La priorité à l'éducation au temps du covid : dans les discours plus que dans les faits
Déclaration liminaire du Sgen-CFDT au CTMEN
du 20 septembre 2021
Le Sgen-CFDT aurait aimé se tromper lorsqu’il y a plusieurs mois, lors d’un précédent CTMEN, il demandait au Ministère d’anticiper la situation et de comprendre que cette rentrée scolaire serait encore marquée par la pandémie de Covid-19 et les différents variants.
Cette pandémie met au défi de faire fonctionner toutes les institutions sociales qui reposent sur le fait de rassembler des personnes dans des lieux clos.
L’École est donc tout particulièrement concernée et le travail, les conditions de travail de l’ensemble des personnels de l’Éducation nationale se trouvent modifiées depuis plus d’un an et demi.
Pourtant les mesures prises par le gouvernement pour assurer le meilleur fonctionnement possible du système éducatif ne nous semblent pas à la hauteur des enjeux, ni à la hauteur du discours gouvernemental sur la priorité à l’éducation.
Parlons terrain… le système éducatif à hauteur de femmes et d’hommes
Par conséquent, cette rentrée scolaire est réellement inédite.
Si les personnels ont, comme chaque année fait leur travail avec professionnalisme pour réussir la rentrée, si les personnels dans les écoles, collèges et lycées vivent pleinement la rentrée, la rencontre avec les élèves, les parents d’élèves afin d’enclencher un travail éducatif de qualité, le mot de pénurie est sur toutes les lèvres dans les équipes éducatives et dans les services administratifs.
Côté enseignants et personnels d’éducation
Lors des échanges entre Rectorats ou DSDEN et les organisations syndicales, les rares éléments chiffrés qui nous sont communiqués font état d’un nombre très important de postes non-pourvus.
Tous ces besoins humains sont indispensables pour la réussite de tous les élèves, et indispensables pour que chaque agent effectue son travail dans de bonnes conditions.
Si les académies et départements ont des bilans chiffrés, certes provisoires, le Sgen-CFDT demande à ce que le Ministère puisse nous communiquer des données réelles :
- Combien de démissions et de postes encore à pourvoir d’AESH ?
- Combien de postes d’AED Vie Scolaire non-pourvus ?
- Combien de postes de personnels contractuels alternants non-attribués ?
- Combien de postes de contractuels recrutés pour compenser les classes où un enseignant est manquant dans le premier comme dans le second degré ?
- Combien de postes de RASED fermés et volontairement laissés vacants pour redéployer les moyens pour des postes dits « devant élèves » ?
- Combien de dispositifs Ulis qui dépassent le nombre maximal d’élèves inscrits ?
- Combien de lauréats sur Liste Complémentaire réellement recrutés ? à ce propos qu’en est-il d’une consigne ministérielle invoquée par plusieurs rectorats pour justifier de ne pas recourir à des recrutement sur Liste Complémentaire en dehors de toute démission de stagiaires, et donc pour justifier la préférence pour le recrutement d’enseignants contractuels ?
- Quelle proportion de TZR et remplaçants du 1er degré déjà affectés sur un remplacement long dès le 1er jour de classe ? Et donc quels sont à ce jour les moyens disponibles pour effectuer des remplacements ?
- Combien de personnels encore en ASA à cette rentrée ?
- Combien de personnels administratifs vacants cette année encore dans des services déjà en sous-effectif chronique ?
Nous allons arrêter ici la liste des données nécessaires pour estimer les fragilités de notre système éducatif.
Nous devons partager un constat concret dont témoignent nos collègues :
il manque des personnels pour faire fonctionner correctement le système éducatif.
Devant et aux côtés des élèves, si les postes sont dépourvus, il n’y a pas d’autres solutions que de recruter.
Nous demandions dès le printemps dernier un collectif budgétaire afin de créer des postes, assurer des recrutements.
Le Sgen-CFDT demande que les académies puissent recourir aux listes complémentaires de tous les concours.
Par ailleurs, les personnels contractuels remerciés cet été dans différentes académies doivent être réembauchés en priorité et sans attendre.
Du côté des services administratifs
La pénurie est bien connue, l’Éducation nationale étant sous administrée. Cette situation s’est installée dans la durée ; pourtant le travail ne manque pas et les difficultés s’accumulent.
Dans certains services, le manque de personnel et le turn over compliquent beaucoup le travail de gestion. Certains actes de gestion (comme les payes des contractuels dans certaines académies) vont être de nouveau mis à mal.
Un exemple de dysfonctionnement est particulièrement parlant : la réglementation sur le congé de paternité a changé mais les outils de gestion eux n’ont pas pris ces changements en compte. Les services sont donc amenés à se débrouiller comme ils le peuvent, sans circulaire.
La gestion de la nouvelle grille de rémunération des AESH est un autre exemple emblématique. Vous avez demandé aux services des Rectorats d’être en alerte maximale durant 15 jours d’octobre alors même que certains services sont déjà dans l’incapacité, de tenir des délais,
la cadence étant intenable, au delà de l’infernal, faute de moyens humains supplémentaires depuis des mois.
Le turn over des personnels est tel ici ou là que la formation se fait au fil de l’eau, mais il faut le préciser : sans jamais être prise en compte financièrement car ce temps de formation des nouveaux personnels dans les services n’est jamais reconnu… mais ce temps est-il réellement connu ?
Nous l’avons dit lors de la réunion sur l’évolution des système d’information RH, là aussi, la transition vers des outils modernisés génère un surcroît de travail pour les gestionnaires et les DSI. Le calendrier voulu par le ministère n’est pas soutenable.
On peut craindre que les objectifs contenus dans les Feuilles de route RH , et dont la mise en place repose essentiellement sur les services administratifs soient réduits à des vœux pieux ?
