Nouvel arrêté licence : contrat de réussite pédagogique, personnalisation des parcours, référence aux 1500h, rôle des SCUIO, seconde chance, compensation, évaluation des dispositifs. Commentaire et analyse du Sgen-CFDT.
Les deux points centraux : le contrat de réussite pédagogique et la personnalisation des parcours
Les textes relatifs au nouvel arrêté licence seront présentés le 22 juin au Comité de Suivi LMD, puis en CNESER plénier et en présence de la Ministre, le 9 juillet prochain. Ce nouvel arrêté licence a pour objectif annoncé de favoriser la personnalisation des parcours de formation, pour s’adapter au mieux au parcours initial de l’étudiant et au projet qu’il veut construire. Le corollaire nécessaire de cette plus grande liberté, c’est un soutien individuel de l’étudiant lors de la construction de son parcours, et c’est tout l’objectif du contrat de réussite pédagogique.
Aider à la construction d’un parcours.
Tant à son arrivée à l’université, avec éventuellement la mise en place de dispositifs de remédiation, qu’aux différentes étapes de choix (passerelles pour changer de formation, qu’il s’agisse d’une autre licence ou d’une licence professionnelle, UE pré-professionnalisante ou de professionnalisation pour entrer dans la vie professionnelle après la licence, choix d’UE en vue du master, etc), il s’agira pour les directions des études (directeurs des études, enseignants référents… ) d’aider à cette construction du parcours. Et le rôle des services d’orientation et d’insertion professionnelle (SCUIO) dans cet accompagnement est rappelé dans l’article 5.
Ainsi, pour le Sgen-CFDT, il était essentiel que ces contrats soient mis en place dès la rentrée prochaine pour les étudiant.e.s qui auront eu une réponse « oui, si », ou d’autres qui pourraient être en difficulté au Semestre 1, afin de faciliter leur intégration et leur suivi (sur les financements débloqués pour la rentrée prochaine).
Toutes les étudiantes et tous les étudiants de licence doivent être concerné.e.s.
À terme, toutes les étudiantes et tous les étudiants de licence doivent être concerné.e.s : leur laisser plus de liberté impose de les accompagner, pour que celles et ceux qui connaissent moins la logique des formations ne se retrouvent pas sous-informé.e.s, et incapables par conséquent de faire les « bons » choix, les choix cohérents avec leurs objectifs.
Quantifier le nombre d’équivalents temps plein (ETP) supplémentaires nécessaires aux établissements.
Mais nous l’avons rappelé au ministère : cette fonction doit impérativement être reconnue en terme de temps de travail pour les personnels qui l’assureront. Une évaluation de la charge de travail par étudiant.e suivi.e est donc un préalable indispensable. Elle seule peut permettre de quantifier le nombre d’équivalents temps plein (ETP) supplémentaires nécessaires aux établissements pour déployer cette nouvelle fonction. Il est en tout cas complètement exclu de déployer ce dispositif en comptant sur la seule bonne volonté de collègues déjà surchargés, même en les récompensant par un petit supplément de prime.
La mise en place de ce dispositif implique donc la création d’un nombre de postes suffisants pour rendre possible un tel encadrement (500 postes au moins, simplement en retenant une moyenne d’un quart d’heure par étudiant et par semestre), en plus des créations rendues nécessaires par l’augmentation importante du nombre d’étudiants.
Le maintien d’une référence aux 1500h d’enseignement et d’encadrement pédagogique pour la totalité de la licence
Il s’agit là de préserver la qualité des formations de licence. Mais cette référence ne peut pas être uniquement liée à des enseignements présentiels, ce qui reviendrait à nier tout intérêt aux enseignements hybrides, aux classes inversées, aux projets tuteurés ou à toute mise en situation… et même aux stages ! Et de la même façon, plus aucune formation à distance ne serait possible… Le calcul de ces 1500h doit donc se faire via les référentiels, sur la base des équivalences mises en œuvre.
Une organisation temporelle plus souple pour l’étudiant.e
Si la structure semestrielle est conservée pour l’organisation des enseignements, le nombre de crédits à acquérir chaque semestre peut être personnalisé, et la référence à une durée de trois années est supprimée. Cette modulation reprend donc en l’élargissant les conditions des régimes spéciaux d’études (activité professionnelle, charge de famille, sportif de haut niveau… ), et permet ainsi de moduler la charge de travail pour tenir compte par exemple de la nécessité d’une remédiation.
