La réforme de l'évaluation des personnels du premier et du second degrés avec les rendez-vous de carrière d'une part et l'accompagnement professionnel d'autre part est de nature à faire évoluer les relations entre les personnels d'enseignement, d'éducation et d'orientation et les corps d'inspection.
Le Sgen-CFDT porte depuis longtemps un regard critique sur le rôle confié aux corps d’inspection dans l’éducation nationale. Nous ne confondons pas le rôle confié avec l’exercice réel du métier par les inspecteurs∙trices.
Le modèle actuel de l’inspection individuel est insatisfaisant
Jusqu’à présent le modèle officiel de l’inspection individuel rabat l’évaluation des pratiques professionnelles des enseignant∙e∙s sur l’observation d’une heure de cours, la consultation des documents et affichages pédagogiques des professeur∙e∙s, de copies corrigées et des supports des élèves. Un entretien porte ensuite le plus souvent sur ces seuls éléments même si de nombreux∙ses inspecteur∙trice∙s en élargissent le spectre. Ces observations se traduisent par un rapport d’inspection et une notation chiffrée. Pour le Sgen-CFDT ce dispositif institutionnel n’est pas satisfaisant.
- Ce n’est pas satisfaisant pour les personnels évalués qui pouvaient parfois se sentir infantilisés par ces modalités d’évaluation.
- Ce n’est pas satisfaisant pour les personnels d’inspection qui considèrent que ces modalités d’évaluation ne leur permettaient pas de faire pleinement le travail qu’ils et elles souhaitent mener avec les personnels, ne disaient pas la réalité du travail d’accompagnement que les personnels d’inspection peuvent mener auprès des enseignant.e.s.
- Ce n’est pas satisfaisant pour le système éducatif car les tensions persistantes autour de ces modalités institutionnelles d’évaluation très connectées au déroulement de carrière et trop peu liées à l’accompagnement vers l’évolution des pratiques, trop peu liées à l’analyse de pratiques par les enseignant∙e∙s.
Inspecteurs∙trice∙s et enseignant∙e∙s ont à gagner dans l’évolution des modalités d’évaluation. La réforme proposée est de nature à permettre à celles et ceux qui ne se satisfont pas des modalités actuelles d’évaluation de mettre en œuvre des pratiques constructives sans avoir à contourner l’esprit des règles institutionnelles.
Retour sur la nouvelle circulaire de mission
À l’automne 2015, une nouvelle circulaire de mission des inspecteurs∙trices est parue. Elle insiste sur leur rôle dans l’accompagnement pédagogique des personnels et des équipes.
Cette évolution convient au Sgen-CFDT, officialisant, institutionnalisant plus fortement le fait que l’action des corps d’inspection ne se réduit pas aux inspections individuelles en classe.
Pour autant, les inspecteurs∙trice∙s constatent que leur hiérarchie n’a pas suffisamment pris la mesure des évolutions de leurs missions. Ils et elles ont surtout le sentiment que leur charge de travail est trop forte pour permettre un engagement satisfaisant dans l’accompagnement.
Ce que souhaitent les inspecteurs∙trice∙s du Sgen-CFDT
Les inspecteurs∙trice∙s du Sgen-CFDT souhaitent la déconnexion entre leur activité d’inspection et le déroulement de carrière des enseignant∙e∙s. La connexion inspection/avancement d’échelon, telle qu’elle existe jusqu’à présent, oblige trop souvent à un plan de travail d’inspection en ayant le regard rivé sur les perspectives de changement d’échelon de chacun∙e des enseignant∙e∙s. Nous préférons un système qui permet de rencontrer, d’observer les pratiques et de travailler sur le plan pédagogique non pas seulement avec des individus mais avec des équipes. Nous préférons le faire non pas pour influer sur le déroulement de carrière mais pour accompagner des évolutions professionnelles, pour travailler sur les objets professionnels identifiés par les équipes.
La réforme proposée par le ministère concernant l’évaluation des enseignants repose sur deux éléments distincts : l’accompagnement professionnel et les rendez-vous de carrière.
