Gouvernance, dotation des établissements, fusions ou regroupements, respect des acteurs... Voici un retour des journées Enseignement Supérieur et Recherche (ESR) de janvier 2017 organisées par la CFDT et le Sgen-CFDT. Par une équipe de militantes et de militants du Sgen-CFDT de Bretagne.
Promouvoir une gouvernance réellement démocratique
Les journées ESR (26 et 27 janvier 2017) organisées par le Sgen-CFDT et la CFDT à Paris (Belleville) ont été l’occasion de réunir seize experts de qualité pour débattre de l’actualité des transformations du paysage de l’université et des organismes de recherche en France aujourd’hui. Des témoignages variés et riches ont permis de mieux appréhender ce qui forge une véritable démocratie universitaire. Les évolutions ne sont pas forcément simples, mais des évolutions pour accompagner les situations locales sont pensées, d’autres modèles d’organisation d’établissements sont en projet. Il est par ailleurs urgent de promouvoir une gouvernance réellement démocratique des établissements.
Les tables rondes étaient complémentaires et les animateurs ayant bien anticipé les interventions, cela a permis des échanges de bonne tenue. Les participant·es ont été plus nombreux que pour l’édition 2016, ce qui nous encourage à nous engager d’ores et déjà dans l’organisation de l’édition 2018, qui sera pilotée par le groupe fédéral « Recherche, Développement et Innovation ». Les militant·es du Sgen-CFDT étaient présent·es également et ont permis par leurs questions et remarques de nourrir le débat. La presse a largement relayé cet événement, en considérant que ces deux journées sortaient de l’exercice convenu et constituaient un exercice assez inédit, et un lieu où « ça pense ».
Nous vous proposons un retour de la part de l’équipe du Sgen-CFDT Bretagne, fort bien représentée lors de ces journées, avec une série de points de vue de militant·es. Nous les en remercions vivement !
Respecter tous les acteurs
« Pour moi ces journées ont eu un double intérêt : tisser des liens avec et entre des adhérents de l’enseignement supérieur et de la recherche ainsi qu’avec les différents participants, enrichir ma connaissance de ce champ professionnel qui n’est pas le mien. Elles ont mis en évidence encore une fois qu’un pays, un système ne peut se transformer, se réformer positivement sans une démarche de conduite de projet respectueuse des acteurs. Le temps d’un mandat politique n’est pas suffisant pour aller au bout des évolutions en cours dans l’ESR. Laurent Berger en ouverture, Catherine Nave-Bekhti en conclusion ont mis en évidence les enjeux et ont annoncé la poursuite de ces travaux communs entre l’interprofessionnel CFDT et plusieurs fédérations, avec le Sgen-CFDT comme pilote. »
Luc SAVATIER, secrétaire général du Sgen-CFDT Bretagne
Pas de fusion ou de regroupement à marche forcée
« Au delà de l’ensemble des interventions très intéressantes de ces deux jours, je retiendrai la conclusion de la Directrice Générale adjointe des Services de l’Université de Strasbourg qui a insisté sur le fait qu’une fusion, ou que tout type de regroupement opéré, quelle que soit sa forme (fusion à proprement parler, COMUE, association), cela prend du temps, et ne doit pas se faire dans l’urgence. Il faut accepter que ce processus prenne du temps et établir des priorités. »
Cécile ROCUET, ingénieure Projet Européen, élue CT – Université Bretagne Loire (UBL)
Accompagner les étudiant·es
« Ces journées de l’ESR ont été formatrices pour moi en tant qu’élu récent à l’université de Rennes 1, certains concepts de fonctionnement de l’université et des COMUE (Communautés d’Université) ont été précisés utilement. L’intervention de la sociologue m’a particulièrement éclairé sur la montée en puissance des agences dans les prises de décision. J’ai apprécié d’entendre le point de vue des étudiants qui sont au centre du système universitaire. Ils ont besoin de formation et d’accompagnement afin de remplir leurs missions dans les instances universitaires. Je n’avais pas réalisé qu’il y a beaucoup trop d’élections pour qu’ils puissent participer à la démocratie à l’intérieur de l’université. J’aimerais être informé des plus-values des décisions de la COMUE UBL comme ça se fait en Franche-Comté. »
Didier CHAPELLON, enseignant – IUT de Rennes
Dotation des universités : sans moyens correctement répartis, le LMD marche sur la tête
Nous associons à cet ensemble de retours militants sur nos journées ESR la reprise d’un point de l’intervention de Matthieu Gallou, président de l’UBO.
« Au mois de décembre dernier, le MENESR a annoncé à grand renfort de publicité un « bonus » de 850M€ pour le budget 2017 des universités. Outre que le chiffre réel du bonus pour les établissements ne se monte qu’à une centaine de millions (le reste étant consacré à la couverture des mesures catégorielles : point d’indice et PPCR, qui valent pour l’ensemble de la fonction publique), le fait d’affecter la plus grande partie de ce bonus à la « hausse démographique » fait question. Non pas bien sûr qu’il faille négliger d’accompagner les universités qui accueillent de plus en plus d’étudiants, mais bien au contraire parce que le gouvernement présente désormais comme un « coup de pouce ponctuel » ce qui devrait être sa démarche permanente. Or, depuis de nombreuses années, ce n’est de fait plus le cas, et ce n’est pas la rallonge de 100M qui peut maintenir à niveau les moyens des universités confrontées à une forte hausse démographique depuis désormais 3 ans (jusqu’à +20% d’effectifs sur la période pour un établissement que je connais très bien). Or, il faut le savoir : c’est désormais beaucoup sur ses performances en master et en doctorat qu’on évalue les formations d’une université, bien plus que sur ses licences. Ainsi, si une université veut apparaître parmi les « bonnes » universités, elle peut être tentée de chercher à affecter ses faibles moyens vers les niveaux M et D, plutôt que vers le niveau L, alors que c’est précisément en Licence que se manifeste le plus le boum démographique. Nous en sommes ainsi arrivés à une logique folle : pour être bien classée, une université pourrait aujourd’hui trouver intérêt à fermer toutes ses 1ères années de Licence (les plus coûteuses en volume) et réaffecter les moyens vers les niveaux supérieurs. Bien sûr, que feraient les bacheliers pour rejoindre la L2 ? Constater qu’une telle question est seulement imaginable revient aujourd’hui à comprendre à quel point notre système marche sur la tête. »
Matthieu GALLOU, président de l’UBO