Permettre une insertion effective en fin de licence
En fonction de ses résultats et de son projet, il faut ouvrir la possibilité à tout.e étudiant.e qui le souhaite de s’insérer dans le milieu professionnel à la fin de sa licence. Mais nous avons défendu le fait qu’il ne devait pas être possible de créer un nouveau type de formation, sans tenir compte de ce qui existe par ailleurs. Autrement dit, il ne doit pas être possible de créer des parcours « tuyaux » qui se sur-rajouteraient aux DUT, BTS, licences professionnelles, etc, rendant encore plus confuse la structure française de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche. Si des évolutions sont souhaitables, elles ne peuvent avoir lieu que dans le cadre d’une remise à plat de la globalité des formations sur cet aspect de la professionnalisation, afin d’assurer le mieux possible notre mission de service public pour l’ensemble des étudiant.e.s.
Le principe d’une seconde chance
Cette seconde chance peut être organisée sous forme d’une évaluation supplémentaire, mais elle n’a plus nécessairement à prendre la forme d’une seconde session. En particulier dans le cadre d’une évaluation continue, cette seconde chance est comprise ipso facto dans l’organisation des différentes épreuves du contrôle. Le nombre minimal d’épreuves dans ce cas est fixé par les établissements par unité de d’enseignement (aucune de ces épreuves ne pouvant compter pour plus de 50% de la note finale). Le cas des régimes spéciaux d’études donne par ailleurs droit à une évaluation de substitution, pour éviter de pénaliser les publics correspondants.
La compensation
L’organisation de la compensation a lieu au sein des unités d’enseignement, et par application des modalités de compensation entre les UE votées par les établissements. Il n’y a donc plus nécessairement de compensation semestrielle ou annuelle, mais à l’inverse, la compensation peut se faire au niveau des blocs de compétences.
L’évaluation des dispositifs
Un bilan sera fait au niveau des rectorats en ce qui concerne les dispositifs mis en place pour la réussite des étudiants, et fera l’objet d’une présentation en Comité de Suivi Licence, Master et Doctorat.
La nécessité de mettre en place des dispositifs d’évaluation des formations est rappelée par l’article 17, ainsi que leur présentation en CFVU. Ils seront également pris en compte dans le cadre de l’évaluation par le HCERES et lors de la demande d’accréditation. Les dossiers intègreront également la présentation des dispositifs d’accompagnement et de personnalisation, les résultats obtenus, ainsi que les taux de réussite et d’insertion.
Quel délai de mise en œuvre ?
C’est à la fois un point positif et un point négatif : le texte ouvre des portes, mais in fine n’impose pas grand-chose. Aux établissements de savoir comment ils comptent orchestrer la mise en œuvre de l’arrêté, qu’il s’agisse de la compensation, de la deuxième chance. De même, l’organisation des dispositifs de remédiation est très souple, puisqu’ils peuvent être pris en compte au sein des unités d’enseignement, mais il n’y a pas d’obligation qui soit énoncée.
Cela laisse le temps de s’emparer – ou pas – des dossiers correspondants, et évite aux équipes pédagogiques de bouleverser leurs maquettes sans leur laisser le temps de respirer. Cela permet aussi d’expérimenter, pour peu qu’ensuite on s’empare des résultats obtenus, pour diffuser les bonnes pratiques le cas échéant.
Ainsi, seul le contrat de réussite pédagogique constitue un point de passage obligé. Comme nous l’avons écrit ci-dessus, la mise en place de ce dispositif sera forcément progressive et dépendra nécessairement des postes qui seront affectés aux établissements, même si le texte de l’arrêté prévoit une mise en œuvre au plus tard à la rentrée 2019 ! Quant aux autres dispositifs, ainsi que nous l’avons déjà écrit, ils ne constituent en aucun cas un point de passage obligé
Notre position
Les évolutions contenues dans cet arrêté nous paraissent globalement intéressantes, nonobstant ce problème absolument pas négligeable des postes nécessaires ! Notre second bémol repose sur le pilotage qui sera fait ensuite du suivi de la réforme : laisser des portes ouvertes sur le fond ne nous choque pas, pourvu que l’État n’abandonne pas tout rôle stratégique.
Enfin, un 3° point nous pose question : l’article 22 ouvrirait désormais la possibilité à tout établissement public supérieur de délivrer le diplôme de licence, alors que seules les universités avaient jusqu’à présent cette possibilité. Il nous parait impensable d’ouvrir cette possibilité sans en mesurer les impacts et sans avoir clairement redéfini qui fait quoi, et avec quels moyens.