Repositionnement du concours de recrutement au niveau licence, nouvelles épreuves de concours, nouvelle licence, nouvelle formation en master : la formation initiale des enseignants du premier degré, comme celle des enseignants du second degré et des CPE, va subir de profonds bouleversements.
Concours en L3 : de nouvelles épreuves inadaptées
La réforme de la formation initiale des enseignant.es et des CPE prévoit un repositionnement des concours en fin de licence (L3) dès la session 2025.
Les maquettes de concours et les « sujets 0 » pour le concours de recrutement de professeurs des écoles (CRPE) s’organisent de façon habituelle : 2 épreuves écrites d’admissibilité suivies de 2 épreuves orales d’admission.
Les contenus sont nettement insuffisants : les épreuves disciplinaires en français et en mathématiques mettent en jeu des connaissances de niveau fin de collège et l’épreuve écrite 2 sur la « polyvalence » prend la forme d’un questionnaire à réponse courte et/ou d’un questionnaire à choix multiples.
Aucune ambition de faire évoluer les choses sauf changer le moment du concours qui reste l’alpha et l’oméga du recrutement.
Depuis la précédente réforme Blanquer (2019), les épreuves de concours n’ont plus aucun sens. L’école du 21e siècle continue à recruter sur des modalités d’épreuves dignes d’un autre temps et dont les contenus s’appauvrissent maintenant.
Des anciens IUFM aux futures ENSP, en passant par les ESPE et les INSPE, la place des concours de recrutement depuis l’universitarisation de la formation en 1990 n’aura cessé de changer : L3, M2, M1, M2 puis à nouveau L3.
La question cruciale reste, encore une fois, et quelle que soit la place du concours, l’articulation à trouver entre recrutement et formation initiale pour éviter aux étudiants et aux formateurs de subir un cahier des charges impossible à tenir. Ce qui est donné à lire dans les maquettes indique malheureusement que le concours continue à se penser indépendamment des compétences professionnelles à mobiliser pour devenir enseignant.e.
La CFDT Education Formation Recherche publiques revendique une forte restructuration des concours dans le cadre de la réforme.
Avec la mastérisation de la formation initiale des enseignant.es et des CPE depuis 2010 mais aussi depuis la montée en puissance de la préprofessionnalisation dès la licence, les concours de recrutement ne sont plus la première étape de l’entrée des lauréats dans le métier. En revanche, ils continuent à garantir l’ancrage indispensable des différents métiers de l’éducation nationale au sein de la fonction publique.
Il est primordial que les futures épreuves des concours tiennent compte d’un double principe de réalité : d’une part, nécessité par l’état employeur de recruter des futurs agents du service public d’éducation parfaitement au clair sur leurs futures missions ; d’autre part, l’ aspiration des candidats à mettre leurs compétences au service de l’école. A ce titre, les épreuves doivent être en nombre limité, professionnalisantes, adaptées aux enjeux du métier d’enseignant et qu’elles tiennent compte, aussi, de l’évolution sociologique des candidats.
Des épreuves d’un autre âge comme elles apparaissent dans les projets communiqués font redouter le pire sur l’état de santé d’une institution que de nombreuses femmes et de nombreux hommes ont encore envie de servir.
Ces « maquettes génériques » manquent terriblement d’ambition et marquent le clap de fin d’une époque révolue.
Si les concours sont les totems de chaque réforme, la CFDT Education Formation Recherche publiques n’a pas de tabous à les faire évoluer pour les adapter à une ère nouvelle et à des besoins nouveaux.
Les nouvelles épreuves du CRPE à partir de la session 2025
- La première épreuve écrite d’admissibilité permet de vérifier la maîtrise des connaissances disciplinaires en français et en mathématiques, avec une note éliminatoire à 5 (2,5 pour chacune des parties). Durée : 4 heures – Coefficient : 5.
- La seconde épreuve écrite de connaissances dans les autres disciplines (sciences et technologies, histoire et géographie, langues vivantes, arts, EPS, EMC) permet d’apprécier la polyvalence du candidat, avec une note éliminatoire à 5. Durée : 4 heures- Coefficient : 3. Note éliminatoire à 5.
- La première épreuve orale d’admission consiste en un exposé suivi d’échanges avec le jury. L’exposé disciplinaire porte sur le domaine d’enseignement, mathématiques ou français, choisi par le candidat. Durée : 1 heure avec une préparation d’une heure – Coefficient : 5. La note 0 est éliminatoire.
