La délégation du Sgen-CFDT a rappelé à madame la Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche ses priorités lors de la séance d'installation du CSA ministériel qui s'est tenue le 10 février 2023.
Le CSA ministériel, lieu de la représentation syndicale des agents du MESR
Les déclarations liminaires des organisations représentatives ont été précédées de deux déclarations intersyndicales, que le Sgen-CFDT soutient pleinement : l’une demandant le retrait de la réforme des retraites et l’autre concernant la vente d’une partie du domaine du CNRS à Meudon.
Madame la Ministre,
Nous tenons d’abord à vous remercier pour votre présence à la première réunion de cette nouvelle instance. Nous y voyons une marque de respect, non seulement pour l’instance, mais plus généralement pour le principe de représentation du personnel par ses élus syndicaux. Cette représentation est la base de nos débats et de nos avis, mais permet aussi la construction d’accords majoritaires. C’est possible, nous l’avons montré dans la dernière mandature ; ça le sera encore : travaillons-y ensemble.
L’importance de ce principe de représentation explique notre colère sur les conditions de déroulement des élections professionnelles. Nous avons vu bien sûr votre intervention lorsqu’il est devenu manifeste que la participation était catastrophique ; et nous vous en remercions. Mais les dégâts étaient déjà faits, dès les premiers choix sur la structuration du vote, qui ne prenaient pas en compte les spécificités de notre secteur ; ils ont été aggravés, il faut le dire, par le manque d’engagement de nombreux établissements pour le bon déroulement du scrutin national.
Pour tous les agents, aller au bout de l’application du protocole carrières et rémunérations
Le chantier de la LPR et du protocole carrière et rémunération est à poursuivre
Dans les derniers mois de la précédente mandature, nous avons fait beaucoup de travail sur les textes issus de la LPR et du protocole carrière et rémunération. Pour le Sgen-CFDT, ce chantier est loin d’être bouclé. La close de revoyure prévue par le protocole nous amènera à revenir sur la situation indemnitaire des enseignants des premier et second degrés affectés dans le supérieur : le Sgen-CFDT persiste à demander leur adhésion au RIPEC. La révision prévue par la LPR devrait être l’occasion d’accélérer et d’intensifier l’effort financier, et de permettre à l’ensemble du système d’enseignement supérieur et de recherche d’en bénéficier.
RIPEC et repyramidage des enseignants-chercheurs : une mise en place plus que bancale
Concernant les textes RIPEC et repyramidage des enseignants-chercheurs, les décrets rectificatifs ont été élaborés avant même que les remontées des premières campagnes ne soient terminées. Or, elles sont, malheureusement très instructives : les procédures d’évaluations et de décision prévues par les textes initiaux sont complexes, illisibles et souvent vécues comme arbitraires ; au point que les frustrations qu’elles créent masquent les avancées réelles que nous avons obtenues. Pour le Sgen-CFDT, il est indispensable que les décisions concernant l’avancement et les primes des enseignants-chercheurs retrouvent un caractère collégial : la nature et les spécificités de ces corps excluent tout processus purement hiérarchique. La relation entre instances nationales et locales doit également être repensée : la version initiale de ces textes ne cachait pas ses intentions d’effacer le rôle du CNU. Maintenant que cette page est tournée, repensons cet aspect afin que les deux niveaux d’évaluation mettent en commun leurs avantages et non leurs inconvénients.
Nous observons par ailleurs que l’application du protocole a été marqué par des problèmes de méthodes : le pilotage purement budgétaire, par le ministère, de certains points qui représentaient des avancées (revalorisation IFSE, dotation des nouveaux C et EC), ne trouve souvent pas son application sur le terrain : comment concilier l’autonomie des établissements (y compris l’espace laissé au dialogue social en leur sein) et l’application des politiques publiques qui sont discutées ici ?
BIATSS : de nombreuses problématiques persistent encore…
Pour les personnels BIATSS beaucoup reste à faire : la convergence indemnitaire, au sein des filières de l’ESR comme par rapport aux corps comparables de la fonction publique, reste un objectif extrêmement lointain. Le protocole PPCR, et notamment son engagement à ce que tous les agents puissent dérouler une carrière complète sur deux grades, est très loin d’avoir trouvé une application complète dans nos métiers (chercheurs et BIATSS) ; la fusion de grades au sein des corps d’IGR n’a pas résolu les questions liées à la fin de carrière des IGR dans le cadre de la promesse d’un espace statutaire commun IGR/CR/MCF ; des dissymétries persistent entre conservateurs des bibliothèques et leurs collègues du patrimoine ; et le positionnement du corps des ASI reste extrêmement problématique.
La question des moyens, toujours au centre de nos préoccupations.
La sous-dotation de l’ESR, un enjeu structurel
Nous ne pouvons passer sous silence la question des moyens. Le retard immense qui s’est accumulé en matière d’emploi n’est pas seulement (et c’est déjà beaucoup) un facteur de souffrance pour les agents, c’est aussi un enjeu structurel pour notre système d’enseignement supérieur et de recherche : la montée de l’enseignement supérieur privé, par exemple, y compris dans ses versions les plus prédatrices, est avant tout une conséquence de notre incapacité, faute d’agents de toutes catégories en nombre suffisants, à accueillir tous les étudiants dans des conditions satisfaisantes. De surcroit, nous savons qu’une grande partie de notre force de travail actuelle prendra sa retraite dans les dix prochaines années : en pinçant le flux des recrutements, on crée les conditions d’une perte de savoir-faire dans nos métiers, voie d’une impossibilité à conserver notre expertise. Il est indispensable d’anticiper ce phénomène parfaitement prévisible !
CROUS : un sous-effectif qui inquiète
Dans les CROUS également, la situation devient intenable en raison du blocage du plafond d’emploi, alors que les évolutions de la demande accentuent les besoins de main d’oeuvre : dans la restauration, multiplication de petites cafétérias qui fonctionnent avec des équipes très réduites subissant une pression considérable ; dans l’hébergement, l’activité se répartit de plus en plus sur douze mois ; pour les services sociaux, les besoins sont tout à fait évidents et les quelques postes supplémentaires qui ont été crées sont bien insuffisants ; et les services centraux ne parviennent plus à orchestrer tout cela. Il a de plus à assurer les nouvelles missions qu’on leur donne (gestion CVEC). Il faudrait, dès la rentrée prochaine, au moins 300 emplois supplémentaires dans le réseau des œuvres – et revoir en profondeur le modèle économique des CROUS.
Le dialogue social, outil de défense du service public
De nombreux autres sujets devront être abordés rapidement : la mensualisation du paiement des vacations, obligation légale qui tarde à être appliquée par les établissements, statut des ATER, qu’il est urgent de revaloriser, climat social détérioré dans certains établissements (l’INRIA en est un exemple criant)… De ces sujets, comme d’autres, nous devrons parler rapidement
Madame la ministre, nous croyons au dialogue social comme un moyen non seulement d’améliorer la situation des agents mais aussi de faire progresser le service public. Vous avez devant vous des organisations du personnel, dans leur diversité, qui ont des choses à dire, une expertise, des propositions. Nous vous encourageons, sur tous les sujets, à dialoguer avec elles, à les écouter et à les entendre. Le Sgen-CFDT, vous le savez, y est prêt.
La délégation Sgen-CFDT était composée de Christophe Bonnet, Laetitia Grimaldi et Christine Barralis (titulaires) et d’Elisabeth Sioudan-Devailly et Benoît Wolf (suppléants).