Une première consultation des organisations syndicales sur les projets de programmes de SES a eu lieu le 8 novembre. Analyses et revendications du Sgen-CFDT.
Trop de contradictions didactiques et pédagogiques
La formulation des programmes hésite perpétuellement entre des tendances contradictoires.
Dans la démarche d’enseignement de seconde on perçoit, dès le troisième paragraphe du préambule, une tension entre le magistral et la pédagogie active. Ensuite, dans le programme il y a une tension entre deux objectifs : ce que les élèves doivent savoir (comme si pour ces items la connaissance par cœur était visée et comme si on incitait alors à du cours magistral) et ce qu’ils doivent comprendre (plus ambitieux et aussi plus intéressant et motivant que le « savoir que » d’autant que cela implique aussi nécessairement l’acquisition de savoirs).
Ces programmes entendent apporter plus de précisions, avec de longues listes de connaissances à acquérir ou de capacités à maîtriser, mais ces listes s’avèrent très longues comparativement aux questionnements qui figurent dans les programmes actuels. Les dispositifs évoqués dans les préambules nécessitent pour beaucoup de disposer d’un temps plus long avec les élèves que celui dont nous disposerons, souvent sans heure dédoublée. Sous cet angle les programmes sont une nouvelle fois trop longs. D’autant qu’il faut aussi pouvoir évaluer, remédier, acquérir des méthodes, travailler l’oral…
Dans le même temps, on peut aussi constater un double manque dans cette présentation. Manque de précisions sur les notions que les élèves devraient maîtriser et qui apparaissaient auparavant dans la deuxième colonne des programmes. Cela peut introduire davantage d’incertitudes sur ce qui est exigible dans les évaluations certificatives. C’est notamment le cas en Première, puisque les élèves qui abandonneront l’enseignement de SES à l’issue de la Première subiront une épreuve certificative. Manque d’indications complémentaires ensuite, vécues comme trop prescriptives par certains, suivies comme un guide utile par d’autres, particulièrement en début de carrière. Ce manque nous semble devoir être comblé par un document d’accompagnement qui devrait aller bien au delà de ce que les fiches Eduscol ont pu apporter aux programmes actuels. Ce type de document ne doit pas limiter la liberté pédagogique des enseignants.
Si un besoin de formation devait être identifié, ce serait alors sans doute un besoin de renforcement des capacités didactiques pour être en mesure dès le début de la carrière de transposer ces savoirs. Le risque est grand, à la lumière de ces programmes, que les connaissances apportées aux élèves apparaissent très éloignées de leurs préoccupations, qu’ils peinent à s’en saisir dans leur réflexion de citoyen.
Trop de choix contraints pour les enseignants
Dans le programme de Seconde le choix d’un chapitre introductif pose problème à plus d’un titre.
Introductif, il impose en effet un ordre. Or il apparaît dommage que le chapitre introductif ne soit pas plus clairement un chapitre qui pourra, au choix de l’enseignant, être traité en début d’année ou au fil des thématiques dans chacune des parties du programme. Il peut prendre beaucoup de temps, à moins d’être fait en cours magistral – ce qui serait contreproductif avec des élèves en début de seconde. Une alternative serait d’inclure l’objectif dans le préambule comme objectif sur l’ensemble de l’année.
Le nombre de thèmes est plus réduit que dans le programme actuel, mais les thèmes sont, au moins pour la partie économique, souvent le regroupement de deux thèmes du programme actuel. Il n’y a plus pour les enseignants la possibilité d’opérer des choix entre les thèmes.
Dans le même ordre d’idées on sent le poids que va prendre la dissertation, qui va beaucoup modéliser l’enseignement au détriment de pistes intéressantes de mise en activité pourtant également présentes dans le même préambule.
Trop de flous notionnels
En économie de Première, des crispations auraient sans doute pu être évitées si certains objets d’étude (en particulier au sujet de l’État et de ses politiques) avaient été plus clairement identifiés et si apparaissait une réflexion plus importante sur les comportements des agents, permettant une réflexion des élèves sur les hypothèses des modèles étudiés, leur rapport au réel.
En sociologie, la partie consacrée à la socialisation, déjà abordée par l’ensemble des élèves en Seconde, aurait pu être renforcée et faire référence à des groupes sociaux, en particulier les CSP, et à la structure sociale. Le chapitre sur les liens sociaux est plus riche mais il est très individualiste. Les notions d’exclusion, de désaffiliation et de disqualification aurait pu être mobilisées. Les logiques individuelle et collective sont pourtant ensuite mobilisées dans la partie consacrée à la science politique et dans les regards croisés.
Certains items de Seconde et Première parlent peu aux collègues, ou risquent de générer des confusions chez les élèves, et on peut s’interroger sur les raisons de leur présence :
- le rejet des valeurs dans le préambule,
- diversité des configurations familiales et socialisation,
- trajectoires individuelles improbables,
- monopole des catégories « éclairées »
- distinction entre assurance et protection sociale alors que la protection sociale s’incarne à la fois dans une logique d’assurance et dans une logique d’assistance,
- référence aux sociétés développées.