Comment est organisé le système éducatif en Belgique ? Degré d'autonomie des écoles, autorités de tutelle, statut et fonctions de la direction, recrutement et statut des enseignant·es... Alors que la question de la gouvernance des écoles est posée en France, pourrait-on s'inspirer du modèle belge ?
Décentralisation et pouvoir central
Trois principes sont au centre du système éducatif en Belgique :
- Le libre choix laissé aux familles pour l’éducation de leurs enfants
- la fin des tensions entre réseaux (catholique, public, coranique, flamand, wallon)
- un enseignement gratuit
Le pouvoir fédéral de Bruxelles est garant de cette paix scolaire. Cependant, l’organisation de l’enseignement est décentralisée au niveau des entités fédérées que sont les communautés. Bien que différentes, ces communautés ont adopté un fonctionnement très similaire fondé notamment sur une certaine autonomie des établissements.
Le pouvoir central fixe les conditions d’obtention des diplômes et centralise les pensions des enseignant·es. Ses attributions se limitent à cela, les communautés étant en charge de l’organisation de l’enseignement. Les communautés financent les établissements scolaires par des subventions et fixent les mesures communes à l’ensemble des écoles : inscription, programmes scolaires, socles de compétences…
Gouvernance des écoles
Le « pouvoir organisateur » : l’autorité hiérarchique de l’école
Les écoles de l’enseignement officiel dépendent de pouvoirs organisateurs publics, à savoir, pour l’enseignement francophone, la Communauté française, les provinces, les communes, et, dans la Région de Bruxelles-Capitale, la Commission communautaire.
Les établissements scolaires de l’enseignement libre ont un pouvoir organisateur privé, établi la plupart du temps sous la forme d’une association sans but lucratif.
Dans la mesure où un pouvoir organisateur respecte les normes et les règles auxquelles il est assujetti, il peut déterminer ses programmes d’enseignement, sous réserve d’approbation ministérielle, ainsi que ses méthodes pédagogiques et son organisation. Il explicite dans une lettre de missions les responsabilités et les tâches déléguées à la direction. Le directeur, la directrice sera recruté·e par le pouvoir organisateur sur la base de cette lettre de missions qui deviendra son cadre de travail et sur laquelle il, elle sera évalué·e.
Le système éducatif belge est basé sur un aller et retour continuel entre la responsabilité détenue par le pouvoir organisateur et l’incarnation de cette responsabilité confiée par délégation au directeur, à la directrice.
Gestion financière
Le pouvoir organisateur est responsable des ressources générées et des dépenses effectuées dans le cadre du fonctionnement de l’établissement. Il doit ainsi faire un retour annuel auprès des autorités qui subventionnent l’établissement. Il gère également les ressources financières apportées par les différentes ventes des élèves et les activités organisées au sein de l’établissement pendant l’année. Ces différentes ventes et activités sont souvent nécessaires au bon fonctionnement de l’établissement.
Une direction qui coordonne, rend compte et peut prendre des initiatives
A ce titre, le directeur, la directrice en lien avec le pouvoir organisateur participe à l’élaboration d’un budget prévisionnel qui doit être présenté au conseil d’administration et soumis à un vote. Ce même conseil d’administration, peut, s’il le souhaite, lui déléguer la gestion des affaires. Cela doit cependant être inscrit au préalable dans les statuts de création de l’établissement.
La direction peut alors recevoir mandat d’exécuter le budget et disposer ainsi du droit d’utiliser le compte bancaire. Elle devra périodiquement rendre compte au conseil d’administration des dépenses engagées et des ressources récoltées. Si l’orientation politique du budget appartient au pouvoir organisateur, la gestion, elle est toujours le fruit d’un dialogue interactif régulier entre le pouvoir organisateur et la direction. L’exécution du budget est d’autre part soumise à un vérificateur extérieur qui certifie la véracité des comptes.
