Les élections européennes sont l'occasion pour la CFDT de regarder ce qui se fait ailleurs sur différentes thématiques : gouvernance, temps scolaires, rémunération...
Première thématique et premier article : l'inclusion scolaire et l'exemple italien.
A l’occasion de la semaine européenne, la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques (ex Sgen-CFDT) a choisi d’aller voir ce qui se passait au delà des frontières de l’hexagone. Voter aux élections européennes, c’est aussi l’occasion de promouvoir une réflexion globale et de mettre en place ce qui se fait de bien ailleurs.
L’Italie, un exemple européen d’inclusion scolaire
En matière d’inclusion scolaire les exemples en Europe sont multiples et la France est souvent citée comme très en retard sur ce dossier. Le pays qui semble le plus à la pointe en la matière est l’Italie, pays où le dispositif d’inclusion est pris en compte depuis 1971. La volonté affichée à l’époque était de faciliter en priorité la socialisation des enfants en situation de handicap. Pour cela, l’instruction de ces enfants se ferait désormais dans les classes « ordinaires » de l’école publique. Rapidement, d’autres lois ont suivi avec comme objectif commun la valorisation de ce que ces enfants sont en capacité de faire.
1977 est le véritable point de départ du lancement de cette politique avec la création de services psycho-pédagogiques prévoyant la présence en classe « ordinaire » d’enseignant·es spécialisé·es. Dès lors, sont affichées la nécessité du travail de groupe et la construction d’un enseignement individualisé. La classe devient donc plus ouverte et centrée sur un travail collaboratif des adultes autour des besoins particuliers de chaque enfant, porteur de handicap ou non.
Une politique volontariste
Aujourd’hui, en Italie, l’inclusion scolaire se passe au mieux. Le placement d’enfants en situation de handicap dans des établissements spécialisés ne se fait que de façon exceptionnelle. Cela concerne aujourd’hui 0,5 % des enfants porteurs de handicap et constitue le plus souvent le dernier recours une fois que toutes les autres voies ont été explorées.
Ceci a été rendu possible grâce à une politique volontariste des différents gouvernements. Aujourd’hui, l’école ordinaire italienne bénéficie d’un grand nombre de services attachés qui travaillent à la construction du parcours de l’élève. Ces services mobilisent l’ensemble des professionnels des secteurs d’éducation ordinaire et spécialisée (enseignant·e spécialisé·e, psychologue, orthophoniste, psychomotricien·ne, éducateur et éducatrice spécialisé·e). Dès lors, l’Italie a fermé la plupart des établissements spécialisés en redéployant progressivement ces personnels dans les écoles ordinaires dès 1977.
Une inclusion en différentes étapes
Il s’agit dans un premier temps de repérer les enfants porteurs de handicap. Pour cela, le service de santé local (l’équivalent des MDPH), délivre un certificat aux enfants présentant des déficiences physiques ou intellectuelles. Ce certificat est très important car il va déterminer les ressources supplémentaires dont l’enfant va avoir besoin. On y détermine ainsi les besoins physiques, psychiques, sociaux ou affectifs de l’élève. Il s’agit surtout de définir les capacités de l’élève qui pourront être développées tout en respectant ses choix. Dès lors, l’élève pourra bénéficier d’un apport supplémentaire en ressources humaines, matérielles voire financières.
L’enseignant de soutien, pierre angulaire de la réussite du principe d’inclusion
Le point essentiel de la réussite de ce système est la mise en place dans les écoles, d’un·e enseignant·e dit de soutien qui va coordonner l’action des professionnels et soutenir l’enseignant·e ordinaire dans la classe en co-intervention. Prenant en charge entre un et quatre élèves suivant la nature du handicap, cet·te enseignant·e de soutien est également chargé·e de développer un programme d’individualisation d’apprentissage. Ce programme fixe les objectifs scolaires en fonction des capacités de l’élève porteur de handicap. Ces objectifs sont regroupés dans un Plan d’Éducation Individualisé (PEI). L’enseignant·e de soutien est chargé·e de programmer les activités de l’élève en situation de handicap et de coordonner l’action et les interventions en collaboration avec les autres enseignant·es.
Une collaboration permanente des acteurs
Le collectif de travail est donc l’élément essentiel à la réussite d’un tel programme car un tel dispositif demande une organisation souple permettant une adaptation permanente des adultes entourant l’inclusion scolaire de l’élève. Cela nécessite la collaboration permanente des enseignants et des différents champs professionnels médico-sociaux. La famille est pleinement associée à la construction de ce parcours par des réunions régulières voire la possibilité de venir assister à des prises en charge de l’enfant au sein de l’école, de la classe.
Le collectif de travail est l’élément essentiel…
Les effectifs des classes qui accueillent un ou deux élèves à besoins particuliers sont limités à 20 élèves maximum (25 maximum pour les autres classes). Quant aux élèves, ils sont sensibilisés dès le plus jeune âge à la présence d’élèves en situation de handicap au sein même de l’école mais bien au delà, dans les clubs sportifs et autres activités extérieures. L’Italie est donc devenue experte dans une socialisation bilatérale.
Une formation initiale et continue au handicap pour tous les personnels enseignants
En matière de formation des personnels, là encore, l’Italie est à la pointe. Parallèlement à ce choix de promouvoir l’inclusion en milieu ordinaire, le gouvernement a décidé de se donner les moyens de ses ambitions. Les enseignant·es bénéficient ainsi d’une formation initiale conséquente.
Formation des personnels : l’Italie est à la pointe…
Ils,elles reçoivent une formation générale sur les besoins particuliers et effectuent des stages réguliers pour se confronter à cette réalité. Une fois titularisé·es, les enseignant·es continuent à se former régulièrement et reçoivent ainsi des formations intégrant les derniers apports de la recherche en matière d’adaptation pédagogique. De leur côté, les enseignant·es spécialisé·es suivent une année de formation universitaire, intégrant différents stages en responsabilité au sein des écoles pour mettre en pratique ce qui a été appris.
Un bémol, l’inégalité territoriale face à la mise en œuvre de cette politique
Si le gouvernement central finance l’éducation des élèves à besoins particuliers, les disparités territoriales sont cependant prégnantes. L’Italie a en effet fait le choix de privilégier la décentralisation pour le mise en œuvre de cette politique volontariste. Certaines régions profitent de la liberté de gestion qui leur est laissée pour ne pas consacrer à l’inclusion scolaire la totalité des moyens attribués par l’État. Elles créent ainsi des inégalités entre les enfants selon la Région dans laquelle ils vivent.
la société italienne est bien moins inclusive que l’École…
Enfin, si l’école est particulièrement inclusive en Italie, la société l’est, quant à elle, beaucoup moins. L’enfant en situation de handicap, devenu adulte aura en effet beaucoup de mal pour s’insérer professionnellement.