PIAL : Pôle Inclusif d'Accompagnement Local, difficile de dire d'emblée de quoi il s'agit ? Le Sgen-CFDT donne la parole à Christophe Cahard, Directeur et Référent PIAL à Rouen Centre.
Christophe est directeur de l’école Honoré de Balzac à Rouen, un groupe scolaire qui regroupe 19 classes (306 élèves) situé en REP et donc qui dispose de classes dédoublées en CP et CE1.
Depuis deux ans, il est aussi coordonnateur du Pôle Inclusif d’Accompagnement Local (PIAL) pour toutes les écoles privées et publiques de la circonscription de Rouen Centre ce qui représente une cinquantaine d’écoles.
Déchargé à temps plein, il assume à la fois sa direction d’école et cette mission de coordonnateur PIAL.
Comment es-tu devenu coordonnateur PIAL ?
En 2019/2020, le PIAL était attaché au collège de secteur et donc inter-degrés. Rouen est une ville possédant de grosses écoles et devant faire face à une forte progression de sa population. Ce PIAL inter-degrés était expérimental et a très bien fonctionné. Nous avons travaillé en bonne intelligence avec le PIAL du Collège.
Pour la rentrée 2020/2021. La Direction académique a décidé de tout réorganiser en créant un PIAL pour le Premier degré et un PIAL pour le second degré dont la Principale garde la gestion. L’IEN m’a alors demandé si j’acceptais de prendre cette mission étant déchargé à plein temps et ayant au sein de mon école une ULIS.
J’ai donc accepté de poursuivre ma mission dans cette nouvelle organisation de PIAL
En fait, un PIAL, c’est quoi ?
Le PIAL permet une gestion de l’affectation des AESH au plus près des besoins des enfants .
Il s’agit donc d’adapter la présence de l’AESH en fonction de ce que l’on sait de l’enfant.
Il y a donc en amont un travail important avec l’enseignant référent de repérage des conditions nécessaires pour faciliter la prise en compte des difficultés spécifiques de l’élève.
Avec le PIAL, on a une gestion plus individualisée de la relation entre l’AESH et l’enfant.
Et dans son fonctionnement, quels problèmes rencontres-tu ?
Le PIAL Rouen Centre a en charge une cinquantaine d’écoles, 115 enfants et 57 AESH.
Une dizaine d’enfants n’ont pas d’AESH, le PIAL n’étant pas doté suffisamment.
On est donc dans l’obligation de jongler un peu avec les emplois du temps des AESH. Certains enfants se voient ainsi dotés d’un temps d’AESH inférieur à leur notification.
Le pôle inclusif continue de recruter des personnels mais il y a toujours un écart entre la notification MDPH, le recrutement et l’arrivée effective des AESH avec leur enfant attribué.
En attendant, il faut gérer.
Le PIAL permet en tout cas un plus grande proximité et de réagir plus rapidement aux urgences.
Quel serait pour toi le PIAL idéal ?
Pour bien fonctionner, le PIAL aurait besoin d’un nombre d’AESH supérieur aux besoins pour permettre encore plus de réactivité.
Une AESH absente pourrait ainsi être remplacée.
Avant la cédéisation, les AESH pouvaient travailler sur le premier ou le second degré dans le cadre du PIAL inter-degré. Au moment du changement à la rentrée 2020, on a demandé aux AESH en poste de choisir.
Au niveau de mon travail, je pensais avoir la possibilité de me déplacer dans les écoles pour aller à leur rencontre. Aujourd’hui, je les connais essentiellement à travers leur voix au téléphone.
D’autre part, avec le protocole sanitaire, ceci s’avère impossible.
Ce serait pourtant une bonne chose que de pouvoir rencontrer les AESH et ainsi permettre une gestion plus fine d’affectation des personnels.
Du fait du confinement et de la crise sanitaire actuelle il est difficile d’avoir une véritable équipe, on a plutôt une juxtaposition d’individus.
Pourtant le fait de pouvoir permettre à ces AESH de discuter entre pairs, de les former serait nécessaire dans les missions du PIAL.
Quels contacts entretiens-tu avec les AESH ?
Au quotidien, il s’agit d’être à l’écoute des AESH.
