Petit retour sur l'histoire de Parcoursup et de la loi ORE : quand le passé proche permet de mieux comprendre le présent...
Parcoursup ! Parcoursup ! Est ce que j’ai une tête de Parcoursup ???
C’est presque jusqu’à l’écœurement que nous avons entendu ce mot pendant les mois de juin, juillet et août. Et pourtant, si on ne peut minimiser le stress que la nouvelle procédure d’affectation nationale a généré auprès de certains lycéens, il est indispensable de se rappeler que Parcoursup n’est qu’une plateforme, un des éléments de la loi ORE qui modifie en profondeur les procédures d’affectation dans toutes les filières post bac : non sélectives ET sélectives.
les éléments clés de la réforme ne doivent pas être oubliés
Cette réforme était devenue obligatoire, puisque le Conseil d’État avait invalidé la procédure APB. De nouvelles règles devaient donc être trouvées. Au delà donc de l’outil d’affectation nationale que constitue Parcoursup, ce sont les éléments clés de la réforme, ceux pour lesquels le Sgen a émis un avis favorable au CNESER au bout de plusieurs semaines de discussions et plus de 80 réunions de travail, qui ne doivent pas être oubliés :
- Pas de sélection malthusienne à l’entrée des formations post bac non sélectives ;
- Un droit à l’accompagnement des futurs étudiants dont le projet de formation ne correspond pas totalement ou partiellement aux compétences attendues pour y réussir et lutter ainsi contre l’échec en premier cycle
- Un meilleur accès des bacheliers professionnels et technologiques aux sections de techniciens supérieurs et des IUT avec la quasi généralisation de l’expérimentation de l’affectation par les conseils de classe ;
- Une extension du dispositif des 10 % de meilleurs bacheliers aux formations des universités ;
- Un affichage sur la plateforme Parcoursup des indicateurs de réussite et d’insertion professionnelle de toutes les formations y compris des formations sélectives ;
- Un traitement humain des dossiers des candidats n’ayant aucune affectation dans leurs vœux en créant les commissions académiques de l’enseignement supérieur et en permettant aux recteurs d’affecter un candidat dans une filière la plus proche possible de son projet ;
- La création d’une aide à la mobilité pour les candidats recevant une proposition dans un établissement éloigné de leur lieu de résidence ;
- La création d’un comité de suivi de la loi ORE, composé entre autres de chercheurs indépendants et reconnus pour la qualité scientifique de leurs travaux sur les questions de mixité sociale et scolaire, et chargé d’évaluer l’ensemble des effets de la loi ORE et de proposer à la ministre des pistes d’évolution pour améliorer l’ensemble du dispositif ;
- L’inscription dans la loi d’un temps d’évaluation générale de la loi ORE par les parlementaires et les acteurs de l’ESR, en particulier avec les membres du CNESER ;
- Un financement pluriannuel pour permettre la mise en œuvre de la réforme incluant des créations de postes et les moyens pour reconnaître le travail supplémentaire demandé à toutes les catégories de personnels, en particulier en permettant des décharges d’enseignement pour les personnels enseignants ;
- Le lancement de discussions pour une meilleure reconnaissance de l’activité de formation des enseignants dans leur déroulé de carrière.
La quasi totalité de ces points sont des revendications que le Sgen-CFDT a portées lors des rencontres avec la ministre et les membres de son cabinet.
sélection sèche et augmentation des droits d’inscription : c’est non, et non négociable
Ces négociations s’inscrivaient dans un contexte particulièrement difficile. Une partie de la droite, rejointe par des parlementaires LREM souhaitait introduire une sélection sèche et augmenter les droits d’inscriptions. Ils pouvaient s’appuyer sur les propos du Président de la République qui, en juillet 2017, déclarait très clairement que « tous les bacheliers n’ont pas naturellement accès à l’université », en visant particulièrement les bacheliers professionnels et technologiques.
Pour le Sgen-CFDT, cela n’était pas acceptable et il l’a fait savoir en multipliant les rencontres avec les membres des cabinets de l’ESR, de Matignon et de l’Élysée et les interventions auprès des parlementaires. Il a été d’autant plus facilement entendu que la première organisation d’étudiants, la FAGE, interpellait sur le même sujet Président de la République et Premier Ministre, menaçant clairement d’appeler ses associations et fédérations à descendre dans la rue. Ce qui a été fait en particulier avec l’ANESTAPS qui a su mobiliser très tôt, avant même l’UNEF, les étudiants.
Ces différentes interventions ont permis de faire évoluer sensiblement la parole présidentielle.
débattre de la place, du rôle et des publics des filières sélectives
Le Sgen-CFDT a alors demandé et obtenu l’écriture d’une feuille de route ayant pour objectif d’arriver à un accord fin octobre 2017, à l’issue de discussions avec l’ensemble des acteurs de l’ESR. Cette feuille de route s’est traduite par la création des groupes de travail et la tenue de plus de quatre vingt réunions entre fin août et mi octobre 2017. Ceux qui disent donc que la loi ORE a été décidée sans concertation mentent ! Ils cherchent certainement à faire oublier qu’ils n’ont pas ou peu participé à ces réunions qu’ils ont boycottées ou tenté de déstabiliser. Le rapport du recteur Filâtre présenté fin octobre 2017 et faisant la synthèse des travaux des différents groupes de travail a été salué par la grande majorité des participants pour sa précision et sa fidélité aux échanges qui se sont tenus dans les groupes de travail.
La CFDT a, à cette occasion, rappelé sa déception quant à la non prise en compte de sa demande d’ouvrir un débat plus large sur la place, le rôle et les publics des filières sélectives. Elle a en particulier interpellé le gouvernement sur la différence de financement entre ces dernières et les filières non sélectives. En février 2018, le Sgen-CFDT et la FAGE adressaient un appel commun aux autres organisations syndicales pour qu’elles les soutiennent dans la demande d’ouverture de ce débat. Aucune réponse n’est parvenue ! Mais le Sgen et la FAGE continuent à porter cette demande. Car tous les jeunes ont droit à la même considération de l’État, quelles que soient leurs origines sociale ou géographique et quelles que soient les formations et établissements dans lesquelles ils sont inscrits. Les personnels ont également droit à la même considération en particulier lorsqu’ils travaillent dans des établissements chargés d’accueillir tous les jeunes et remplissent ainsi une des missions fondamentales du service public d’enseignement supérieur.