Quelles sont les spécificités d'une mutuelle comme la MGEN et quelles sont les évolutions de sa politique, en matière de prestations complémentaires notamment ?
Un extrait de cet entretien a paru dans le dossier « Protection sociale, une affaire de solidarité » de Profession Éducation, le magazine du Sgen-CFDT (numéro 272 – Novembre 2019).
Quelle est l’originalité de la MGEN dans le paysage de la protection sociale ?
Parmi tous les organismes de protection sociale incluant assureurs et institutions de prévoyance, la MGEN a pour particularité d’être une société de personnes qui permet une relation de pair à pair des adhérents avec des interlocuteurs issus des métiers de l’Éducation nationale. Cette relation privilégiée, qui pouvait exister dans d’autres mutuelles de fonctionnaires mais qui s’étiole, reste une priorité de la MGEN qui a à cœur d’entretenir un réseau de correspondants dans chaque département pour rester proche des adhérents. Ce trait fort de l’identité MGEN peut aussi contribuer à forger un sentiment d’appartenance chez l’adhérent. Au fil des années, beaucoup deviennent militants, ce qui peut expliquer un taux de fidélisation qui est unique…
Quel est l’avantage de l’interlocuteur unique MGEN ?
Quand un adhérent nous contacte , sa question est globale et nous y répondons aussi bien sur le volet du régime obligatoire (RO) que sur le volet du régime complémentaire (RC). Nous exerçons de plus un rôle de conseil. C’est tout l’avantage du guichet unique !
Le régime des fonctionnaires de l’Éducation nationale est-il favorable ?
La Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) est l’organisme de tutelle de la MGEN qui gère les dossiers RO pour le compte de la Sécurité sociale. En matière de gestion du RO, les comptes de la MGEN sont intégrés à ceux de la Sécu et font l’objet d’une vérification de la Cour des comptes. Par conséquent, les règles de contrôle, d’indicateurs de performances : rapidité de remboursement, de taux de rejet… sont identiques à celles d’une caisse primaire, excepté une disposition particulière liée à l’employeur qui pourrait prendre en charge davantage que le régime général –pour exemple, les jours de délai de carence qui, globalement, sont pris en charge par les employeurs du privé. Donc, contrairement aux idées reçues, le fonctionnaire n’est nullement favorisé par rapport à l’assuré social du régime général salarié. La partie complémentaire, elle, est laissée à l’estimation de chacun. La MGEN a longtemps proposé une offre unique globale ; aujourd’hui, plusieurs offres globales existent. Elles sont toutes constituées d’un couplage santé et prévoyance.
La MGEN dispose d’une expertise en matière de gestion du RO articulé au RC…
Nous avons une vision globale des dépenses RO, des consommations RC et des restes à charge. La complémentaire elle-même ne peut pas tout prendre en charge car seul l’argent versé par les cotisations peut être dépensé. Aujourd’hui, un salarié qui relève du régime général dans le privé bénéficie d’une participation de l’employeur à hauteur de 50 %, ce qui n’est absolument pas le cas d’un fonctionnaire de l’Éducation nationale qui paie à 100 % sa protection complémentaire.
Y a-t-il des chances que cela évolue ?
Nous l’espérons. En ce moment, est instruit le dossier de la protection sociale complémentaire des fonctionnaires. Pour l’instant, le résultat n’est absolument pas satisfaisant parce qu’il y a d’importants écarts et une participation très faible de l’État employeur. S’il voulait participer à la hauteur de ce qu’il demande aux entreprises privées (soit au moins 50 %), il faudrait dégager 900 millions d’euros pour les actifs de la Fonction publique d’État. Quand un adhérent se plaint que la mutuelle est chère, c’est en réalité parce qu’il paie sa cotisation « plein pot » au contraire d’un employé du privé.
L’évolution vers le modèle du privé provient-elle d’une demande militante ?
Absolument pas, c’est même pour cette raison que les retraités pourraient être exclus. Aujourd’hui, les deux tiers de nos portefeuilles viennent de personnes qui ont plus de soixante ans. La politique des mutuelles n’est pas celle des assureurs qui sélectionnent leurs cotisants en fonction des risques encourus : les assurances gardent les personne avec des revenus corrects, voire supérieurs, et qui sont plutôt jeunes et en bonne santé… Une évolution calquée sur le privé nous empêcherait donc de garantir le principe de solidarité, et la MGEN y est totalement est opposée.
