgen-CFDT, favorable à l’inclusion revendique depuis plusieurs mois que l’on passe des paroles aux actes à tous niveaux du système éducatif, dans l’intérêt des personnels, des élèves et de leurs familles.
C’était notamment dans cette perspective que nous avions lancé une alerte sociale école inclusive en janvier 2018, que nous intervenons à chaque comité technique ministériel ou presque sur l’un ou l’autre des aspect de cette politique majeure pour notre société.
L’école inclusive vue des territoires aujourd’hui
Avec notre réseau militant dans les territoires, que constatons-nous ?
Une adaptation des structures scolaires insuffisante qui pèse sur les personnels
L’école inclusive bouleverse l’école, ses professionnels, les enrichit aussi mais parfois au prix d’une fatigue professionnelle majeure quand il faut absorber tous les ajustements parce que les structures institutionnelles et bâtimentaires ne bougent pas en conséquence. Et finalement c’est la situation des personnels qui se dégrade, nourrissant sans doute des formes de rejets du principe même de l’école inclusive.
Penser le parcours scolaire de chaque élève ou étudiant, c’est l’adapter à ses besoins et capacités, ce n’est pas imposer un temps de classe et des apprentissages identiques pour tous. C’est donc bien former les personnels à ces adaptations, les accompagner dans ces changements de pratiques.
Déployer la formation : organisation et budgets à améliorer
La formation est insuffisante pour les personnels d’enseignement, le départ en formation n’est pas toujours possible faute de remplacement possible.
Pour les AESH, agent.e.s à temps incomplet et à faible rémunération, partir en formation est parfois un coût : impossibilité de prendre un deuxième emploi pourtant nécessaire pour atteindre une rémunération décente, frais de garde d’enfants à engager sans défraiement possible par l’employeur.
Déprécariser les AESH : passer à la mise en œuvre des nouvelles règles
Pour les AESH encore, la déprécarisation via le nouveau cadre de gestion adopté à l’été 2019 se fait difficilement. Les nouvelles règles ne sont pas encore mise en œuvre partout. Le changement de contrat s’est même parfois traduit par une diminution de la rémunération via la perte de l’indemnité compensatrice de la CSG. Ailleurs, les rectorats n’appliquent pas le cadre horaire pour ne pas avoir à augmenter la rémunération… faute de budget disponible.
Depuis le 18 décembre 2019, le ministère annonce, en réponses au nombreuses interventions du Sgen-CFDT sur le sujet, un groupe de travail spécifique sur les conditions d’emploi des AESH. Il commencera ses travaux à la fin du mois de février. Il y a urgence pour que les AESH puissent croire que le gouvernement ne se paie pas de mots à leur égard.
Bref, la politique du gouvernement ne trouve pas à s’appliquer pleinement à l’éducation nationale.
L’article 25 de la loi pour une école de la confiance en berne
Pour la deuxième année consécutive, l’article 25 de la loi pur une école de la confiance qui dispose que « Les élèves accompagnés dans le cadre de ces dispositifs sont comptabilisés dans les effectifs scolarisés. » Les dispositifs en question sont les dispositifs d’inclusion comme les ULIS. Les effectifs scolarisés sont ceux des écoles et des établissements, chiffre qui sert à déterminer l’ouverture de classe, l’implantation de postes (enseignants, CPE, infirmiers, assistants de service social). Or ce n’est pas le cas partout. Il faut donner à l’Éducation nationale les moyens de mettre en œuvre la loi partout sur le territoire. C’est un des leviers pour améliorer l’inclusion scolaire.
Investir et organiser le travail pour réussir l’inclusion scolaire
Oui, pour le Sgen-CFDT, réussir l’école inclusive suppose des personnels formés aux différentes formes de handicap, oui il faut des équipes pluriprofessionnelles complètes et disposant de temps de travail commun, oui il faut des accompagnant.e.s déprécarisé.e.s et mieux rémunéré.e.s.
Quand l’état mettra-t-il en œuvre les moyens financiers, humains et organisationnels pour y parvenir ?
Quand sortira-t-on de la vieille rengaine du travailler plus pour les enseignants ?
Quand le ministère impose une deuxième heure supplémentaire non refusable, quand il semble encore vouloir augmenter le temps de travail face à élève, de fait le ministre de l’Éducation nationale obère les possibilités même de travail en équipe que la ministre secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées appelle de ses vœux.
Plus on augmente le nombre d’heures d’enseignement dans le temps de travail des enseignant.e.s, moins ils et elles sont disponibles pour le travail en équipes pluriprofessionnelles indispensable à l’école inclusive.
La loi de programmation pluriannuelle de l’Éducation nationale pourrait en être l’occasion. Elle doit s’accompagner d’une revalorisation des enseignant.e.s, CPE et PsyEN. Le gouvernement pourrait en faire l’occasion de l’adaptation de ses structures aux enjeux de l’école inclusive. Et comme cela concerne tous les personnels, il faut que toutes et tous aient des éléments de revalorisation reconnaissant leur engagement dans cette mission pas si nouvelle mais qui prend chaque année plus d’ampleur.
Le Sgen-CFDT en a fait la proposition à de nombreuses reprises sans jamais avoir de réponse.
Il est encore temps de ne pas passer à côté de cet objectif. Cela suppose que le gouvernement mette en cohérence ses propres politiques et priorise ses objectifs politiques.