Pour le Sgen-CFDT, il est temps de rendre concrètes toutes les annonces et de reconnaitre l’engagement des personnels. Seul des investissements conséquents permettront aux métiers de l’Éducation nationale de retrouver leur attractivité et de rendre le système éducatif plus inclusif et robuste.
Déclaration liminaire du Sgen-CFDT au CTMEN le 26 janvier 2022
Conditions de travail sous Covid
Depuis près de deux ans, la pandémie de covid19 a un impact majeur sur le travail des personnels de l’Éducation nationale. Les vagues liées aux variants delta et omicron, parce qu’elles touchent plus massivement les élèves et les personnels, ont encore accru la désorganisation du système éducatif, la charge de travail qui pèse sur les personnels quel que soit leur métier.
Nos collègues s’épuisent… Les conditions de travail de toutes et tous, le sens du travail, ne cessent de se dégrader…
Ce n’est pas la première fois que nous intervenons en CTMEN sur cette situation, sur le fait que nos collègues s’épuisent, réalisent depuis près de deux ans leurs missions dans des conditions qui n’ont rien de normal, doivent assumer des missions qui ne sont pas les leurs, soit au détriment de leurs missions, soit au prix d’un temps de travail réel qui va bien au-delà de leurs obligations de service. C’est en particulier le cas des directeurs et directrices d’école, des professeur.e.s des écoles, des personnels de direction, de vie scolaire, de santé scolaire.
Mais ce sont bien les conditions de travail de toutes et tous, le sens du travail, qui se dégradent.
Si le nombre de classes fermées a fortement augmenté ces dernières semaines, il y a aussi toutes celles qui sont maintenues ouvertes malgré de nombreux cas confirmés, malgré le fait qu’une toute petite minorité d’élèves peut être présente. Tout cela impose aux collègues de revoir en permanence leur enseignement, leur progression.
Prioriser le travail et mieux protéger les agents…
Quelques mesures avaient été annoncées fin décembre, puis dans la première semaine de janvier par le Premier ministre de nature à tenir compte de la nécessité de prioriser le travail, de mieux protéger les agents.
Mais il aura fallu une journée de grève unitaire, très suivie par des agents au détriment de leur rémunération, pour que le gouvernement semble enfin prendre la mesure de la fatigue généralisée des personnels, de la désorganisation du système éducatif, de l’insuffisante protection des agents contre les risques de contamination.
Traduire les annonces en actes…
Reste que toutes les mesures annoncées peinent à se traduire dans la réalité partout sur le territoire.
Les masques chirurgicaux arrivent mais pas encore partout (y compris en Ile-De-France citée comme prioritaire), parfois les agents les reçoivent au compte goutte, et la règle annoncée d’une boîte de 50 masques par agent n’est pas toujours concrétisée.
Les masques FFP2 n’arrivent pas partout, beaucoup d’agents dont le gouvernement a indiqué qu’il y auraient accès, y compris en maternelle, n’ont pas même reçu l’information qu’ils étaient disponibles sur demande. Comme pour les masques inclusifs dans certaines académies, le risque est grand que les stocks restent dans des cartons faute d’organisation efficace de la logistique du dernier kilomètre, faute d’information des agents sur la disponibilité des masques.
Il y a urgence à améliorer réellement et partout la protection des élèves et des personnels. Il faut conduire les aménagements pédagogiques devenus nécessaires.
Les derniers avis des autorités de santé, les dernières analyses épidémiologiques soulignent que la France est le pays d’Europe où la courbe des contaminations est la plus haute, et avancent deux raisons principales : le relâchement des gestes barrières et la qualité médiocre du protocole sanitaire à l’école.
Il y a donc urgence à améliorer réellement et partout la protection des élèves et des personnels, à construire dans le cadre du dialogue social des protocoles viables et à consentir les investissements, les moyens humains nécessaires à leur mise en œuvre.
Il est temps aussi de conduire les aménagements pédagogiques (évaluations, examens et programmes) pour ne pas laisser les personnels et les élèves face à ce qui s’apparente à des injonctions contradictoires.
Reconnaissance du travail
Le gouvernement, jusqu’à présent, ne s’engage pas sur le volet de la reconnaissance de l’engagement professionnel tout à fait exemplaire et exceptionnel des agents de l’Éducation nationale.
Des personnels ne comptent pas leurs heures pour suivre les informations qu’ils reçoivent de toutes parts, à toute heure, tous les jours, week-end et vacances compris.
Des personnels, nous l’avons dit, vont au-delà de leurs missions depuis désormais près de deux ans pour que le droit à l’éducation soit garanti, pour que le système éducatif fonctionne. Cet engagement exceptionnel doit être reconnu.
