Le jeudi 31 octobre 2019, le Premier Ministre était à Bobigny pour présenter 23 mesures pour renforcer le service public en Seine-Saint-Denis. Certaines concernent l'Éducation nationale. Premières analyses.
Pourquoi des mesures pour la fonction publique et les services publics en Seine-Saint-Denis ?
Un rapport parlementaire a montré il y a un an et demi que l’État dépensait moins pour ses services publics en Seine-Saint-Denis que dans les autres territoires. Pourtant le département a fait l’objet, notamment pour l’Éducation nationale, de plusieurs plans de rattrapage, plans d’urgence… et il compte un grand nombre de réseaux d’éducation prioritaire. Une des raisons de cette plus faible dépense réside dans le fait que beaucoup de personnels qui exercent en Seine-Saint-Denis sont jeunes, en début de carrière, la proportions d’enseignant·es non titulaires y est plus élevée qu’ailleurs. Cela contribue à une masse salariale plus faible.
Proposer des mesures visant à améliorer l’attractivité des postes et à inciter les agents à rester plus longtemps dans le département est un principe intéressant. Réduire le turn-over, reconnaître l’engagement des personnels, cela peut contribuer à améliorer le service rendu à la population.
Quelles mesures pour l’Éducation nationale ?
Le Premier ministre a annoncé :
- une prime de 10 000 euros après 5 années d’exercice en Seine-Saint-Denis pour certains fonctionnaires d’État;
- un régime indemnitaire plus élevé pour les agents des services déconcentrés, calé sur le niveau du régime indemnitaire des administrations centrales;
- un plan d’investissement pour le bâti scolaire, alors que la dynamique démographique est forte et que les dédoublements en grande section, CP et CE1, supposent de disposer de plus de locaux, cela semble pertinent en principe.
- l’augmentation du nombre d’étudiants et étudiantes en contrat de pré-professionnalisation en vue de devenir enseignant·es.
Beaucoup de questions en suspens
Ces mesures ont été annoncées sans dialogue social en amont. Aussi, beaucoup de questions demeurent.
Quels personnels seront effectivement concernés par ces mesures ?
La prime de 10 000 euros concernera-t-elle tous les personnels affectés en Seine-Saint-Denis, y compris celles et ceux qui y travaillent déjà aujourd’hui ou qui résident dans le département avant d’y être affecté·es ? La prime sera-t-elle versée lorsque les agents concernés quittent le département, ou bien celles et ceux qui y restent plus longtemps la percevront aussi ?
Pour cette prime comme pour la revalorisation indemnitaire, comment seront pris en compte les personnels du Rectorat de Créteil ? Certes, ces personnels administratifs exercent dans le Val-De-Marne, mais nombre d’entre elles et eux travaillent pour la Seine-Saint-Denis.
Et les non-titulaires ?
Lors de ses annonces, Édouard Philippe parle systématiquement des fonctionnaires. Or 12 % des enseignant·es du second degré sont contractuel·les dans l’académie de Créteil (sans doute plus encore en Seine-Saint-Denis), contre 7,5% en moyenne nationale. Ce silence est donc problématique.
Les revendications du Sgen-CFDT
Pour le Sgen-CFDT, il y a donc de nombreux points à éclaircir et d’autres leviers à actionner pour attirer et fidéliser des agents publics au service de l’Éducation nationale en Seine-Saint-Denis pour mieux accompagner tous les enfants.
Les mesures touchant à la rémunération devraient concerner tous les agents, titulaires ou non, qui contribuent au service public d’Éducation en Seine-Saint-Denis, même si leur poste est administrativement dans le Val-De-Marne. La prime de 10 000 euros au bout de 5 ans d’exercice doit bénéficier à tous les personnels : celles et ceux qui partent comme celles et ceux qui restent, celles et ceux qui se sont installé·es dans le département à l’occasion de leur affectation comme celles et ceux qui y vivaient ou y travaillaient déjà.
Les agents non-titulaires doivent avoir un accès facilité à l’emploi titulaire sous condition de durée d’exercice et d’évaluation positive. Le Sgen-CFDT réitère sa revendication dans ce cas de titularisation sans concours.
Tous les personnels du département attendent aussi des mesures qui contribuent à l’amélioration de leurs conditions d’exercice et de leurs conditions de vie dans le département. Se loger en Seine-Saint-Denis et globalement en Ile-de-France en début de carrière est difficile. Les rémunérations ne permettent pas de louer facilement un logement décent, compte tenu de la pénurie de logement et du niveau toujours en hausse des loyers. En matière de conditions de travail, il faut continuer à améliorer l’accueil dans les services et les établissements. Il faut donner du temps pour le travail en équipe, qui permet de rompre l’isolement et de faciliter l’entrée dans le métier.
Après ces annonces, le Sgen-CFDT attend donc que s’ouvre aux niveaux du département, de l’académie et du ministère, autant que de besoin, le dialogue social permettant d’y voir plus clair et d’affiner ces mesures.