La loi de refondation vise la réussite de tous, en particulier à l'école primaire. Elle fixe comme objectif essentiel l'acquisition du socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Celui-ci est central dans la définition des programmes et des parcours.
Plus de maîtres que de classes : un dispositif réclamé de longue date par le Sgen-CFDT
Les pratiques pédagogiques doivent s’adapter aux situations rencontrées. Pour cela, des dispositifs sont prévus et doivent s’articuler entre eux pour garantir une action cohérente et efficace. Le « Plus de maîtres que de classes » est un des dispositifs auquel des moyens spécifiques sont attribués pour atteindre cet objectif.
L’idée d’avoir des maîtres supplémentaires pour travailler autrement n’est pas nouvelle. Dès 1977, le Sgen-CFDT adopte au congrès de Grenoble une résolution visant à mettre en œuvre de nouvelles pratiques pédagogiques. Il ne s’agit pas de rajouter un enseignant dans une école pour faire avec 6 enseignants ce qui était fait à 5. Il s’agit bien de promouvoir d’autres organisations du travail pour prévenir la difficulté scolaire, en particulier au cycle 2 et en priorité dans les réseaux d’éducation prioritaire. Pour le Sgen-CFDT, il faut un accompagnement attentif et bienveillant, une formation des équipes qui doivent profiter d’un pilotage efficace tant national que local.
UN MAÎTRE + AU SERVICE D’UN PROJET
Une organisation pédagogique différente fondée sur un projet
Le dispositif « Plus de maîtres que de classes », c’est permettre une organisation pédagogique différente en appui d’un projet. Celui-ci doit être cohérent avec le projet d’école pour sortir du fonctionnement actuel « une année, un maître, une classe, un niveau ». Mais il ne doit pas pour autant se substituer avec d’autres dispositifs ou d’autres aides comme celles apportées par les Rased aux élèves en grande difficulté. C’est pourquoi le maître supplémentaire n’est pas un spécialiste de la difficulté scolaire mais un membre à part entière de l’équipe.
Une remise en question des pratiques
Le projet implique donc que les équipes remettent en question leurs pratiques quotidiennes, partagent la responsabilité de la classe, voire remettent en cause l’organisation de l’école. Mais, changer ses pratiques et ses modes d’organisation nécessite du temps pour permettre de travailler ensemble, se coordonner, faire le point sur les projets en cours, échanger sur les élèves. Cela suppose aussi que les collègues soient accompagnés et bénéficient de formations.
Enfin, il ne faut pas oublier que toute action pédagogique sera d’autant plus efficace si l’on peut associer à la démarche les parents qui sont les responsables de l’enfant et les premiers éducateurs…
UN MAÎTRE + DANS UNE ÉQUIPE
Pour le Sgen-CFDT, le maître + n’est pas un enseignant à part. Il est membre à part entière de l’équipe à laquelle il apporte, comme les autres collègues, ses compétences et ses idées. Mais, travailler ensemble et de manière efficace s’apprend. Il ne faut pas avoir peur de la confrontation, de la concertation, de l’échange, du regard de l’autre. C’est parce que le travail d’équipe touche le cœur de la relation pédagogique, le partage entre collègues, qu’il peut déstabiliser les habitudes de travail.
La réussite du dispositif « Plus de maîtres que de classes » est donc conditionnée à l’implication de toute l’équipe dans le projet. Cela signifie que le dispositif sera d’autant plus efficace si les équipes en sont à l’initiative. Le travail d’équipe suppose un effort personnel et des compétences qui s’acquièrent, par la formation mais aussi peu à peu à partir d’une volonté de cohésion et d’organisation. C’est la réflexion collective qui permet d’adapter localement le dispositif aux besoins des élèves.
Ainsi, le pilotage ne doit pas apparaître comme un contrôle de conformité à une réponse institutionnelle au risque de devenir contre-productif. Il nécessite de faire confiance aux équipes enseignantes et de reconnaître l’autonomie des écoles. Actuellement, celle-ci est conditionnée à des éléments externes qui en limitent l’efficacité. Une véritable autonomie des équipes nécessite d’avoir une structure démocratique dont les missions sont clairement fixées et évaluées.
UNE ÉQUIPE STABLE AVEC UN MAÎTRE +
Pour le Sgen-CFDT, l’attribution des moyens de carte scolaire doit se faire en trois volets : une partie en fonction du nombre d’élèves, une autre en fonction de la situation sociale des élèves accueillis et la dernière en fonction de projets.
Un projet collectif et mobilisateur
En effet, s’engager dans un projet tel que le dispositif « Plus de maîtres que de classes » mobilise les collègues et ceux-ci ne le feront que s’ils ont la garantie d’une stabilité du poste qu’ils occupent, qu’il s’agisse du maître + mais aussi des autres collègues. Ils doivent pouvoir choisir ensemble la mission qui leur convient au sein de l’équipe tout en gardant leur poste.
