Un management préoccupé uniquement par les coûts, néglige le personnel et l'avenir à long terme des établissements.
Remettre du sens au centre de notre gouvernance
Face aux difficultés budgétaires et à l’impact des restructurations, nos établissements ont été progressivement conduits à se focaliser sur la réduction de leurs coûts. Aujourd’hui, aucun acteur de nos établissements ne semble pouvoir se soustraire au » management par les coûts « . Or à vouloir chasser les coûts tous azimuts, beaucoup d’erreurs sont commises.
La plus commune, pour nos établissements, consiste à foncer bille en tête sans disposer des outils comptables appropriés.
Aujourd’hui, qui est capable d’évaluer l’impact financier des fusions d’établissement engagées il y a une dizaine d’années ? Quel a été, par exemple, l’impact sur les coûts du développement des strates administratives au sein des établissements multi-sites ? En l’absence d’information, nous sommes condamnés à agir de façon empirique et de fausse bonnes idées peuvent vite devenir des catastrophes.
Un management décevant
L’erreur principale consiste à raisonner uniquement sur les coûts sans intégrer dans la réflexion les objectifs et les stratégies poursuivies par nos établissements. Confrontées à une situation nouvelle, les directions de nos établissements, en lien avec la Direction générale de l’enseignement et de la recherche – DGER qui les encadre, ont tendance à confondre la fin et les moyens.
Les établissements sacrifient leurs atouts et leur avenir…
Les établissements cherchent, par exemple, à réduire les heures de TP, à supprimer les voyages d’étude, à fermer des masters jugés trop couteux en heures d’enseignants. En réduisant les enseignements appliqués et l’innovation pédagogique les établissements sacrifient leurs atouts et leur avenir au profit d’une banalisation qui nous rapproche des formations universitaires. L’expérience des meilleurs établissements anglo-saxons et nord-européens nous enseigne qu’une conscience claire des buts à atteindre et le souci effectif d’associer les personnels sont des prérequis qui conditionnent la réussite de toute opération d’optimisation des coûts.
Des emplois sont en jeu…
L’implication des personnels est d’autant plus importante que des emplois sont en jeu. Il apparaît, en effet, d’ores et déjà évident que les arbitrages financiers jouent sur les possibilités de maintien des effectifs titulaires. Dans plusieurs établissements, des supports de poste de fonctionnaires rendus vacants par des départs en retraite sont remplacés par des emplois contractuels. Les équipes n’ont plus de visibilité sur les recrutements.
Le personnel constate qu’il devient durablement une variable d’ajustement pour boucler le budget. A AgroParisTech le futur contrat de maintenance du nouveau bâtiment du site de Saclay, trace de sombres perspectives budgétaires qui vont impacter l’emploi pour les 30 ans à venir (ce qui élargit la réflexion !).
Le manque de dialogue social fragilise les établissements
Négliger, voire omettre, de dialoguer avec les personnels autour des motivations et des modalités de réorganisation des établissements, expose les directions au risque de dépenser un surcroît d’énergie pour tenter de dépasser des résistances internes, et au final aboutir à des résultats décevants.
La situation de l’Enfsea de Toulouse illustre parfaitement l’enjeu du dialogue social. L’établissement est actuellement fragilisé par la réduction de la commande de formation d’enseignants, par la difficulté à pourvoir les postes de professeurs stagiaires, et par le recul de la diversification de l’offre de formation Masters. La réorganisation de l’établissement par les coûts, préconisée par la Cours des Comptes, a conduit la DGER sacrifier le projet de recherche construit par les équipes de l’établissement qui avait été évalué très favorablement par l’HCERES. Aujourd’hui les recrutements d’EC sont menacés, et l’incertitude relative à la contractualisation d’une UMR impacte les partenariats de l’établissement.