Pédagogie et éducation : mieux coller au territoire de l’école
Le projet éducatif et le projet pédagogique de l’établissement sont élaborés par le pouvoir organisateur sur la base de la réalité territoriale et des finances dont il dispose. L’application du projet d’établissement est quant à elle confiée à la direction qui doit être en mesure de mettre en œuvre les orientations définies. La direction peut être amenée à actualiser le projet d’établissement sur la base de propositions du pouvoir organisateur. Dans tous les cas, ces différents projets doivent être présentés aux familles lors de l’inscription des élèves et aux différents membres de l’équipe éducative lors de leur recrutement.
Une évaluation préparée dans un collectif de travail et portée par la direction
Ces projets définis pour une durée variable suivant les établissements font l’objet d’une évaluation. Le directeur, la directrice doivent à cet effet rédiger un rapport d’activité et le présenter au pouvoir organisateur. Ce rapport est établi à partir des observations de l’équipe éducative et pédagogique. La direction présente ainsi des analyses de résultats et doit être en mesure de proposer des mesures pour mieux répondre aux besoins des élèves. A ce titre, le directeur, la directrice veille à ce que l’équipe pédagogique et l’équipe éducative de l’établissement bénéficient de l’information nécessaire sur les programmes et orientations pédagogiques. Chaque personnel de l’établissement dispose ainsi d’une fiche de poste spécifique qui fixe les directives méthodologiques se rapportant à sa fonction.
Direction d’école
Le directeur, la directrice : un supérieur hiérarchique avec une autorité fonctionnelle…
Afin de permettre l’évolution pédagogique de l’établissement ou d’un personnel, le directeur, la directrice collabore avec le corps d’inspection à l’évaluation des personnels placés sous son autorité hiérarchique. Il elle a ainsi les compétences pour lire, intégrer et faire appliquer par les personnels les circulaires. Le directeur, la directrice a la responsabilité de tous les temps : scolaire, périscolaire, garderie, depuis l’arrivée de l’élève jusqu’à ce qu’il soit remis à la sa famille après la classe.
…qui peut participer au processus de recrutement
En matière de ressources humaines, c’est le pouvoir organisateur qui procède au recrutement des différents personnels qui vont intervenir au sein de l’établissement. La direction peut participer au processus de recrutement mais la décision finale appartient au pouvoir organisateur. Souvent recruté·e au départ en CDD, l’enseignant·e est ensuite titularisé·e sur la base d’un rapport remis par la direction au pouvoir organisateur. Sur signalement, du directeur, de la directrice, le pouvoir organisateur peut être amené à licencier un·e enseignant·e, il en a la capacité juridique.
Des responsabilités diverses
Les compétences attribuées à l’établissement, sous la responsabilité du directeur, de la directrice, concernent notamment :
- l’attribution des charges à chaque membre du personnel
- la répartition des élèves
- l’organisation des cours et leur permutation éventuelle
- l’organisation de la surveillance des élèves pendant le temps scolaire et en dehors du temps scolaire
- la gestion administrative des dossiers de départ en formation des enseignant·es
- la gestion quotidienne du personnel d’entretien
- l’application de la règlementation du travail
- les relations avec les élèves, les parents et les réunions de parents
- la gestion des dossiers des élèves : absence, orientation, sanction (en lien avec le pouvoir organisateur)
Un système éducatif qui a pourtant ses limites
Organisée sur la base d’une décentralisation importante, la Belgique a mis en place un système qui ressemble à la réalité de son territoire, un système où la décision est prise au plus près de l’établissement. Cependant, le fonctionnement actuel se fait souvent au détriment d’une certaine mixité sociale et provoque donc des inégalités sociales d’accès aux savoirs. Le système d’évaluation instaure une compétition entre les établissements souvent au détriment des élèves. Les résultats aux évaluations PISA n’étant pas satisfaisants, le Ministère belge entend peser plus sur les directives pédagogiques données aux différents pouvoir organisateur des établissements pour créer un système plus juste…