Le travail à mener suppose de la confiance pour apprendre à se connaître et travailler ensemble. C’est pourquoi il faut donner du temps aux collègues pour permettre la réussite du dispositif. Les 6 jours de travail collectif offerts aux REP+ ouvrent cette voie… La durée d’affectation sur ces postes ne peut pas être inférieure à la durée du projet d’école dans lequel s’insère le projet « Plus de maîtres ».
Laisser des marges de manœuvre aux équipes locales
Cependant, pour le Sgen-CFDT, il ne s’agit pas de tout régler et définir cela au niveau national. La réalité le montre : les modalités sont très différentes d’un département à un autre. Pour que les collègues s’engagent, il faut que les conditions pour postuler sur un poste de maître + soient connues en amont : projet, conditions d’exercice, sujétions spéciales. Il faut aussi que les membres de l’équipe puissent avoir une garantie sur les moyens de carte scolaire sur la durée du projet.
Les conditions d’exercice sont, en partie, définies dans les textes ministériels. Mais il y a aussi des marges de discussion au niveau local. Pour le Sgen-CFDT, c’est par un dialogue social transparent et constructif avec les organisations syndicales dans le cadre des comités techniques départementaux que l’on pourra favoriser de bonnes conditions de travail aux collègues qui veulent s’engager.
Qu’il s’agisse du choix de l’implantation des postes, de l’accompagnement des équipes, du nombre d’élèves aidés ou de l’articulation des différentes aides mises en place, la réflexion doit permettre à tous cohérence et complémentarité des actions pour la réussite des élèves.
UN MAÎTRE + POUR DIVERSIFIER LES ORGANISATIONS PÉDAGOGIQUES
Un maître + dans une équipe permet de mettre en place plus aisément des pratiques pédagogiques ou organisations différentes. Cela peut avoir un impact sur l’organisation spatiale des classes, l’optimisation des outils numériques, le fonctionnement quotidien dans la classe.
Ainsi, un travail en binôme est possible dans la même classe (co-enseignement) ou une prise en charge de groupes de besoin dans des lieux différents (co-intervention). Plusieurs cas de figures sont possibles pour chacune de ces modalités, qui ne sont pas figées et peuvent évoluer au cours de l’année. La présence d’un maître + permet de travailler plus en atelier et proposer de multiples situations qui permettent à l’élève d’être en position d’acteur de ses apprentissages.
Dans le cadre du fonctionnement d’un cycle, un maître + permet de mettre en place le tutorat d’un groupe d’élèves plus réduit par un enseignant tout au long du cycle pour mieux prendre en compte les rythmes d’apprentissage des élèves.
Mais, pour le Sgen-CFDT, la question n’est pas tant de savoir si une organisation doit être privilégiée par rapport à une autre, mais bien de permettre aux équipes de co-préparer et d’arrêter les modalités d’intervention les plus efficientes.
ASSOCIER LES PARENTS
L’importance de rencontres régulières est aujourd’hui évidente pour tous les acteurs de l’école. L’élève a besoin d’être reconnu dans sa globalité en tant qu’enfant et cela passe par la reconnaissance de la place des familles dans leurs apprentissages. Les parents sont les premiers éducateurs et responsables de l’enfant. Il est donc nécessaire de favoriser au maximum les liens réguliers école – famille, d’instaurer le respect et la confiance réciproques indispensables à la réussite des élèves.
Dans le cadre du dispositif « Plus de maîtres que de classes », cela nécessite de travailler en amont avec les familles pour expliquer les démarches envisagées. Le fait d’avoir un enseignant référent dans l’école sur plusieurs années (cf. chapitre ci-dessus) est un élément devant faciliter le dialogue afin de créer un véritable partenariat de confiance dans la durée. Pour cela, il est indispensable que ces heures de rencontre soient reconnues.
UN DISPOSITIF QUI DOIT ÊTRE PÉRENNISÉ
Certains peuvent estimer qu’il suffirait de baisser les effectifs par classe pour permettre la réussite de tous les élèves. La réalité est plus complexe et la nécessité d’avoir d’autres formes de travail pédagogiques est aussi importante. Le dispositif « Plus de maîtres que de classes » rentre dans le cadre de ce « travailler autrement ». Mais, pour assurer la pérennité d’un tel dispositif, il est important de l’évaluer pour contribuer à son amélioration.
Pour le Sgen-CFDT, ce serait une erreur de vouloir mener une évaluation sur le court terme. Construire et mener un projet, le mettre en œuvre, l’ajuster si besoin, suppose de laisser le projet aller à son terme. Par contre, il est important de clarifier dès le départ ce qui doit être évalué : le dispositif lui même, les modifications dans les pratiques pédagogiques, la réussite des élèves, le soutien aux équipes, l’impact sur le fonctionnement du service public, tous ces éléments ?
Quels que soient les objectifs du projet, l’évaluation nécessite des regards croisés : celui des élèves par l’amélioration de leurs acquis, celui des équipes enseignantes par l’impact qu’a eu le dispositif sur leurs pratiques pédagogiques, celui de l’institution pour mesurer la pertinence des accompagnements et formations mis en place. Les travaux de la recherche sont aussi essentiels pour croiser plusieurs paramètres et indicateurs.