La loi autorisait jusqu’ici la possibilité pour un agent de la fonction publique à temps complet de cumuler des activités accessoires avec son activité principale, sous réserve d’un accord de sa hiérarchie. Cette autorisation préalable serait supprimée par la LPPR.
Cette disposition d’autorisation préalable pour le cumul d’une activité accessoire concerne entre autres les heures complémentaires faites par les enseignants-chercheurs hors de leur établissement d’affectation, mais elle a une portée beaucoup plus large : il peut s’agir d’une activité d’expertise, d’une activité sportive ou culturelle, de travaux de faible importance, etc. La loi LPPR (Loi de Programmation Pluriannuelle pour la Recherche) en préparation proposerait de supprimer cette autorisation de cumul a priori, pour ne garder qu’un contrôle a posteriori. |
Quels sont les enjeux d’une telle autorisation ?
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L’enjeu pour le calcul du temps de travail des enseignants-chercheurs
La question est particulièrement complexe pour les enseignants-chercheurs, dans la mesure où le temps consacré à la recherche n’est pas facilement quantifiable. D’autre part, si on considère qu’il y a pour un poste d’EC un mi-temps recherche et un mi-temps enseignement, ce dernier ne se limite pas aux temps de cours (qu’il s’agisse du temps en face à face avec les étudiants, du temps de préparation en amont…), mais il comprend aussi un accompagnement des étudiants. Il est donc important que ces activités accessoires correspondent effectivement à du temps supplémentaire, même si on sait bien que dans leur ensemble, les collègues rognent largement sur leur temps personnel pour tout assurer.
Par ailleurs, à un moment où nous disons tous –à juste titre- que nos obligations de service sont déjà très lourdes, et qu’il faut créer des emplois pour éviter cette surcharge, il n’est pas simple par ailleurs de réclamer la possibilité de cumuler d’autres activités supplémentaires.
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L’enjeu en matières d’affectation des postes d’enseignant-chercheur
Ensuite, cela pose la question du potentiel en termes de postes affectés à un établissement. En effet, si ces cumuls d’activité se font dans d’autres établissements, l’université concernée voit son potentiel diminuer au profit d’un autre établissement, sans il y ait nécessairement collaboration dans le cadre d’une politique de site par exemple. Ainsi, un établissement qui souhaite développer un projet pourrait être en difficulté pour mettre en œuvre ce projet si les agents préfèrent des activités complémentaires ailleurs. On connaît tous des établissements qui ne fonctionnent que grâce à l’apport en personnel de l’université voisine ! D’autre part, les activités libérales peuvent aussi requérir un nombre d’heures important et impacter de facto le temps disponible pour les activités correspondant à l’emploi principal dans l’établissement.
Et un contrôle a posteriori ?
L’idée d’un contrôle a posteriori n’est pas forcément orthogonale au corpus de la CFDT, et il permet d’introduire davantage de souplesse dans le dispositif. Mais cela implique qu’on puisse réaliser ce contrôle correctement, autrement dit cela suppose la définition d’une norme, pour que les agents puissent savoir ce qui reste « raisonnable ». Sinon, que fait-on si un agent déclare après coup une activité hors université importante ? Car que la notion d’«activité accessoire » ne précise pas à quel niveau se situe l’accessoire…
Une solution pourrait par exemple consister à définir un plafonnement financier du cumul autorisé, comme c’est le cas pour certaines activités d’expertise dans le public (afin de couvrir l’ensemble des cas de cumuls), et remplacer cette autorisation de cumul préalable par une déclaration a posteriori, tant qu’on rentre dans ce plafond. Tout déplacement du plafond devrait par contre donner lieu à une autorisation préalable, à charge pour les directions des établissements de ne pas se contenter de signer automatiquement. Et tout dépassement a posteriori du cumul autorisé, en particulier s’il n’est pas déclaré, devrait relever de la fraude, et être traité en tant que tel, pour avoir un effet dissuasif (l’obligation de rembourser la rémunération principale pendant la période de cumul non déclaré par exemple pourrait constituer la sanction ultime en cas de dépassement important).
Donc pour le Sgen-CFDT, l’abrogation du décret du 27 janvier 2017 pose un certain nombre de questions : il n’est pas possible de n’exercer aucun contrôle, compte tenu des différents éléments exposés ici, et un contrôle a posteriori suppose un certain nombre de précautions, pour être réellement utile. C’est pourquoi la suppression du décret de 2017 nous paraît potentiellement lourde de conséquences.