Comment voyez-vous l’évolution de l’articulation RO-RC ?
Lorsque le RO se désengage du remboursement de certains médicaments et soins, il y a une augmentation importante des prestations complémentaires que doivent verser les mutuelles. Pour faire face, il n’y a que les cotisations, et l’alternative est de les augmenter ou de verser moins de prestations. Là où un complément (même forfaitaire) était versé, la mutuelle se verra obligée de le baisser. En effet, la MGEN n’a pas droit au déficit…
Concernant l’évolution de l’articulation, le RC est pour partie liée au RO qui, lui, est déterminé par le code de la Sécurité sociale. Par ailleurs, il s’agit pour la MGEN de verser des prestations supplémentaires là où il n’y a pas de prises en charge en RO, c’est ce qu’on appelle les prestations supplémentaires. Un bon exemple est l’homéopathie : soit la mutuelle s’aligne sur la Sécu et ne verse rien, soit elle maintient un taux de remboursement qu’elle détermine en fonction de ses possibilités. Ces choix sont effectués en assemblée générale. Année après année, il faut trouver les meilleurs équilibres, en sachant que l’adhérent souhaiterait être remboursé au mieux partout. Il faut savoir que la MGEN atteint un taux de redistribution extrêmement favorable aux adhérents (dans les 88 % en versement de prestations) par rapport à un assureur.
Quels sont les types de risques couverts ?
Ceux ayant trait à la santé, la prévoyance et la retraite. Dans nos offres, la dépendance est incluse automatiquement de manière à mutualiser le coût de ce risque sur un très grand nombre d’adhérents. D’autres mutuelles de fonctionnaires le proposent, mais partout ailleurs ce sont des options à souscrire à un prix élevé.
Qu’en est-il pour les accidents du travail et les risques psycho-sociaux ?
Historiquement l’employeur a voulu que leur gestion soit réalisée par les caisses primaires. Mais la MGEN intervient évidemment au niveau de la complémentaire. Il existe des réseaux Prévention, aide et suivi (PAS) dans tous les départements, depuis plus de dix ans maintenant. La MGEN et le ministère les portent et les financent ensemble au bénéfice de tous les agents, adhérents MGEN ou non. Il y a également l’action sociale, avec ce qu’on appelle des actions concertées. Celles-ci sont pilotées avec les organisations syndicales représentatives, l’employeur et la MGEN au niveau de commissions d’action sociale départementales, académiques et nationale. La précarisation des métiers et le nombre accru de personnels qui ont des contrats parfois très courts avec des rémunérations très faibles sont des situations quotidiennes pour lesquelles il faut trouver des aides.
Quelles sont les perspectives en matière de prévention ?
Concernant la qualité de vie au travail, les médecins de prévention (en très large sous-effectif) sont surpris de découvrir dans quel état se trouvent les agents de la FP. Il n’y a pas de politique volontariste, à visée longue en matière de prévention et de prévention des risques. Or des fonctionnaires sont en burn out, en dépression (sans parler des suicides, dont le nombre est élevé et dont on parle occasionnellement), et certains, en souffrance depuis quinze-vingt ans… Les ateliers d’aide psychologique ne peuvent assurer toutes les prises en charge.
Dans un autre aspect de la politique préventive, nous avons proposé un dépistage systématique national dans les écoles, collèges et lycées, notamment pour le bucco-dentaire, en associant le ministère, la MGEN au titre du RO, et les syndicats dentaires. Au vu des problèmes de santé actuels des jeunes adultes, il est logique d’intervenir dès aujourd’hui auprès des enfants et des adolescents. Et l’on pourrait avoir la même initiative pour l’optique. Pour la MGEN, un fait est incontestable : le coût de l’investissement actuel à engager pour la prévention sera toujours moins onéreux que la réparation de demain. L’anticipation, la prévention, l’expertise pour le long terme, sont des valeurs et des atouts essentiels de la mutuelle.