Du côté de l’accompagnement
Le ministère institue un accompagnement professionnel pour toutes et tous, et pour les équipes. Il a donc à la fois une dimension individuelle et une dimension collective. Il est de nature pédagogique et de nature RH. Il est déconnecté du déroulement de carrière.
Le ministère prévoit que les corps d’inspection fassent partie des acteurs de l’accompagnement. Dans ce cadre, les inspecteurs∙trices pourront observer des pratiques en classes que ce soit sur leur proposition, soit à la demande des enseignants. La visée ne sera pas alors l’évaluation des individus mais le conseil, l’accompagnement d’évolution de pratiques, pour permettre à chaque élève de réussir. L’observation en classe n’est pas la seule modalité d’accompagnement pédagogique. Il peut aussi se traduire par des réunions de travail sur des questions pédagogiques.
Les corps d’inspection ne sont cependant pas les seuls acteurs de l’accompagnement. Il faudra coordonner les différents acteurs y contribuant : formateur∙trice∙s académiques, conseiller∙ère∙s pédagogiques, formateur∙trice∙s ESPE, chef∙fe∙s d’établissement, mais aussi, comme le souhaite le Sgen-CFDT, les enseignant∙e∙s entre pairs.
Du côté des rendez-vous de carrière
Les corps d’inspection sont aussi partie prenante du déroulement des rendez-vous de carrière.
Du côté de l’équilibre des missions et de la charge de travail
Le Sgen-CFDT a annoncé son accord avec les principes de cette réforme de l’évaluation qui distingue donc une évaluation formative (l’accompagnement professionnel) d’un côté, et l’évaluation connectée – mais moins qu’avant – à la carrière (les rendez-vous de carrière). Nous déplorons toutefois le fait que l’idée d’un réel bilan professionnel réalisé par l’enseignant se soit transformé en la recommandation de préparer son rendez-vous de carrière. Pour le Sgen-CFDT, préparer son rendez-vous de carrière, formaliser son regard sur sa propre pratique est une réflexivité féconde et qui rend les personnels acteurs de leur évaluation.
Toutefois le fait que la structure du document de référence soit le cadre commun de déroulement des entretiens professionnel doit permettre aux enseignant∙e∙s et aux inspecteur∙trice∙s de nouer sur des bases plus riches leur échange professionnel.
Pour le Sgen-CFDT les principes de la réforme sont de nature à modifier les rapports entre les enseignant∙e∙s et les inspecteur∙trice∙s de manière intéressante.
Pour le Sgen-CFDT, cette réforme est aussi de nature à transformer le rapport de notre système éducatif à sa propre évaluation et les corps d’inspection n’en seront pas les seuls acteurs ou initiateurs.
Cependant, le Sgen-CFDT rappelle au ministère que les corps d’inspection ont d’ores et déjà une charge de travail élevée, trop élevée pour que toutes et tous aient la satisfaction d’assurer leurs missions aussi bien qu’ils le souhaitent. Nous avons aussi rappelé à quel point le taux d’encadrement pédagogique par les corps d’inspection variait d’un territoire à l’autre, d’une discipline à l’autre. La charge n’est pas de même nature non plus selon qu’il y a plus ou moins de personnels enseignants entrant dans le métier ou non titulaires, et dans le premier degré, les tâches administratives pèsent de plus en plus lourds sur les équipes de circonscription. Le Sgen-CFDT demandait donc des créations de postes dans les corps d’inspection. Le projet de loi de finance 2017 prévoit la création de 50 postes d’IA-IPR. Le Sgen-CFDT sera vigilant quant à leur répartition. Il faut tenir compte de la réalité et de la complexité des missions des inspecteurs∙trices pour répartir ces créations. Par ailleurs, le Sgen-CFDT rappelle que s’il y a urgence à rééquilibrer la charge de travail des IA-IPR selon les disciplines et les académies, il faudra aussi créer des postes d’IEN pour faire évoluer le fonctionnement global de l’évaluation et de l’accompagnement.