Dans une période où les décideurs font semblant de l'ignorer, le Sgen-CFDT juge essentiel de donner à voir la réalité du travail des CPE, notamment sur les activités relevant de l'éducation à la citoyenneté. La crise sanitaire perturbe largement l’exercice de la démocratie scolaire en lycée et LP.
Synthèse d’une large consultation menée auprès des CPE, notre article « Être CPE en temps de Covid – Acte II » (novembre 2020) témoignait de la dégradation de leurs conditions de travail en raison de la crise sanitaire (surcharge de travail, difficultés rencontrées dans l’exercice de leurs missions…).
Ce nouvel article porte plus spécifiquement sur l’exercice de la démocratie scolaire et les difficultés rencontrées pour sa mise en œuvre en lycée général et en lycée professionnel en raison de la crise sanitaire.
En lycée professionnel :
Une heure de vie de classe est de plus en plus difficile à mettre en place
Dans les lycées professionnels, la situation n’est guère plus favorable qu’en collège, l’heure de vie de classe y est rarement inscrite à l’emploi du temps des élèves car elle n’est pas considérée comme une priorité. De plus le nouveau référentiel de la voie professionnelle a rendu plus difficile la mise en place de l’Heure de vie de classe – HVC.
Or cette heure, dévolue à un temps d’échange entre le professeur principal et les élèves de la classe, représente un moment privilégié dans la régulation du climat de classe, des problèmes rencontrés, de la vie de l’établissement.
Des actions extrascolaires menées en lien avec les professeurs d’EPS
Cependant dans certains établissements tel le lycée de Joel (LP Hébert d’Evreux), les CPE parviennent à réaliser des actions avec les élèves et quelques collègues d’EPS (sorties VTT organisées le mercredi après-midi avec trois collègues de l’EPS, sorties Bowling, accrobranche ou Laser Game avant chaque petites vacances).
Les collègues impliqués dans ces actions reconnaissent aujourd’hui le changement de relation qu’ils entretiennent avec les élèves. Que ce soit du point de vue de l’apaisement des relations élèves/professeurs, de l’acceptation des sanctions par les élèves, et dans une certaine mesure de l’amélioration du climat scolaire. S’impliquer dans des actions adaptées aux publics accueillis est un bon investissement pour tout le monde. Les adultes gagnent en légitimité, leur autorité est confortée et moins contestée du fait même du temps passé avec ses élèves en dehors des cours et de la salle de classe.
En lycée général :
des actions interrompues dans de nombreux établissements…
En lycée général, la situation est différente. Dans de nombreux établissements toutes les actions prévues sont en suspens à l’exception de quelques unes parmi lesquelles : une collecte alimentaire au profit des Restos du Cœur (Olivier, Lycée de Périgueux), une collecte de produits animaliers au profit de la Ligue protectrice des animaux – LPA (Catherine, Lycée d’Armentières).
L’interdiction de regrouper les élèves, et pour les partenaires extérieurs (Aroeven, associations) l’impossibilité d’intervenir en établissement ont rendu impossible les temps de formation des élèves.
Quelques tentatives de réunion de délégués en mode visioconférences émergent mais ne parviennent pas à susciter l’émulation nécessaire à l’engagement des élèves.
… des projets variés poursuivies dans certains, malgré le contexte.
Deux exemples :
Au LPO Camille Sée de Colmar
Dans le lycée de Raphaela (LPO Camille Sée de Colmar), pour faire face aux multiples propositions des élèves, un mode opératoire a été retenu : un projet réunit un groupe de 4 à 5 élèves sous l’égide d’un pair « chef de projet ». La collègue CPE établit un point régulier avec les coordinateurs de projet, assure l’interface avec le chef d’établissement qui donne son accord, et avec les partenaires extérieurs.
Plusieurs projets sont ainsi réalisés : par les élu.es CVL (Père Noël secret, vente de cartes de Noël, vente de gâteaux, Chorale de Noël) ; par les éco délégués (Nature, Clean walk, etc…) ; par les lycéens de la MDL (Chasse au Père Noël, collecte de jouets, constitution de boîtes cadeaux pour une distribution aux plus démunis).
Enfin certains projets se réalisent grâce à l’action conjuguée des membres CVL et MDL, tels le projet Saint Valentin et le Bal des terminales en fin d’année.
D’autres projets sont en gestation car les élèves viennent régulièrement annoncer de nouvelles propositions à la collègue CPE : décoration du foyer, mise en place d’une friperie, d’un tutorat entre élèves, etc…). La plupart de ces actions sont conduites avec le soutien financier de la MDL et du CVL. La popularité de la MDL est telle qu’elle réunit plus de 300 élèves lors de son Assemblée Générale annuelle, les élèves impliqués dans ces structures rendent comptent chaque année des actions réalisées devant le Conseil d’Administration lors du bilan des activités.
au Lycée de l’Albanais à Rumily
Autre exemple d’établissement où les actions se poursuivent, le lycée de Marie-Luce (Lycée de l’Albanais à Rumily). En partenariat avec une association pour la préservation du tourisme en montagne, 5 à 6 collègues enseignants animent un groupe d’éco-délégués d’une quarantaine d’élèves.
En parallèle Marie-Luce anime depuis 6 ans un projet « Sentinelles et Référents » centré sur la lutte contre les discriminations et le harcèlement (les élèves sont sentinelles et les professeurs référents). Élaboré dans un esprit de co-construction entre élèves et professeurs, l’objectif de ce projet est de prévenir et sensibiliser les élèves sur ces thématiques, notamment grâce à l’acquisition de compétences psycho-sociales.
Depuis son lancement, la formation est désormais assurée en interne avec le concours d’un partenaire extérieur (centre socio-culturel). Des collègues et de nombreux élèves se sont emparés du projet au point que sa renommée a franchi les murs de l’établissement. C’est ainsi que les lycéens sont invités à animer des séances de prévention auprès de classes de CE2-CM1-CM2 ou de collèges du secteur.
Par ailleurs, la MDL, très investie, développe de nombreux projets (Défilé de Noël des 1200 élèves, Vente de roses à la Saint Valentin, Forum jobs d’été) avec le soutien d’une AED et d’un collègue trésorier de l’association.
Bilan :
Toutes ces actions à l’œuvre ont une incidence sur le climat scolaire de l’établissement car elles améliorent le bien vivre ensemble et favorisent les apprentissages.
Les conditions de réalisation de tous ces projets nécessitent l’existence de paramètres indispensables :
- une dotation en personnel vie scolaire appropriée tant du point de vue des CPE que de celui des AED,
- l’investissement des collègues enseignants (ils sont encore trop peu nombreux à s’y investir),
- le positionnement du/de la chef·fe d’établissement qui appuie et encourage les actions en les fédérant dans le volet des pratiques démocratiques et citoyennes inscrites au contrat d’objectif du projet d’établissement.