Le 14 janvier 2020, le ministre de l’Education nationale recevait le Sgen-CFDT pour présenter l’organisation du dialogue social préparant la loi de programmation qui portera la revalorisation en compensation de la réforme des retraites. Point d’étape à la veille de la concertation.
Mis à jour le 28 janvier 2020
La semaine du 13 janvier 2020, Jean-Michel Blanquer a reçu toutes les organisations syndicales représentatives en bilatérale pour donner enfin le calendrier et les sujets de discussions autour de la revalorisation en compensation de la réforme des retraites. Le Sgen-CFDT était reçu le 14 janvier. Retour sur cette réunion qui a marqué une étape importante dans le suivi de ce dossier, et rappel des revendications du Sgen-CFDT.
Enfin un dialogue social plus structuré
Le ministre a présenté un calendrier de concertation puis de négociation sur tout le premier semestre 2020. Il était temps.
Dès la réunion du 8 octobre 2019, le Sgen-CFDT avait demandé une méthode de travail partagée, et proposé des thèmes de discussion à articuler à la mise en œuvre de la réforme des retraites et à la compensation du changement de mode de calcul.
Le ministère s’est engagé à fournir en amont des réunions des fiches présentant ses intentions et les objectifs visés. Nous devrions pour une fois ne pas avoir directement des projets de textes. Les concertations se dérouleront jusque fin mars sur plusieurs sujets :
Premier degré | Second degré |
: examen des missions et cartographie des indemnités et primes | : examen des missions et cartographie des indemnités et primes |
: gestion des parcours professionnels (entrée dans le métier, déroulement et fin des carrières, gestion individualisée et de proximité) | : gestion des parcours professionnels (entrée dans le métier, déroulement et fin des carrières, gestion individualisée et de proximité) |
: amélioration du fonctionnement des collectifs pédagogiques | : amélioration du fonctionnement des collectifs pédagogiques |
: synthèse et examen des premiers scénarios de revalorisation | : synthèse et examen des premiers scénarios de revalorisation |
: poursuite des travaux sur les scénarios de revalorisation | : poursuite des travaux sur les scénarios de revalorisation |
Thèmes communs en février et mars |
formation des personnels : renouveler l’offre de formation, mise en oeuvre du CPF |
qualité de vie au travail et amélioration de la condition enseignante : santé au travail, action sociale, modalités de travail |
égalité professionnelle femmes-hommes |
, le ministre annonce une phase de négociation avant de pouvoir présenter le projet de loi de programmation en conseil des ministres puis à l’Assemblée nationale et au Sénat.
Revalorisation : des confirmations importantes
Depuis que le projet de loi du gouvernement est connu, plusieurs éléments annoncés sont confirmés.
Comme annoncé par le ministre, l’engagement de revaloriser les personnels enseignants est inscrit dans le premier article du projet de loi sur les retraites présenté en conseil des ministres. Il prévoit une loi de programmation qui permet de prendre des engagements budgétaires sur plusieurs années. Cette loi ne portera pas que sur les enseignants mais aussi sur les CPE, les PsyEN, les personnels de la formation continue, les personnels de direction et d’inspection. Le Conseil d’État a rendu un avis critique sur cette partie de l’article 1, non pas parce que le principe de la revalorisation serait anticonstitutionnel, mais parce que le Conseil d’État considère qu’une loi ne peut contenir des dispositions qui contraignent le gouvernement à déposer une autre loi pour les respecter. Le gouvernement affirme vouloir conserver cette disposition et maintient sa volonté de conduire les revalorisations indispensables pour compenser le nouveau mode de calcul des retraites.