Ainsi, il convient de lier le lieu d’affectation de ces AESH avec leur lieu d’habitation pour ainsi limiter leurs déplacements.
Je prends donc contact avec les AESH mais aussi avec les directeurs et directrices d’école.
Je dirai que mon travail est un peu celui d’un Directeur des Ressources Humaines mais avec en plus une dimension, une posture pédagogique.
C’est évidemment un travail chronophage où l’importance du suivi est primordial : suivi de l’enfant, suivi du protocole d’accueil, suivi des demandes.
Aujourd’hui, du fait de la crise sanitaire, mon travail est avant tout comptable et on ne peut s’en satisfaire. Ce qui me pèse le plus, c’est de ne pas trouver ou avoir de solution à proposer pour un enfant en attente de son AESH.
Es-tu tout seul pour faire ce travail ?
Le PIAL c’est aussi un travail partenarial entre l’Inspecteur qui est le pilote du PIAL, le coordonnateur, moi-même, l’enseignant référent et le pôle inclusif.
Tout cela fonctionne assez bien même si la problématique principale du moment est de disposer d’une dotation en personnels à la hauteur des besoins et des notifications horaires définies par la MDPH.
Comme les moyens sont insuffisants, je travaille avec les directeurs et directrices des écoles pour prioriser avec les équipes pédagogiques. C’est donc parfois un peu un travail d’orfèvre. Il faut expliquer, écouter pour essayer de faire au mieux.
Le travail de choix se fait en partenariat avec l’enseignant référent qui connaît le mieux la situation des élèves. Cela se passe donc dans un dialogue à tous les étages.
Tu es aussi directeur d’école, comment organises-tu ton temps ?
Sur le côté de la direction de mon école, je constate un empilement des tâches et c’est de pire en pire.
Le PIAL, c’est certes une tâche en plus mais elle m’intéressait. Je me suis organisé dans mon travail étant déchargé complètement. Ainsi je fais une grande partie du travail de gestion du PIAL chez moi après le temps à l’école.
Cela fait 14 ans que je suis directeur de « mon école » donc je sais comment elle fonctionne et les moments où les collègues vont avoir besoin de moi.
Il me faut dégager du temps informel pour faciliter les choses.
Sur mon travail de directeur, il y a des tâches qui pourraient être remplies par une aide administrative qui est à mon avis indispensable : portail, téléphone ; absence des élèves…
Une telle personne me permettrait de mieux me concentrer sur mes missions réelles de directeur et sur le suivi du PIAL et notamment le travail relationnel qui est le cœur de mon métier.
Une inclusion scolaire sans AESH, possible pour toi ?
L’intérêt du PIAL est qu’il doit permettre de faire un travail sur mesure.
Certaines AESH me font ainsi savoir qu’elles ont l’impression de ne pas apporter de « plus » à l’enfant.
Dès lors, on peut avec l’enseignant référent déclencher une ESS et ainsi réaménager le temps de présence de l’AESH pour cet enfant, voire le supprimer et ainsi l’affecter là où il y a des besoins. L’inclusion scolaire sans AESH dans certains cas est donc possible. Le PIAL en tout cas permet cette gestion fine.
Ne pas oublier que l’objectif de l’inclusion est de permettre à l’enfant à terme d’être le plus autonome possible donc, à terme, sans AESH.
Qu’en est-il de ton positionnement par rapport aux autres directeurs de la circonscription ?
Le fait d’être un pair me permet des contacts certainement plus simples avec les autres directeurs et directrices et donc d’échanger sans a priori pour le bien du suivi de l’enfant, de l’élève.
Je suis d’autre part la seule école REP de la circonscription ce qui me donne sans doute une place particulière.
Mon ambition est de faciliter le mieux-être de tous donc je fais tout en ce sens.
Si des problèmes surgissent, le directeur ou l’AESH m’appellent et je peux faire des propositions à l’IEN.
En fin d’année, nous essaierons de faire un bilan de l’année, avec les AESH et les directions d’école pour soit permettre le changement d’AESH, soit sa prolongation avec le même enfant.
Là encore, c’est forcément du cas par cas et un travail de partenariat.