Dans le cadre des « élections professionnelles », la CFDT du ministère de l’agriculture fait le point sur le dossier des agents contractuels de l’enseignement supérieur agronomique et vétérinaire.
Quand « contractuel » rime avec précarité
La situation des agents contractuels au sein de l’enseignement supérieur agronomique, agroalimentaire, paysager et vétérinaire n’est pas « un long fleuve tranquille ». Pour la CFDT, elle se caractérise par une forte précarité, par un manque de perspectives de carrière, par trop peu de places offertes aux concours, par des conditions de travail parfois rudes, par la stagnation des rémunérations, bref une qualité de vie au travail dégradée.
Des budgets contraints
Le législateur a conféré une certaine autonomie de gestion à ces écoles. Celle ci, leur permet d’être réactives et de mener à bien des projets singuliers. Tout ne peut pas être géré par l’administration centrale, par définition éloignée des besoins de chaque école. Dans les faits, on constate une divergence de traitement des agents contractuels, au sein des différents établissements.
Pour la CFDT, la nécessaire autonomie ne doit pas générer des injustices. Les agents contractuels ne peuvent pas être la variable d’ajustement de politiques budgétaires marquées par un relatif manque d’ambition en matière d’enseignement supérieur et de recherche publics.
Agents contractuels, des conditions de travail qui se dégradent
Le baromètre social 2020 indique que la moitié des agents du ministère de l’agriculture, dont ceux de l’enseignement supérieur public considèrent que leurs conditions de travail se sont dégradées. Les agents envisagent avec pessimisme leur avenir.
Pour la CFDT, ces données reflètent la réalité. Il faut doter l’enseignement supérieur public de nouveaux postes pour le rendre plus attractif. Les conditions de travail, la qualité de vie au travail doivent s’améliorer pour attirer de nouveaux talents et pour faire reculer le turn-over.
Agents contractuels, des rémunérations qui stagnent
La grande majorité des agents contractuels voient depuis une dizaine d’années leur rémunération stagner. Les contrôles budgétaires sont stricts. Des règles peu favorables à la progression de la rémunération sont mises en place et suivies.
Les textes stipulent que « la rémunération d’un agent contractuel doit être réévaluée tous les 3 ans ». Si l’agent n’a aucun signe de « son » administration locale durant trois ans, il doit revendiquer un examen de son dossier, un entretien professionnel, c’est obligatoire. Cependant, les textes ne précisent pas comment faire sa demande de réévaluation et malheureusement, une jurisprudence du 30 mai 2012 précise que « réévaluation » ne signifie pas systématiquement « augmentation ».
Par ailleurs, on observe que les agents contractuels ont un régime indemnitaire jusqu’à 6 fois moindre que celui des fonctionnaires à missions équivalentes.
Pour la CFDT, le système actuel est préjudiciable à la fois aux agents et aux structures. Cet étau doit être desserré.
L’improbable CDI
L’accès au CDI après 6 années de « loyaux services » est trop souvent remis en cause pour des motifs parfois peu respectueux des personnes ou des règles. L’annonce du non renouvellement d’un CDD juste avant le passage en CDI est parfois réalisée alors que le poste et/ou la mission reste un besoin pérenne, ce qui entraine le recrutement d’un nouvel agent pour une succession de CDD.
La CFDT dénonce ces pratiques. Ce mode de gestion des ressources humaines masque un vrai manque de création de postes pérennes tout en maintenant la précarité en n’imposant de fait aucune réévaluation des salaires. Dans le secteur privé, la loi impose aux entreprises une durée des CDD ne pouvant excéder 18 mois. Au-delà, le CDD est requalifié en CDI. Mais avec une durée des CDD pouvant aller jusqu’à 6 ans, la puissance publique en tant qu’employeur est à ce niveau moins disant.
Des CDD qui s’enchainent et durent une éternité ?
Cette situation n’est pas soutenable. De plus en plus d’agents contractuels, récemment recrutés, une fois formés, recherchent de meilleures conditions de traitement à l’extérieur des écoles, alors même que ces derniers ont supporté les charges de formation de ces agents. Ce turn-over croissant est défavorable aux établissements. Ce système de gestion RH impose aux équipes en place de devoir recommencer la formation des nouveaux agents, ce qui se traduit par des pertes de temps, de motivation et d’efficacité de l’équipe.
La répétition de la situation conforte l’idée fausse que tout agent est interchangeable. Comme si ces missions n’exigeaient aucune compétence spécifique ! L’absence de reconnaissance des compétences acquises est souvent ressentie comme une forme de dénigrement qui sape progressivement la confiance en soi des agents tant qu’agents contractuels que titulaires. C’est un facteur de dégradation de la qualité de vie au travail et vecteur de risques psycho-sociaux. Les compétences des collectifs concernés, au mieux, stagnent.
Pour la CFDT, ce mode de management génère des coûts indirects qui sont supérieurs aux économies faites ponctuellement.
Et la Loi de Transformation de la Fonction Publique ?
Elle a bien apporté quelques améliorations :
- portabilité des contrats
- possibilité d’embaucher directement en CDI
- prime de précarité pour les contrats courts.
Le recours à l’emploi précaire par l’embauche d’agents contractuels en lieu et place de fonctionnaires est maintenant autorisé par la loi.
La CFDT l’a dénoncé. Même le contrat de projet dont nous voulions qu’il devienne au minimum un CDI de projet reste un contrat précaire dont la durée est inférieure ou égale à 6 ans.
Des places aux concours trop peu nombreuses
Les concours sont-ils une solution ? En théorie oui, en pratique « pas vraiment ».
Les places offertes aux concours sont très réduites au regard du nombre d’agents contractuels pouvant y postuler. Pour les lauréats, la faible prise en compte de l’expérience professionnelle entraîne souvent un reclassement à un indice inférieur.
Pour la CFDT, c’est inacceptable. La CFDT demande la prise en compte des 2/3 de l’expérience professionnelle. La Fonction Publique a besoin de personnels compétents et qualifiés. Il est nécessaire de revoir le décret qui régit le reclassement.
Ce que veut la CFDT :
- permettre aux agents contractuels, avec ancienneté. Accéder au statut de fonctionnaire par une évaluation complète (style RAEP) validant leurs compétences au regard de celles attendues d’un fonctionnaire pour des missions identiques,
- un meilleur accès à la formation initiale et continue,
- des rémunérations révisées à la hausse et au moins tous les 3 ans. Adossées à un dispositif de réévaluation équitable pour les catégories A, B et C,
- des primes justes et versées en toute transparence, plus de justice dans le traitement (rémunération, reconnaissance, respect…) des agents contractuels qui assurent les mêmes missions que les titulaires,
- l’accès aux aides et à l’action sociales dans les mêmes conditions que celles accessibles aux agents titulaires et contractuels d’État,
- la prise en compte de critères plus contraignants pour les agents contractuels dans la politique d’égalité Femme/Homme.