Le ministre nous a confirmé que la revalorisation démarrerait dès 2021, par les personnels en début ou milieu de carrière, avec une augmentation du budget de l’Éducation nationale de 500 millions d’euros. Augmentation au-delà de ce qui est prévu par ailleurs (politiques éducatives, effet mécanique des promotions de corps, de grade et de changement d’échelon des personnels). Il nous a aussi confirmé des augmentations équivalentes pendant plusieurs années pour atteindre au total autour de 10 milliards d’euros d’une année sur l’autre. Cette somme pouvant être ajusté en fonction du résultat de la concertation et de la négociation.
Mais il faut encore attendre pour avoir du concret
Cependant, le ministre n’a pas été en mesure lors de cette réunion de nous présenter des projections des effets de la réforme des retraites et de la revalorisation envisagée en 2021.
Pour les personnels, cela ne permet pas encore de percevoir concrètement les effets de la revalorisation. Le projet de loi venait seulement d’être finalisé et il manque encore des arbitrages du gouvernement. Concernant par exemple la transition vers le nouveau système et les modalités concrète de conservation des droits à la retraite acquis en 2025, l’arbitrage n’a été rendu que le 21 janvier 2020.
Le principe de la conservation des droits acquis en 2025 est confirmé, c’était une revendication de la CFDT dès le début des concertations en 2018.
Peser sur les discussions par nos propositions et le rapport de force si nécessaire
Des sujets clairement posés, un calendrier précis, des engagements budgétaires qui peuvent être ajustés, pour le Sgen-CFDT il y a enfin matière à un dialogue social réel. Nous nous y engagerons pleinement, sans exclure le rapport de force : le gouvernement a une obligation de résultat et de réussite.
Pour le Sgen-CFDT, la revalorisation en compensation du nouveau mode de calcul des retraites ne doit pas se traduire par une augmentation ou une intensification du travail, et elle doit réaliser la promesse du président de la République et du Premier ministre. Les enseignant.e.s, CPE et PsyEN ne doivent pas être perdants du fait du passage au système universel de retraites. Plus globalement aucun agent du ministère ne doit être oublié dans la transition vers le nouveau système de retraites.
A chaque étape, nous pèserons par nos propositions, par l’intervention auprès des parlementaires, et si nécessaire par la mobilisation des personnels.
Les revendications du Sgen-CFDT : cohérence dans le temps, attention à toutes et tous
Le Sgen-CFDT a fait connaître très tôt ses revendications.
Dès l’automne 2018, alors que le haut commissaire venait de faire connaître ses premières pistes de réforme, la CFDT par la voix de Laurent Berger soulignait l’indispensable revalorisation des enseignant.e.s. De son côté, le Sgen-CFDT interpellait le DGRH en bilatérale pour que démarrent les analyses et les travaux pour construire une revalorisation compensant l’impact du changement de calcul de la retraite des fonctionnaires, rappelant que pour nous cette question se pose en fait pour tous les personnels ayant peu de primes à intégrer au calcul de leur pension. Le DGRH affirmait alors déjà que ces enjeux étaient un objet de travail pour le gouvernement.
Cependant rien ne démarrait. A l’hiver 2018, le ministre reçoit les organisations syndicales sur la question du pouvoir d’achat. Le Sgen-CFDT fait des propositions de court et moyen terme pour tous les agents et renouvelle sa demande de démarrer les travaux sur la compensation de la réforme des retraites.
Au printemps 2019, après les annonces du président de la République, le ministère de l’Éducation nationale confirme que les travaux démarrent pour construire la revalorisation et compenser l’effet de la réforme des retraites. Ce n’est en fait qu’à partir du 8 octobre avec la présentation du rapport du Haut commissaire à la réforme des retraites au ministère des affaires sociales que les travaux débutent.
