Promulguée en décembre 2021, la Loi Rilhac instaurant un emploi de directeur attendait toujours certaines déclinaisons réglementaires. Le 29 mars 2023, le ministère a présenté trois projets de décrets aux organisations syndicales.
Ces textes ne seront promulgués qu’à l’issue d’un processus de consultation des organisations syndicales représentatives, groupes de travail, CSA et CSE. A chacune de ces étapes, la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques (ex Sgen-CFDT) proposera des améliorations et des clarifications de ces textes par un processus d’amendements.
Que contiennent les décrets à ce stade ?
Les décrets portent sur les missions des directeurs et directrices d’école, les conditions d’accès à la fonction (via l’inscription sur une liste d’aptitude et l’évaluation des directeurs et directrices) et la traduction concrète de l’avancement de carrière accéléré prévu par la Loi Rilhac.
La fonction de directeur et directrice fait son entrée dans le code l’éducation
Les articles du décret portant sur les missions des directeurs et directrices d’école seront intégrés au code de l’éducation.
Le « directeur d’école » était jusqu’à présent absent, ou seulement cité de manière indirecte dans ce recueil de textes législatifs et réglementaires qui sert de référence dans le domaine de l’éducation.
L’introduction de l’emploi de directeur et directrice dans le Code de l’éducation via un décret qui doit être validé en Conseil d’État n’est pas seulement symbolique. C’est la marque d’une véritable reconnaissance des responsabilités et des missions des directeurs et directrices.
C’est l’affirmation de sa légitimité en tant que pilote pédagogique de l’école, responsable de l’organisation collective et représentant de l’équipe pédagogique vis à vis des partenaires de l’école.
On reconnaît enfin leur rôle essentiel pour le bon fonctionnement de l’école.
Une reconnaissance qui devra se traduire dans le quotidien des directeurs et directrices
Tous les partenaires de l’école vont devoir prendre la mesure de cette évolution dans leurs pratiques professionnelles. L’IEN reste, néanmoins, le supérieur hiérarchique direct de tous les enseignants, (directeurs, directrices et adjoints).
Les directeurs et directrices vont de leur côté devoir apprendre à se prévaloir de cette légitimité professionnelle et fonctionnelle auprès de leurs interlocuteurs (collectivités locales, partenaires de l’école mais aussi IEN).
Leurs prérogatives, identifiées dans le référentiel métier de 2014, seront ainsi renforcées.
Trois types de missions
Contrairement à ce que certains affirmaient lors de l’adoption de la loi Rilhac et que certains affirment encore après la lecture de ces décrets, le rôle de pilote pédagogique du collectif reste central.
Le décret portant sur les missions des directeurs et directrices porte sur :
– Les missions relatives au fonctionnement de l’école
– Les missions relatives au pilotage pédagogique de l’école
– Les missions relatives aux partenaires de l’école
Le texte reprend pour l’essentiel des prérogatives déjà présentes dans le décret de 1989 qu’il remplace, mais les organise mieux et les met en cohérence. Lors de la présentation des textes aux organisations syndicales, la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques a demandé que certaines formulations soient actualisées et/ou précisées pour ne pas laisser place à des interprétations divergentes.
Nous avons également demandé que des références à la consultation du conseil des maîtres soient ajoutées.
Un avancement accéléré de trois mois par année d’exercice
C’est plus du côté statutaire que les modifications sont les plus marquantes
Si le directeur, la directrice reste dans son corps d’origine, il/elle pourra bénéficier d’un avancement de carrière de trois mois par année d’exercice à compter de septembre 2023.
Cette accélération de carrière concernera aussi les faisant fonction qui occupent un poste de direction d’école.
D’autre part, si un directeur, une directrice quitte sa fonction pour redevenir adjoint, il conservera l’avancement passé et retrouvera une progression au rythme normal de la grille d’avancement des professeurs des écoles.
En l’état, la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques regrette que cette reconnaissance de l’exercice de la fonction ne puisse bénéficier aux directeurs et directrices déjà en place de façon rétroactive et demandera de faire évoluer le texte en ce sens.
Une formation pour appréhender le métier avant de postuler à la liste d’aptitude
Les dispositions de la Loi sur l’accès à la liste d’aptitude obligent le Ministère à instaurer un article pour la mise en œuvre d’un module de formation à la direction préalable à la demande d’inscription.
Pour la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques, c’est un moyen de prendre la mesure de ce que recouvre la fonction. Restera à ce que cette formation se fasse bien sur le temps de service des enseignants ce qui risque de poser des questions sur sa mise en œuvre.
Comme le prévoit aussi la Loi, Il faudra d’autre part organiser des temps de formation continue pour la direction. Le Ministère entend mettre en œuvre une politique dédiée à la direction basée sur les besoins identifiés.
Pour la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques, il faut sortir du mode informatif des temps de regroupement des directions d’école et développer une politique de formation basée sur les besoins des personnels, échanges de pratiques, échanges entre pairs.
Être évalué de façon régulière sur l’exercice du métier : une obligation prévue par la Loi
Les décrets instaurent une évaluation trois ans après la prise de fonction d’un directeur, d’une directrice d’école puis de façon régulière tous les cinq ans.
Pour la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques, il s’agit plutôt de mettre en place un entretien professionnel régulier comme cela existe dans toutes les fonctions publiques.
Un directeur, une directrice doit en effet pouvoir exprimer au cours de ce temps ses envies professionnelles ses réussites, mais aussi ses appréhensions, ses difficultés éventuelles. Cet entretien doit pouvoir lui permettre de faire un point à un moment T de sa carrière, envisager la poursuite de son parcours professionnel, d’échanger sur les possibilités offertes par l’Institution.
C’est aussi une forme de reconnaissance du métier de directeur, de directrice, un métier à part entière qui nécessite des compétences et des connaissances spécifiques.
Un calendrier fixé
Le Ministère entend présenter les décrets pour le CSAMEN et le CSE de mi mai avant de proposer au Conseil d’Etat.
Ce dernier aura ensuite entre un et deux mois pour se prononcer. Dans tous les cas, les décrets devraient être promulgués au plus tard fin juillet pour une mise en application à la rentrée 2023.
Un nouveau groupe de travail devrait avoir lieu en avril prochain afin de peaufiner leur écriture. La CFDT Éducation Formation Recherche Publiques y portera des propositions de réécritures et d’évolutions pour répondre aux besoins exprimés tant par les directeurs et directrices d’école que par les équipes pédagogiques.
Un rôle affirmé dans un collectif de travail
Ces décrets conformément à la Loi affirment bien la professionnalité de la fonction et son rôle central dans l’organisation du fonctionnement de l’école, dans le pilotage pédagogique et les relations avec les partenaires.
Il renforce le lien traditionnel entre le directeur/la directrice et les autres membres de l’équipe pédagogique en leur donnant un réel pouvoir d’agir sur leur collectif de travail.
Ces décrets n’instaurent pas un petit chef comme certains le disent mais réaffirment les missions et les responsabilités associées à l’exercice de la direction d’école.