Le premier ministre Édouard Philippe a détaillé lundi 25 septembre 2017 les budgets du grand plan d’investissement.
Transition énergétique, formation et éducation, innovation et transformation numérique de l’État sont les quatre orientations du plan d’investissement proposé par l’économiste Jean Pisani-Ferry pour la durée du quinquennat. La volonté d’agir qui ressort à la première lecture du rapport traduit aussi de nouvelles remises en cause sur la qualité de la formation des enseignants.
Le Sgen-CFDT note avec intérêt la volonté du gouvernement de faire bénéficier l’Éducation nationale et l’Enseignement supérieur et la recherche d’une partie du grand plan d’investissement. Sur les 57 milliards estimés, 300 millions concerneraient la promotion de l’innovation dans l’éducation nationale, 400 millions la rénovation du premier cycle universitaire et 3,5 milliards le soutien et la valorisation de la recherche d’excellence. On retiendra de l’initiative n°13, « Promouvoir les expérimentations en faveur de la formation des maîtres et des professeurs », que les ÉSPÉ sont bien confortées dans leurs missions de formation et de recherche et qu’elles sont appelées à jouer un rôle déterminant dans les développements du numérique à l’école. Un appel à projet financé à hauteur de 35 millions d’euros devrait permettre de sélectionner les ÉSPÉ qui proposeront des modèles innovants.
un risque d’aggravation d’une situation encore bien instable
On touche là aux limites du rapport Pisani-Ferry en matière de formation, d’éducation et d’innovation pédagogique. Quelles ÉSPÉ seront sérieusement en mesure de répondre à cet appel d’offre quand un grand nombre d’entre elles sont toujours confrontées à des problèmes de gouvernance et font face à de nombreuses difficultés pour assurer correctement la formation des étudiants et des stagiaires ? Toutes ne présentent pas les mêmes dispositions pour s’engager dans ce qui relève déjà d’une compétition et on peut craindre une iniquité de traitement qui ne fera qu’aggraver une situation encore bien instable quatre ans après la mise en œuvre de la réforme. Rien n’est dit sur la façon dont seront sélectionnées les ÉSPÉ pour profiter d’une partie du PIA 3, ni quels seront les critères d’évaluation pour juger de l’efficacité des « expérimentations innovantes ». Surtout si ces innovations annoncent, comme cela est affirmé dans l’initiative n°13, des réformes de grande envergure qui ont vocation à transformer l’éducation nationale…
la négation de toute l’expertise accumulée depuis des années
Enfin, quand il est écrit que l’appel d’offre a vocation « à faire émerger de nouvelles solutions » et « à promouvoir l’excellence », on laisse à nouveau entendre que les formateurs d’enseignants ne s’en sont jamais préoccupé jusqu’à présent. Des pratiques efficaces sont identifiées depuis longtemps pour faire progresser des élèves, pourquoi ne sont-elles ni encouragées, ni généralisées ? Affirmer que le grand plan d’investissement « soutiendra les efforts d’expérimentation qui seront entrepris pour développer de nouvelles méthodes d’enseignement » revient à nier toute l’expertise accumulée depuis des années sur la formation des enseignants et la réussite des élèves.
À combien de milliards le gouvernement chiffre-t-il l’investissement des collègues, de plus en plus découragés par des injonctions politiques répétées et contradictoires ? Un vent froid souffle sur l’École depuis le printemps dernier. Dans le contexte actuel, alors que le ministre Blanquer nous a déjà habitué à des décisions unilatérales et sans prendre la peine d’évaluer les réformes en cours, le rapport Pisani-Ferry contribue à jeter un nouveau trouble sur le dossier déjà bien chargé de la formation des enseignants.