La circulaire prise par la première ministre le 8 février 2023 acte l’abandon de la notion de « poste de travail » au profit de celle de « position de travail ».
La nouvelle doctrine d’occupation des immeubles tertiaires de l’État commence à avoir des effets dans nos administrations. Elle influera sans aucun doute des décisions de gestion des bâtiments hébergeant nos services dans les mois et les années qui viennent. Cela ne sera pas sans conséquences sur les conditions de travail en Rectorat, DSDEN, universités… On vous explique de quoi il retourne.
Une circulaire passée inaperçue avec de lourdes conséquences
La circulaire du 8 février 2023 est passée totalement sous les radars pour cause de mobilisation sur la réforme des retraites. Elle revisite la doctrine de l’État s’appliquant aux immeubles dédiés à son activité tertiaire (hors périmètre EPLE).
Concrètement, qu’est-ce que cette circulaire change pour les agents publics ? La réponse la plus appropriée serait : « ça dépend » !
Cette circulaire aura pour conséquence, soit :
- des déménagements et des réductions de surfaces,
- l’utilisation de bureaux partagés « flex office »,
- des déménagements-regroupement avec réduction des surfaces et agrémenté de quelques « open space » en « flex office »,
- aucun changement dans l’immédiat pour certains agents…
Quels sont les déterminants de cette nouvelle doctrine « immeubles » ?
Cette circulaire change les critères permettant de calculer le nombre de m2 par agent. Jusqu’alors, le ratio permettant de déterminer la surface dédiée à chaque agent pouvait s’obtenir de deux manières :
- soit à partir de la surface utile nette (SUN) rapportée au nombre de postes de travail pour un plafond de 12 m2 par agent
- soit à partir de la surface utile brute (SUB) rapportée aux postes de travail avec un plafond par agent de 20 m2.
La subtilité entre la SUN et la SUB est que cette dernière inclut dans le décompte de m2 les halls et les couloirs, les espaces d’accueil, les restaurants administratifs, etc… Or, la SUN exclut ces surfaces.
Désormais, la surface par agent passe à 16 m2 SUB au lieu de 20 m2 avec un plafond à 18 m2 SUB.
Les résidents, une notion nouvelle aux contours flous et volatils
Les résidents au sens de cette circulaire sont des utilisateurs réguliers et pérennes devant être hébergés dans le bâtiment. Les « effectifs résidents » intègrent non seulement des agents publics relevant de l’administration concernée, mais aussi des personnels externes. C’est par exemple le cas des prestataires, des stagiaires ou des vacataires.
La circulaire précise que la notion d’utilisateur pérenne s’apprécie à l’échelle de l’année.
Or, les stagiaires ou les vacataires sont une catégorie très instable d’une année sur l’autre. Il en est de même pour les prestataires.
C’est aussi le cas de quotité de travail prise en compte dans le décompte des équivalents temps plein (ETP) de résidents, ainsi que le télétravail.
Ainsi, un agent ou une agente en télétravail plus de 2 jours par semaine compte pour ½ ETP résident.
Les administrations vont prendre des décisions impactant structurellement leurs locaux sur la base de critères qui sont par nature volatils.
La position de travail se substitue au poste de travail
La circulaire affirme que la notion de « poste de travail », héritée de « l’ancien monde », n’est plus adaptée aux nouvelles organisations du travail. La position de travail nécessaire à chaque agent se définit comme « un emplacement où un agent dispose d’une connectivité (filaire ou non), d’un éclairage ou d’une assise lui offrant des conditions de confort, d’ergonomie et de sécurité permettant d’y travailler au moins une demi-journée en continu. »
La position de travail ainsi définie englobe les postes de travail individuels, affectés ou non, y compris les postes de travail situés dans les salles de réunion ou les espaces de restaurant connectés.
La doctrine d’occupation des immeubles impacte les conditions de travail
Cette circulaire dégrade potentiellement les conditions de travail des personnels exerçant dans les services, en administration centrale ou chez les opérateurs.
Pour le Sgen-CFDT, les instances de dialogue social dédiées (CSA et F3SCT) doivent discuter de ces réorganisations de services de grande ampleur avec les agents eux-mêmes. Elles doivent s’accompagner de mesures spécifiques.
La réduction de l’empreinte énergétique des bâtiments ne doit pas se faire au détriment des conditions de travail des agents.
L’objectif de la réduction de l’empreinte énergétique de nos bâtiments est parfaitement recevable et partagé. Mais, réduire la dépense en dégradant les conditions de travail des personnels exerçant dans les services, en administration centrale ou chez les opérateurs serait irrecevable. Cela serait, de plus, de très mauvais augure pour notre attractivité.