Le décret sur la CDIsation paru en Août 2022 exclut les AED en CDI du droit à la formation. Cette situation est inacceptable, car tout agent doit pouvoir être formé pour exercer au mieux ses missions.
Anticipant cet "oubli", des collègues CPE se sont réunis pour proposer un parcours de formation.
Membre et animatrice du réseau des GDRP sur le bassin du Creusot – Montceau-les-mines – Autun, Anne Brugniaux nous fait part de son expérience au sein d’un collectif de CPE qui propose une formation aux AED.
Le GDRP, qu’est-ce que c’est, quel lien avec la formation ?
Le GDRP (groupe de réflexion et de production) a été instauré dans les années 90 : en 2022, l’académie de Dijon en compte une dizaine pour les CPE.
Depuis cinq ans, le GDRP est au programme du PAF (Plan Académique de Formation) dans le registre des publics désignés. Avec l’évolution des PAF en École Académique de Formation Continue (EAFC), les membres de ce réseau, tous animateurs et animatrices, ont saisi l’opportunité pour concevoir et réaliser un parcours de formation destiné aux AED.
Que permet le CDI pour la Vie Scolaire ?
Le CDI crédibilise davantage le service de vie scolaire aux yeux de la communauté éducative, car il professionnalise le travail de l’équipe.
J’ai constaté qu’après un mois de fonctionnement et deux AED cédéisées dans l’équipe, les collègues enseignants portent un autre regard sur ces personnes.
« Il y a eu comme un déclic, les collègues savent qu’elles vont rester, ils investissent davantage la relation avec ces personnes »
En quoi la cédéisation des AED est une bonne chose selon toi ?
Sur le Bassin du Creusot, nous avons toujours été favorables à cette cédéisation. Cela tient en partie aux spécificités du bassin : beaucoup de collèges ruraux, des difficultés de recrutement et un important turnover en lycée.
Personnellement, je suis favorable à ce que le métier d’AED ne soit pas réservé aux seul.e.s étudiant.e.s. Je vois deux avantages à cette mixité : des échanges entre AED d’âges et d’horizons différents, et pour les élèves, une possibilité d’écoute plus large.
Quels sont selon toi les points forts de votre formation ?
Notre démarche intègre à la fois des éléments de formation délocalisée (assurée par des formateurs et formatrices « labellisés EAFC ») sur un établissement du bassin, complétée par des temps de formation dans l’établissement de l’AED (ces temps sont assurés par un des CPE de l’établissement).
Cette organisation entend répondre à un double objectif visé par le GDRP : livrer un travail (contenu de formation) sur le bassin à destination des AED et sensibiliser le Rectorat au sujet de la nécessité d’une formation continue pour les AED.
Notre parcours de formation :
- 1er temps : Formation intra établissement : 2 heures en fin août-début septembre sur le statut AED et la connaissance des missions.
- 2ème temps : Formation par bassin : 1 journée en septembre-octobre sur les responsabilités des AED, le positionnement adulte/adolescent, la psychologie de l’adolescent.
- 3ème temps : Formation intra établissement assurée conjointement par un enseignant et une infirmière : 1 demi-journée en novembre-décembre sur l’aide aux devoirs et les problématiques « Dys » : (dyspraxie, dyslexie, dysorthographie,…).
- 4ème temps : Formation par bassin : 1 demi-journée en janvier-février sur des ateliers d’analyse de pratique centrés sur le travail et la cohérence de l’équipe Vie Scolaire.
- 5ème temps) : Formation intra établissement 1 demi-journée début juillet (réservée aux AED qui vont poursuivre leur activité l’année scolaire suivante) orientée sur le débriefing et les ateliers d’analyse de pratique (AAP).
Quelle évolution de carrière vois-tu pour ces personnels au sein de l’Éducation Nationale ?
Personnellement, je suis favorable à une dispense de diplôme permettant de passer le concours (comme cela se pratique pour les mères de trois enfants, les sportifs de haut niveau et les retraités).
Le problème de l’accès au concours réside selon moi dans le niveau de diplôme requis (Master 2). Pour les candidats qui n’ont qu’un Bac+2, ce concours est inaccessible, car le projet rencontre deux obstacles : le financement sur la durée et le temps alloué à sa préparation (pour les mères de famille en particulier).
Quelles perspectives pour les AED au-delà de leur CDI ?
Il faut simplifier la procédure d’obtention de la VAE, parce qu’actuellement, c’est une démarche non utilisée en raison d’un processus de validation trop long. Pour un candidat à la VAE, le dossier à renseigner est quasi incompréhensible si le candidat n’est pas accompagné (ce qui est souvent le cas), la complexité du dossier est décourageante à poursuivre la démarche de VAE.
« Avec le CDI, AED est devenu un vrai métier »
Penses-tu que la cédéisation des AED soit une étape permettant à l’agent de se projeter dans l’évolution possible de sa carrière ?
Aujourd’hui non, mais avec une formation adaptée : oui !
Dans l’établissement où j’exerce, l’équipe vie scolaire compte deux AED en CDI qui aiment ce qu’elles font et ne souhaitent pas d’évolution de leur carrière. Pour ces personnes, le métier d’AED est un vrai métier.
Pour les autres, il faut parvenir à leur donner envie de se projeter par le biais de la formation continue. C’est un gain pour la qualité du travail dans l’établissement, mais aussi un gain pour les personnes engagées dans cette dynamique d’accompagnement et d’évolution de leur parcours professionnel.
Pour le Sgen-CFDT, en l’absence de formation institutionnelle des AED depuis le début de la crise sanitaire, l’engagement de ces collègues CPE dans une démarche de formation est à saluer. Il constitue un exemple à prendre en compte de ce qui peut être mis en œuvre à l’échelle nationale.