Dès cette date le Sgen-CFDT affirme et publie ses revendications et propositions :
- Assurer une transition qui sécurise tous les agents, titulaires et contractuels :
- si les enseignant.e.s ont peu de primes, c’est aussi le cas des CPE et PsyEn qui doivent être concerné.e.s par les discussions sectorielles (c’est enfin explicitement le cas),
- les personnels de la filière administrative, et les personnels santé-sociaux à l’Education nationale ont moins de primes que dans le reste de la fonction publique, nous demandons donc l’examen de la situation de tous les personnels. Pour les personnels BIATSS, le ministère annonce enfin la reprise de l’agenda social, et le Sgen-CFDT a des revendications précises ;
- Garantir les droits à la retraite acquis avant 2025 : refus d’observer les 6 derniers mois de 2024, tenir compte des 6 derniers mois réels pour calculer les droits à la retraite acquis avant 2025 vous pouvez lire le tract de la CFDT Fonctions publiques à ce sujet. Cette option semble être privilégiée par le gouvernement sans qu’il ne l’annonce encore clairement. La CFDT fonctions publiques porte fermement cette demande, ;
- Compenser le fait que les primes seront soumises à cotisation afin qu’il n’y ait pas de diminution de la rémunération nette ;
- Construire une revalorisation à la fois par des mesures concernant le traitement (rémunération indiciaire) et les primes ou indemnités mais seulement si elles sont servies à toutes et tous et sans augmentation ou intensification du travail : tout le monde partira à la retraite, tout le monde doit bénéficier de la compensation du nouveau mode de calcul ;
- Améliorer les déroulements de carrière (c’est un des sujets de discussion désormais ouvert par le ministère) ;
- Améliorer les conditions de reclassement au moment du recrutement et des changements de corps ;
- Accélérer la lutte contre les inégalités femmes-hommes : les travaux pour mettre en œuvre l’accord égalité pro de la fonction publique de 2018 sont en cours, et ce sujet fait explicitement partie de la discussion en vue de la loi de programmation ;
- Ouvrir de nouveaux droits pour les agents en fin de carrière : droit pour les professeur.e.s des écoles de partir à la retraite à la date de leur anniversaire (revendication portée par le Sgen-CFDT depuis 2014), aménagement des fins de carrière et droit à la retraite progressive (ces deux derniers sujets sont explicitement à l’ordre du jour des discussions pour le ministère) ;
- Développer l’alternance dès la première année de master MEEF pour permettre à tou.te.s les étudiant.e.s de commencer à cumuler des droits pour leur future retraite et découvrir progressivement le métier auquel ils et elles se destinent.
Pour le Sgen-CFDT, des mesures tangibles doivent être prises rapidement…
Compte-tenu de la forte défiance vis-à-vis d’un gouvernement qui a donné dès le début du quinquennat des signaux très négatifs pour les agents publics (rétablissement du jour de carence, gel du point d’indice, gel d’un an de la mise en œuvre du protocole PPCR, loi de transformation de la fonction publique sur laquelle la CFDT a émis un avis négatif), le Sgen-CFDT, depuis le début des discussions, insiste pour que des mesures tangibles soient prises vite.
Le démarrage de la revalorisation dès 2021 en est un. Cependant, si tous les agents ne sont pas concernés dès 2021, il faut que rapidement toutes et tous puissent savoir quand ils bénéficieront de la revalorisation. Nous avons aussi indiqué que le report de la mise en œuvre de la réforme de la génération 1963 à la génération 1975 ne pouvait se traduire par l’absence totale de revalorisation pour les collègues les plus avancé.e.s dans leur carrière. Le travail s’est intensifié pour toutes et tous depuis plusieurs années, et chacun.e a besoin que son travail soit enfin mieux reconnu. Le ministre n’a pas fermé la porte à des mesures les concernant. Le Sgen-CFDT continuera à les revendiquer.
Pour le Sgen-CFDT, la mise en œuvre de nouveaux droits notamment en fin de carrière, l’amélioration du reclassement, la réduction des inégalités femmes-hommes peuvent et doivent démarrer avant 2025.
Le Sgen-CFDT se prononcera au fur et à mesure de l’avancée des discussions sur les propositions ministérielles. Le dialogue social se structure, il reste à vérifier qu’il produira des avancées pour les personnels.