Le Sgen-CFDT renouvelle sa demande de négociation sur la reconnaissance de l’engagement des agents pendant l’ensemble de la pandémie de Covid19.
Cela ne saurait se limiter à l’indemnisation de celles et ceux qui assurent l’accueil des enfants de personnels soignants et de personnels essentiels dans la gestion de la crise sanitaire.
Revalorisation et attractivité pour renforcer le système éducatif
La pandémie de covid19 bouscule un système éducatif déjà fragile.
Il est fragilisé par la perte d’attractivité des métiers, des suppressions d’emploi inadaptées aux cohortes d’élèves, aux enjeux de l’accompagnement des élèves si l’on veut résolument déjouer les inégalités et la reproduction sociale.
Cela aboutit à des difficultés plus importantes chaque année à pourvoir les postes, à assurer les remplacements, y compris des remplacements longs, à assurer la continuité des missions d’enseignement, de santé scolaire, d’accompagnement éducatif et social.
Dans les services administratifs, la sous-administration chronique et les outils informatiques dépassés rendent difficiles la mise en œuvre même des mesures intéressantes décidées par les gouvernements successifs.
Pour le Sgen-CFDT, la revalorisation des rémunérations et des carrières doit se poursuivre, s’accélérer et s’intensifier, et concerner l’ensemble des personnels pour renforcer le système éducatif.
Cela suppose des investissements conséquents, cela suppose d’assumer politiquement que la masse salariale est un investissement dans la formation de la jeunesse quand il s’agit d’éducation.
Rendre de nouveau les métiers de l’Éducation nationale attractifs passe par la rémunération, les carrières mais aussi les conditions de travail.
Les mesures qui intensifient le travail, les organisations qui contraignent à mal travailler réduisent l’attractivité, poussent des personnels plus nombreux à chercher à changer de carrière.
Ces défis sont majeurs, non seulement pour l’Éducation nationale, mais pour la société dans son ensemble puisqu’il s’agit de la formation de la jeunesse, de la préparation de l’avenir de toutes et tous.
Proposition de loi concernant les AESH, AED : des questionnements nombreux et légitimes
Quelques jours après le passage en première lecture d’une proposition de loi à l’Assemblée Nationale concernant les personnels AESH et AED, le Sgen-CFDT souhaite savoir comment le Ministère envisage le travail de mise en œuvre. Certes, le parcours de cette proposition de loi n’est pas encore achevé, pour autant, les attentes et les questionnements qu’elle suscite sont nombreux et légitimes ; les décrets seront donc la base de ce travail à mener.
Le contenu de la proposition de loi à ce stade est en-deçà des attentes du Sgen-CFDT mais comporte cependant des avancées.
Le passage en CDI dès 3 ans pour les AESH permettrait d’effacer les interprétations d’académies lors des opérations de reclassement dans la nouvelle grille de rémunération validée en CTMEN mais aussi déboucher sur un nouveau reclassement favorable à plusieurs dizaines de milliers d’AESH.
Pour les AED qui sont dans leur 6ème année, la CDIsation devient urgente à mettre en œuvre.
2022-2023 année sans covid ? rien n’est moins sûr
Pour finir, nous souhaitons revenir brièvement sur la situation sanitaire.
Ces derniers mois, à parier uniquement sur la fin de l’épidémie et le retour à la “normale”, des décideurs publics (État et collectivités locales) ont fait le choix de ne pas préparer la poursuite de l’épidémie.
Ne faisons pas une nouvelle fois les mêmes erreurs. Lorsque l’OMS évoque la possibilité d’une sortie de la pandémie, c’est après Omicron (et on est loin de la fin de la vague quand on observe le nombre quotidien de contaminations et d’hospitalisations), et c’est au conditionnel. De nombreux épidémiologistes insistent sur le fait que Sars-Cov2 et ses variants ont jusqu’à présent réservé beaucoup de surprises à tout le monde.
Une fois de plus, il faut anticiper et préparer toutes les hypothèses, optimistes comme pessimistes.
En outre, l’après pandémie ne sera pas le retour à la situation antérieure.
La pandémie, ses conséquences sociales, psychologiques, économiques vont laisser des traces, le phénomène probable de décompensation ajoutera les siennes.
Pour le Sgen-CFDT, il est plus que temps de penser cette situation, un collectif budgétaire pour l’Éducation nationale est nécessaire pour que le système éducatif soit plus inclusif, plus robuste, plus tourné vers l’accompagnement des élèves soit un vecteur majeur de la résilience dans les mois et années qui viennent.