- La seconde épreuve orale intitulée « entretien » porte sur l’aptitude du candidat à se projeter dans le métier de professeur, à transmettre et incarner les exigences du service public et les valeurs de la République, ainsi que sa capacité à comprendre les grands enjeux liés à la transition écologique et appréhender l’épanouissement de l’élève dans toutes ses dimensions. Durée : 35 minutes – Coefficient : 3. La note 0 est éliminatoire.
Formation initiale : une nouvelle licence « professorat des écoles »
La nouvelle licence au professorat des écoles (LPE) prévue pour la rentrée 2025 affiche pour objectif d’engager le développement d’une culture professionnelle de professeur des écoles et de préparer le CRPE positionné en fin de licence. Conformément au projet de décret statutaire, les étudiant.es de cette licence pourraient être dispensé.es des épreuves écrites du CRPE sous certaines conditions.
Tableau récapitulatif du modèle proposé :
4 blocs de formation | volume horaire | ECTS |
1. S’approprier les savoirs pour enseigner à l’école primaire1 | 980 heures | 120 |
2. Analyser les caractéristiques des situations et des contextes d’enseignement et d’apprentissage | 150 heures | 18 |
3. S’approprier le contexte institutionnel d’exercice du métier | 150 heures | 18 |
4. Construire son projet professionnel | 120 heures | 12 |
+ adaptation à chaque territoire | 100 heures | 12 |
TOTAL | 1500 heures + 9 semaines de stage | 180 |
1 Mathématiques (220h) ; Français et compétences langagières (220h) ; Sciences et technologie & fondements (120h) ; Histoire, géographie, enseignement moral et civique (90h) ; Education physique et sportive (90h) ; Langue vivante étrangère – validation du niveau B2 (90h) ; enseignements artistiques (90h) ; Renforcement ou approfondissement disciplinaire – options à choix (60h).
La structuration de la LPE pour le bloc 1 ressemble fortement à ce qui est mis en oeuvre dans le parcours préparatoire professorat des écoles (PPPE) pour les enseignements disciplinaires actuellement pris en charge par le lycée. Pour le moment, on ne sait pas qui prendra en charge les enseignements des quatre blocs de cette future LPE : un document qui avait fuité en mars 2024 évoquait des enseignants de l’université et des enseignants du premier et du second degrés.
Fin des PPPE
La disparition des PPPE pour la rentrée 2025 est confirmée. La promotion de la rentrée 2023 sera la dernière à bénéficier de l’intégralité du PPPE existant. Les entrants de la rentrée universitaire 2024 effectueront une première année de PPPE (2024-2025) puis rejoindront la nouvelle LPE en deuxième année à la rentrée 2025, afin de passer le CRPE de la session 2027.
Cette situation ne tient pas compte des étudiants qui doubleraient une des années de la licence, et qui seraient donc assimilés à la cohorte de l’année suivante. Elle ne tient pas compte non plus des étudiants qui refuseraient de poursuivre en deuxième année de LPE après une première année de PPPE.
Les futurs bacheliers de 2025 sur Parcoursup pourront donc s’orienter vers la future LPE ou tout autre licence de leur choix pour passer le CRPE.
En master, les contenus de la future formation pour les lauréat.es des concours à la rentrée 2025 ne sont pas encore connus.
Les 10 refus de la CFDT Education Formation Recherche publiques suite aux premières annonces :
- Report d’un an du statut de fonctionnaire stagiaire pour les lauréat.es du concours avec une simple gratification de 900 € / mois leur première année de formation initiale (M1).
- Astreinte pour les titularisé.es à servir dans leur corps d’affectation pendant 4 ans.
- Formule « organisme de formation » substituée à celle d' »établissement d’enseignement supérieur » pour les années de formation.
- Formation initiale toujours limitée à un an pour bon nombre de lauréat.es.
- Stagiaires toujours considéré.es comme moyen d’enseignement.
- Pression sur les équipes dans les universités pour préparer la rentrée 2024 et mettre en oeuvre la réforme dans la plus grande précipitation et sans textes de cadrage.
- Bricolage de modules de préparation concours pour la session 2025 sans moyens supplémentaires.
- Mise en concurrence des étudiants de L3, M1 et M2 pour les sessions 2025 et 2026 des concours.
- Nouvelles épreuves de concours qui ne répondent toujours pas aux enjeux du métier d’enseignant.
- Annonces ministérielles en dehors de tout dialogue social et sans vision globale et partagée de la réforme à mettre en oeuvre.
La réforme doit à la fois garantir la stabilité du dispositif global de la formation initiale et renforcer l’attractivité du métier. La CFDT Education Formation Recherche publiques condamne la précipitation du calendrier pour la mise en oeuvre d’une réforme qui n’est ni prête ni satisfaisante en l’état. Elle demande le retrait de la réforme. |