Les membres du Conseil National de l'Enseignement Agricole (CNEA) ont unanimement et à plusieurs reprises critiqué le projet de rénovation du BTSA GEMEAU. La DGER annoncé le 13 septembre le report de la rénovation pour un an et la révision du projet initial. Une décision pertinente.
Enjeux de la rénovation du BTSA GEMEAU
Le BTSA « gestion et maîtrise de l’eau » (GEMEAU) forme des techniciens supérieurs en gestion et maîtrise de l’eau. Ils et elles sont employés ensuite par des entreprises privées ou publiques, par des collectivités et diverses associations. C’est avec le BTSA « gestion et protection de la nature » (GPN) un dès diplôme phare de l’enseignement agricole. Il a marqué dans les années 90, l’ouverture de notre système de formation vers les métiers dits « de l’environnement » et l’identité de l’enseignement agricole.
Trois catégories d’emploi étaient visées par cette formation :
- Ceux qui concernent les installations pour l’utilisation de l’eau par les humains,
- Les emplois concernant l’utilisation de l’eau pour l’irrigation des cultures,
- Ceux liés à la gestion du milieu naturel.
Le référentiel de la spécialité GEMEAU, dont la dernière rénovation date de l’année 2011, allait bientôt évoluer. Pour le Sgen-CFDT, il est urgent de rénover cette formation. Il faut qu’elle prenne mieux en compte les enjeux actuels liés à la gestion de l’eau, au changement climatique, aux transitions. Il faut qu’elle réponde aux besoins des employeurs, de la Profession et des territoires, mais aussi à la demande sociale.
Pour le Sgen-CFDT, le projet présenté par la DGER marquait une trop profonde rupture avec la philosophie du référentiel actuel. L’ensemble des membres du Conseil national de l’enseignement agricole (CNEA), dont le Sgen-CFDT, ont rejeté le projet de rénovation. Un fait rare.
Un projet sous la marque du monde de l’industrie ?
La première version du projet de référentiel du BTSA GEMEAU, mis en consultation il y a quelques mois, a vertement été critiquée. Dès la fin 2022, les membres du CNEA ont unanimement déploré le déclassement de l’approche en termes de « bassins versants ». Certes, cette notion est encore présente dans le M8 « élaboration des solutions techniques », en marge du M7 et dans les activités pluridisciplinaires. Elle demeure cependant absente des référentiels d’activités et de compétences. Autre fait préoccupant, les métiers de « technicien rivière » et de « gestionnaire bassin versant » ne sont pas prioritairement ciblé dans le référentiel. Ce n’est pas un hasard. Le Gémeau a été conçu pour répondre aux besoins des géants gérant l’eau et son assainissement.
Pour le Sgen-CFDT, il y a un risque de perte de diversité des métiers et d’identité.
Le Sgen-CFDT avec la CFDT militent pour un BTS bien différent de celui proposé à l’Education nationale, orienté lui vers les secteurs de la distribution, de l’assainissement et du traitement des eaux. Le référentiel proposé répondait plus à une situation de tension sur le marché de l’emploi dans les secteurs de l’assainissement et de la potabilité de l’eau qu’à la gestion de la ressource. Fep-CFDT et Sgen-CFDT avaient porté une contribution commune début juin, afin de faire évoluer ce référentiel, en vain.
Perte d’identité, de sens, de certaines de nos valeurs
L’eau est une ressource commune que nous nous devons de préserver. C’est un enjeu majeur pour le siècle à venir et pour l’agriculture de demain. Le défi est immense. Les référentiels de l’enseignement agricole doivent intégrer les problématiques liées au changement de paradigme de développement en cours. Notre cœur de métier doit rester le vivant. En se focalisant sur l’assainissement et la potabilité, ce projet n’était plus en phase avec ce qu’on peut attendre d’une formation dispensée par le ministère de l’Agriculture.
Perte d’attractivité probable
Depuis quelques années, les BTSA « voie scolaire » peinent de plus en plus à recruter des étudiant.es. Le BTSA Gémeau n’échappe pas à cette tendance préoccupante. Pour le Sgen-CFDT, l’orientation proposée risquait de réduire encore plus l’attractivité de cette formation déjà en souffrance. Les étudiant.es ne choisissaient pas par hasard l’enseignement agricole…. Une forte motivation pour suivre cette formation tient à ce qu’elle développe un volet « gestion de la ressource » qui répond aux enjeux de transition. Ce point ne répond peut-être pas directement aux vœux des industriels…mais il motive fortement les élèves et les familles !
Report de la rénovation
Au final pour la DGER, « en lien avec les conclusions du Varenne de l’eau, il apparaît clairement que les transitions pour adapter l’agriculture au changement climatique, notamment en matière de gestion de l’eau, justifient de développer de nouvelles compétences » (…) « Dès lors, il apparaît nécessaire d’approfondir le projet de rénovation du BTSA GEMEAU pour mieux prendre en compte la prospective en matière de compétences émergentes dans les domaines de la gestion de l’eau. Ces travaux de prospective vont nécessiter quelques mois. Pour les mener à bien, la DGER a décidé de décaler d’un an l’entrée en vigueur de la rénovation du BTSA GEMEAU ».
Le Sgen-CFDT se félicite des évolutions à venir. Un fait assez rare dans l’histoire de l’enseignement agricole. Force est de constater que l’expression des avis donnés au CNEA sont utiles et écoutés. Le Sgen-CFDT sera très vigilant et étudiera avec une attention soutenue le nouveau projet qui lui sera soumis.
Article co-rédigé avec Marie-Pierre Defontaine (mandatée Sgen-CFDT au CNEA).
Pour le Sgen-CFDT, le référentiel doit évoluer significativement afin d’intégrer pleinement la transition écologique.