La rentrée 2019 dans les lycées généraux était très redoutée, mais s’est plutôt bien passée grâce à l’engagement des personnels de direction et des équipes. Vient le temps de l’ingénierie pédagogique et de l'intelligence collective pour faire de cette réforme un outil au service des élèves.
Quand elle a été travaillée collectivement, que toutes les déceptions sur l’impossibilité d’ouvrir une spécialité ont été dépassées, les craintes sur la faisabilité des emplois du temps levées, quand toutes les questions ont pu trouver un début de réponse, cette rentrée s’est plutôt bien passée.
Cependant beaucoup de questions surgissent. Certes, le temps d’appropriation d’une réforme est long, mais débuter l’année sans en connaître ses termes exacts fragilise les équipes pédagogiques et angoisse les élèves et les familles. Les lycées ont besoin de dégager du temps pour travailler collectivement et repenser des formes d’enseignements et d’accompagnement à l’aune du parcours personnalisé de l’élève.
La concertation n’est pas prévue, ce qui ne peut que nuire à la réforme.
La faisabilité du respect des choix des élèves et les conditions de travail de ces derniers comme de leurs enseignant·es est le point qui a occulté tout le travail pédagogique qui reste devant nous. Si le choix des spécialités par les élèves va être un élément porteur de réussite, quelles vont être néanmoins les nouvelles formes de décrochage/ raccrochage et comment l’AP va-t-il y remédier ?
Le grand chantier à venir pour le lycée va être la question du suivi du parcours.
Comment éviter que le calendrier ne dicte pas un rythme institutionnel de l’évaluation aux enseignants ? L’autonomie de l’établissement (EPLE) et feu l’article 34 pourrait, si son caractère originel est conservé, être la marge de manœuvre la plus intéressante.
Parallèlement, la question du lien avec le supérieur est régulièrement soulevée par les enseignant·es en conseil pédagogique : le choix de la spécialité qui sera abandonnée par les élèves en terminale ne peut seulement se fonder sur leur réussite dans telle ou telle spécialité. Ce choix doit être cohérent avec la poursuite d’études envisagée, et les attendus de l’université sont importants à connaître.
Ce qui inquiète demeure l’orientation plus massive des élèves en voie générale. Seule la filière STMG est restée constituée du même profil d’élèves. Mais il en va tout autrement pour la filière ST2S délaissée au profit du trinôme SVT/ SES/ LLCE ou HGGSP, un profil nouveau d’élèves à qui manquera l’enseignement sanitaire et social pour certaines poursuites d’études.
Il ne faudrait pas qu’à nouveau des spécialités soient plus discriminantes que d’autres.
D’autant que des enseignants pourraient, légitimement ou non, être tentés de pousser leurs élèves à continuer par crainte de voir des postes disparaître. Ainsi, comment travailler avec les élèves leur projet d’étude individuel quand on est en rivalité avec d’autres disciplines et que cela devient un enjeu personnel ?
Les équipes réfléchissent à de nouvelles formes d’accompagnement.
En ce qui concerne les conseils de classes et le rôle du « professeur principal », des propositions émergent. Dans certains lycées, le passage en semestres se met en place. Les conseils pédagogiques proposent que les enseignant·es travaillent sur les modalités d’accompagnement et de suivi des élèves en 1ère Générale.
Aussi, des solutions se dégagent : 2 ou 3 professeurs référents par division pour suivre les résultats, les questions personnelles, les questionnements sur les spécialités poursuivies ou non en Terminale… Des professeurs de spécialité sont également référents quand ils ont plus de 10 élèves d’une division dans leur groupe de spécialités.
D’autres réfléchissent également à la mise en place d’enseignant·es référents de groupe de référence multi-âge composés de 12 élèves maximum pour permettre un meilleur accompagnement de parcours et une prise en compte plus globale de l’élève.
Ainsi, selon les besoins, des réunions de mi-semestre sont prévus : un professeur référent + un personnel de direction (ou CPE volontaire par délégation) + un·e ou deux enseignant·es de spécialités ou de tronc commun, qui connaissent les élèves. La présence des parents dans ces réunions est prévue. Parallèlement, sont rencontrés par le professeur référent les élèves qui ont des difficultés avec leurs familles, pour envisager méthodes de travail, travail personnel, stress, projet de formation, etc.
Cela permet l’abandon des réunions parents-professeurs « traditionnelles » et rend le travail plus collectif et plus profitable à l’élève – mais plus demande plus d’organisation pour ces rencontres d’équipes ou personnalisées. Des bulletins mensuels demeurent accessibles aux professeurs référents et aux familles.
Pour les conseils de semestre : 2 divisions par soir avec tous les enseignants de spécialités et de tronc commun demeure. Des conseils autour des spécialités ne sont pas envisageables étant donné l’éparpillement des élèves dans les groupes de spécialités…
Une difficulté demeure, la rémunération des enseignants-référents.
Les réticences chez les collègues enseignants vient de la compensation car l’ISOE (part variable) sera de fait divisée par deux pour les enseignants référents… et les enseignants de spécialité seront en première ligne pour les conseils en orientation sans véritable formation, ni encore, de compensation indemnitaire ou en temps…