Suivi de la situation sanitaire : axes d’intervention du Sgen-CFDT
La communication d’informations
Depuis de nombreux mois maintenant, plusieurs organisations syndicales dont le Sgen-CFDT demandent au ministère des informations plus pertinentes sur la situation sanitaire. Nous demandons par exemple que les données sur les cas confirmés, les cas contacts, les classes ou structures fermées soient disponibles en opendata.
La présentation hebdomadaire sur le site du ministère rend laborieuse la visualisation de la dynamique.
Or c’est bien cela qu’il faut aussi observer. Par ailleurs nous nous étonnons que des DASEN aient des rendez-vous quotidiens avec les médias locaux pour communiquer les chiffres des classes fermées alors que des CHSCT essuient des refus d’obtenir des informations pourtant parues dans la presse.
Comment accepter une telle manière de faire ? L’an dernier nous avions constaté dans plusieurs départements des écarts entre les remontées faites au ministère et ce que nos collègues observaient dans leurs écoles, collèges et lycées.
Nous demandons aussi depuis le début de l’épidémie à disposer d’informations concernant le suivi des agents, le suivi des covid longs et les aménagements de postes qui seraient nécessaires, parfois temporairement, pour des collègues subissant les contre-coups de la maladie, d’une hospitalisation.
La qualité de l’air dans les locaux scolaires
Depuis de nombreux mois, nous insistons sur la qualité de l’aération des locaux scolaires.
Or de trop nombreux collègues font état que les fenêtres ne s’ouvrent pas davantage cette année que les années précédentes dans de nombreuses salles de classe.
Certes, la rénovation bâtimentaire est de la compétence des collectivités locales, mais si l’urgence et la priorité gouvernementale est à l’ouverture des écoles, il est incompréhensible que plus d’un an après que la transmission par aérosols est documentée scientifiquement les acteurs publics (État et collectivités locales) ne sont toujours pas parvenus à construire le plan de rénovation nécessaire.
Le plan de relance, le prochain plan France 2030 devraient pourtant permettre de dégager les ressources financières pour des rénovations qui sont utiles aussi hors pandémie tant cette dernière révèle la piètre qualité de l’air dans de nombreux locaux scolaires.
Les masques… et responsabilité de l’employeur
Le Sgen-CFDT n’a eu de cesse de demander à rouvrir la réflexion sur le nombre et la qualité des masques fournis aux personnels.
Faute de réponse en direct, nous découvrons FAQ après FAQ que le ministère et le gouvernement décident d’en rester à deux masques grand public par journée travaillée.
La pratique professionnelle implique d’utiliser plus de deux masques par jour, il en faut aussi pour le déplacement domicile travail. La dotation est donc insuffisante.
Par ailleurs, des collègues travaillent au contact d’élèves ne portant pas le masque, au contact d’élèves non vaccinés. La protection des personnels et des élèves, la juste participation de l’Éducation nationale à la prévention globale de la circulation du virus devrait au contraire induire un équipement adapté : masques FFP2 quand les élèves ne portent pas le masque, masques chirurgicaux au moins ailleurs.
Ces deux éléments (aération difficile, types de masques fournis) contraignent la quasi totalité de nos collègues à acheter eux-mêmes des masques sur leur argent personnel.
La CFDT demande qu’une indemnité forfaitaire soit versée aux agents afin qu’ils puissent acheter les masques qui correspondent le mieux à leurs besoins.
Sur ces deux sujets : aérosolisation et masques, la question des responsabilités de l’employeur en matière de protection des agents dans le domaine de la santé et de la sécurité sont très clairement questionnées. Sans réponse rapide et efficace du MEN,
la CFDT se devra d’agir et n’exclut pas y compris de recourir à la justice pour obtenir la juste protection des agents. Dépistage
Concernant les dépistages, si d’autres stratégies sont plus efficaces pour garantir le maximum d’enseignement en présentiel, il faut y recourir.
Nous demandons une nouvelle fois au ministère de préciser le cadre pour les élèves de 6ème qui n’accèdent pas à la vaccination, et d’élargir les tests aux élèves vaccinés dans le 2nd degré dès lors qu’ils sont cas contact, comme en population générale.
Il nous semble aussi que la prévention au sens plein du terme devrait mieux impliquer les personnels de santé scolaire dans la formation des personnels et des élèves autour des questions de viralité et de transmission.
Les personnels
Les personnels de santé scolaire n’ont que rarement pu consacrer du temps à ce travail : trop peu nombreux et nombreuses, consacré.e.s à leurs missions et au suivi épidémique. On mesure une fois de plus le fait que les moyens humains en santé scolaire ne sont pas à la hauteur des besoins.
Des personnels sont confrontés à la virulence de collectifs anti-masques et anti-vaccination, avec parfois des menaces directes. Nous demandons que ces situations soient suivies de près par le ministère pour prévenir le risque de passage à l’acte et assurer protection aux agents.
Mieux encadrer et accompagner les élèves dans la période.
Enfin, les élèves dont les classes ou groupes ferment, les élèves mis à l’isolement pourraient l’être plusieurs fois dans l’année selon l’évolution de l’épidémie.
Cela implique de ne pas négliger l’impact de la situation sanitaire sur la formation et la préparation aux examens même si une semaine donnée, au niveau macro, il semble que la perturbation soit mineure ; pour celles et ceux qui sont directement concerné.e.s, la perturbation est réelle et peut fragiliser la persévérance scolaire.
C’est une des raisons pour lesquelles le Sgen-CFDT, depuis le début de la pandémie, insiste sur le besoin de mieux encadrer et accompagner les élèves dans la période.