À quelques semaines de la fin de son mandat au Sgen-CFDT, Odile Nave, Secrétaire Générale de l'Union Fédérale des Retraités nous a accordé un entretien. Militante encore très active au sein de la fédération, elle nous parle de son parcours fait de multiples engagements.
Avant son départ prochain vers d’autres horizons, le Sgen-CFDT revient sur le parcours et l’engagement d’Odile Nave, d’une femme qui aura été l’une des chevilles ouvrières de notre organisation syndicale durant plus d’un demi-siècle.
Quels ont été tes engagements et dans quels domaines ?
Après une formation à l’École Normale des Institutrices (Batignolles), puis une année de CPGE au Lycée Fénelon, j’intègre l’ENS de Fontenay aux Roses (École Normale Supérieure) en septembre 1965.
Je vais y étudier la géographie, obtenir l’agrégation et entreprendre une thèse de doctorat.
Simultanément, j’intègre la section Sgen-CFDT de l’ENS et suis en contact avec l’Union régionale interprofessionnelle (URI) de Paris.
Mariée en 1969, l’année du Congrès constitutif de l’Union départementale (UD 91, Essonne) du Sgen-CFDT, mon mari est professeur d’anglais, il est engagé dans le ciné-club du lycée et s’implique dans la fédération des Cinémas Jean Vigo.
En 1970, je suis nommée au Lycée de Corbeil Essonne, c’est un lycée polyvalent, doté de trois sections (classique, technique et professionnelle) qui couvre l’enseignement de la classe de sixième à celle de la terminale. Dès mon arrivée la direction me confie des classes de seconde, première et terminale. L’été précédent ma première rentrée sera entièrement consacré à préparer les cours.
Durant cette période mon engagement syndical va se réaliser progressivement, à la section locale CFDT de la ville et en parallèle à la section du Sgen-CFDT Versailles.
Comment as-tu pu concilier vie professionnelle, vie familiale et engagement syndical ?
Notre premier enfant est né en 1973, enfant pour lequel j’ai pu bénéficier d’une nourrice. Sensible dès le début au partage des tâches domestiques, mon mari faisait les courses au marché tandis que j’allais au supermarché.
Pour notre deuxième enfant, une place en garderie nous a été accordée, en parallèle je suis passée en service à mi-temps en raison de mes activités syndicales au Sgen-CFDT Versailles.
Quelques années plus tard, j’obtiens une décharge syndicale à temps complet à la fédération du Sgen-CFDT de 1983 à 1989.
Au début de ma décharge totale, le Sgen-CFDT Versailles compte environ une quinzaine de militants et militantes ;
cette décharge a nécessité l’abandon du militantisme au lycée. Malgré cette décharge totale, la difficulté persiste à concilier l’engagement syndical et l’attention portée aux enfants.
Au Sgen-CFDT Versailles, je vais investir plusieurs dossiers : la défense du personnel, le rôle des élus, le Vade Mecum lequel va m’occuper de 1983 à 2007, date de mon départ à la retraite.
Ce Vade Mecum, premier du genre, va traiter d’abord de la question des établissements du second degré, puis au début 90, une partie premier degré lui sera ajoutée. Par la suite le Vade Mecum sera mis en ligne dans une version numérisée à partir du début 2000. Cette lourde charge va pouvoir être accomplie à distance, pour ce faire j’ai un temps hébergé à la maison une machine à boules IBM.
Cependant à partir de 1989, avec l’arrêt de la décharge totale, les « choses se compliquent » en raison de parents âgés, et de l’existence de deux adolescents à la maison. Cette même année je suis élue CAPN.
Quelles difficultés et avantages as-tu rencontré dans ta situation ?
Habiter Evry dès 1975, circuler en RER a grandement facilité mes déplacements. J’ai été l’une des premières utilisatrices de la carte Navigo et du Pass orange. La difficulté quotidienne fut de ne pas rentrer trop tard pour m’occuper de mes enfants.
Quels sujets ont jalonné ton engagement ?
Dans le contexte de la Gauche au pouvoir, nous avons traité de nombreux dossiers :
- l’action en Défense des Personnels,
- l’action revendicative,
- le travail autour de la création du corps unique des Professeurs des Ecoles (vieille revendication Sgen),
- les avancées du Corps unique et l’échelle des rémunérations dans le premier et second degré,
- le plan de titularisation des non titulaires,
- le dossier des PEGC,
- la mise en place de la formation continue des enseignants,
- le développement de la promotion interne, des concours internes y compris pour les PEGC.
Au Sgen-CFDT j’ai été accompagnée d’une bonne équipe à la branche second degré et d’une bonne ambiance avec les secrétaires.
Quels changements sociétaux as-tu constaté qui ont impacté l’Institution scolaire ?
Le Lycée de Corbeil Essonne a connu les transformations consécutives à la massification du second degré dans l’espace géographique de l’Essonne avec un bassin désindustrialisé et beaucoup de logements sociaux. Le lycée a accueilli cette diversité (Italiens, Espagnols, rapatriés d’Algérie, Antillais, Réunionnais, Magrébins, Africains, Sud-Américains, Asiatiques…).
Dans les années 90, le lycée a été classé en zone d’éducation prioritaire (ZEP).
En 2004, j’ai procédé, au sein du lycée, à une enquête sur les origines des élèves : ils venaient de toute la France, de toute l’Europe et de toutes les anciennes colonies). Cette année-là j’ai participé à l’expérience « ZEP – Sciences Po ».
Comment vois-tu l’engagement syndical aujourd’hui et dans un avenir proche ?
Dans l’immédiat, en poursuivant le mien, je suis membre de l’UTR (Union territoriale des Retraités) de l’Essonne et adhérente de l’Union fédérale des retraité.es du Sgen-CFDT.
À ce titre je m’occupe du dossier de la Défense du Personnel et particulièrement du dossier des Retraites. Je suis d’ailleurs membre du groupe pension retraite de l’UCR (Union Confédérale des Retraités).
Mais le temps est venu pour moi de transmettre. Aussi je m’occupe de formation destinée aux collègues de lycées et LP (par exemple : « Être ouvrier à Corbeil Essonne de la mi XIX° à la mi XX° »).
Au-delà de mon investissement syndical, je participe aux travaux de diverses associations locales d’histoire.
Et dans l’avenir…
Je prépare le désengagement des responsabilités au niveau fédéral tout en restant référente sur la question des Retraites.
Quels conseils donnerais-tu à un.e jeune militant.e qui souhaiterait s’engager dans le syndicalisme ?
Un credo : On s’engage parce qu’on travaille dans un collectif
(« Together we achieve more »).
Être à l’écoute, accepter de se laisser interpeller, se remettre en question, aller à la rencontre des personnes, se déplacer sur les territoires, échanger, débattre.