Le déplacement des épreuves de spécialité (EDS) de mars en juin n’épuise pas tous les sujets de mécontentements sur la réforme. Ce changement ouvre de nouvelles interrogations : notamment comment boucler un programme très lourd et ambitieux tout en préparant le grand oral 2024 ?
Changer le grand oral 2024 ? Le bon sens comme politique éducative ne donne pas toujours les résultats escomptés.
Une nouvelle épreuve avec des objectifs mal définis
Le grand oral à peine installé dans le nouveau paysage du bac, ses règles changent déjà. La dernière partie permettant la discussion sur le projet de l’élève est supprimée. Le format sera donc désormais 10 minutes de présentation et 10 minutes de questions.
C’est encore un changement dans la précipitation, qui répond à une critique (les 5 dernières minutes sur le projet des élèves) mais apporte encore plus d’interrogations… en tout cas à celles et ceux qui souhaitent donner du sens à cette nouvelle épreuve et à sa préparation.
A contrario, les alertes déjà évoquées sur l’articulation de ce grand oral avec l’oral de projet en voie technologique (et tout particulièrement STI2D) ne sont toujours pas entendues.
Comme toute cette réforme, cette nouvelle mesure est prise avec une légèreté qui met les personnels et les élèves en difficulté. Annoncé en août, publié fin septembre, tout se passe une fois encore comme s’il suffisait de changer les procédures pour que tout se passe bien. Mais les personnels ont besoin de comprendre et de s’approprier les enjeux et les objectifs des épreuves pour pouvoir préparer les élèves au mieux. Ceci, afin de les intégrer dans une démarche d’apprentissage plus vaste.
La CFDT Éducation Formation Recherche Publiques (ex Sgen-CFDT) ne demandait pas la suppression des 5 dernières minutes. D’une part, cela commençait à faire sens, puisque les élèves sur ce temps-là ne pouvaient ni utiliser Chat GPT, ni Tiktok. D’autre part cela constituait un temps de parole assez libre qui permettait justement d’évaluer les compétences orales, et notamment « l’engagement » dans la prise de parole. Bien entendu contrairement à ce qui a été caricaturé, ils n’étaient pas évalués sur leur orientation, mais sur une réflexion et un recul sur leur parcours passé et futur. Ce qui n’avait rien d’absurde.
Un grand oral 2024 dissous dans les EDS ?
L’annonce de l’augmentation du poids des connaissances dans ce grand oral 2024 est un choix discutable. En effet, avec le retour des épreuves de spécialités en juin, les contenus disciplinaires ne seront-ils pas déjà évaluées durant ces épreuves ? Si cela pouvait se concevoir avec des épreuves en mars, la redondance des compétences évaluées de type « maitrise de connaissances » (même si c’est à l’oral plutôt qu’à l’écrit) ne fait pas sens.
Quant à revenir sur un oral de type T.P.E., c’est un peu tard pour la session 2024. Et cela poserait la question de l’évaluation d’un éventuel support, ou de sa faisabilité. Le ministère n’est d’ailleurs pas allé jusque là. La possibilité d’utiliser le tableau pour répondre aux questions conviendra en particulier aux évaluateurs de mathématiques et de physique chimie. Mais cela peut ouvrir aussi la porte à des dérives. On peut craindre aussi une préparation a minima, le plus tard possible, dans les interstices laissés pour la préparation aux EDS.
Faire et défaire sans bilan préalable
C’est parce que ces changements incessants sont épuisants que la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques avait demandé une année de « repos » sur cette réforme. Cela aurait permis de :
- pouvoir prendre enfin le temps d’un vrai bilan,
- refaire consensus sur les objectifs à atteindre,
- former les personnels à une version stabilisée,
- donner de la visibilité (à défaut de lui donner de la valeur…) à ce nouveau bac.
Le ministère a souhaité répondre à certaines critiques. Même si cela peut s’entendre, la précipitation bouscule à nouveau tous les acteurs concernés.