Le 7 juin 2022, sous la présidence d’Andreas SEILER (nouveau sous directeur POFE-DGER), s'est déroulé un groupe de travail "santé et sécurité des apprenants durant les périodes de formation en milieu professionnel". Le Sgen-CFDT était représenté par Sylvie HARLET et JF LE CLANCHE.
Apprendre ne doit pas être dangereux
Sécurité au travail des apprenants en formation en milieu professionnel: des données de la MSA donnent une mesure de leur accidentologie. Ils et elles ne sont pas indemnes. Entre 2015 et 2019, on compte (pour environs 140.000 individus):
- par an et en moyenne 1800 accidents du travail,
- 77 sont « graves mais non mortels »,
- entre 2015 et 2019, 40 apprenants ont eu un accident mortel dont 18 élèves.
Souvent, c’est en début de formation que les accidents se produisent. Certaines filières sont plus accidentogènes (travaux forestiers, élevage etc.). Les causes de ces accidents ne sont pas spécifiés. Elles sont souvent sont dues à une méconnaissances des risques.
Pour le Sgen-CFDT, 40 morts, ce sont 40 morts de trop. Les militants.es du Sgen-CFDT ont une pensée émue pour les familles brisées, les enseignant.es traumatisé.es, des maîtres de stage marqués à vie par ces évènements tragiques. Bien entendu, il faut agir, prévenir les risques, renforcer la sécurité. Qui irait contre? Oui, mais concrètement, on fait comment ? On interdit tout?
Sécurité: le risque zéro?
Certains estiment que le risque « zéro» et son pendant, le principe de précaution, forment l’alpha et l’oméga d’une politique de sécurité au travail. Ils voudraient que l’on considère toujours le scénario le plus alarmiste comme le plus probable.
Pour le Sgen-CFDT, si cette vision triomphait, un nouvel âge de l’immobilisme naitrait. L’apprentissage du métier d’Homme et de Femme, l’éducation, le fait de vivre tout simplement, oblige à des prises de risque permanentes. Pour Martin HEIDEGGER « ne sommes-nous pas en sursis dès notre naissance ? ». Toute action humaine possède sa part de risque. Par contre, ceci n’indique pas qu’il faille faire n’importe quoi, n’importe comment. Bien au contraire!
Notons que cette notion de risque constitue une ressource politiquement très gratifiante. Nous devons donc nous garder des discours un peu trop simplistes, voir manipulateurs. En effet, qui n’est pas pour plus de sécurité ? Qui est contre le fait de mieux protéger nos enfants ? Le besoin de sécurité peut être instrumentalisé au point d’en faire un outil politique et militant. Pour garantir le sentiment du besoin de sécurité, des systèmes de coercition et de surveillance de plus en plus sophistiqués et généralisés peuvent être exigés. Est-ce cela que nous visons ? Bien entendu…non.
Le CFA, l’exploitation et le lycée sont-ils devenus le lieu de tous les dangers ?
Désormais, à l’école maternelle, nous devons amener nos enfants jusque dans la classe, le matin. Avant, on les déposaient devant le porche…. Selon la SOFRES, les Français, devenus adeptes du risque zéro, adopteraient des comportements de plus en plus sécuritaires.
Ne soyons pas dupes. Le prix à payer sera la réduction du champ d’activités des jeunes. L’enseignement doit faire face aux inquiétudes grandissantes des parents en matière de sécurité. Afin d’éviter tout procès en cas d’accident, des règlements toujours plus stricts au niveau des activités proposées sont adoptés. Notons que les directeurs et directrices d’EPLEFPA sont responsables pénalement. Leur angoisse à ce niveau est permanente.
Cette multiplication des interdictions risque d’amener les apprenants à ne plus vivre leur lieu de scolarité ou de stage comme un lieu de découverte active, mais comme un lieu d’apprentissage de contenus théoriques déconnectés.
Par une exigence de minimisation du risque mal posée et un manque de lucidité, la société court le risque de réduire les libertés, le plaisir d’apprendre, de découvrir, de vivre de nouvelles expériences. Est- ce que nous le désirons? Pour le Sgen-CFDT il faut aborder ce dossier avec raison. L’objectif est bien de réduire les risques, de les prévenir efficacement. Quelles sont donc nos propositions?
Une note de service portant sur la sécurité à retoiletter
Les EPLEFPA font remonter des difficultés rencontrées concernant l’application de la note de service du 10 mars 2017 :
- les visites préalables des lieux de stage sont très chronophages et pas toujours réalisées,
- les visites d’apprenants posent également des problèmes d’organisation (peu de plages horaires de durée suffisantes pour effectuer les visites sans modifier les EDT)
- les enseignants et formateurs ne se sentent pas compétents pour juger de la « conformité » des structures d’accueil. Ils ne veulent plus signer les conventions de stage et être référent.
- Un réel souci de sensibilisation des structures d’accueil se fait ressentir (peu de présence aux réunions d’information des maîtres de stage et apprentissage)
- des difficultés pour mobiliser la MSA / inspecteurs du travail à ces réunions (manque de temps).
Pour le Sgen-CFDT, il faudrait:
- réactualiser cette NS en tenant compte de ces remarques.
- que sa rédaction ne soit plus l’objet d’interprétations hétérogènes.
Il remonte du terrain de nombreuses difficultés pour s’approprier les règles (situations hétérogènes, interprétations diverses voire éloignées) et le cadre règlementaire actuel (très évolutif). De plus, il faut informer et former les agents. La DGER devrait également faire preuve de « pédagogie » pour permettre aux acteurs de terrain de s’approprier pleinement l’esprit et le contenu du règlement.
Traiter les risques psycho-sociaux
Pour le Sgen-CFDT, les avancées sont réelles dans ce domaine. Beaucoup est fait, beaucoup reste à faire. On attend toutefois une meilleure prise en charge des risques psychosociaux au retour des périodes de formation en milieu professionnel (apprenants confrontés à des situations particulièrement traumatisantes type accident ou décès notamment pour les spécialités services aux personnes). Ce chantier est à ouvrir (via le réseau SST-DGER ?)
L’EPS, une discipline à mobiliser pour enseigner la sécurité
Pour le Sgen-CFDT, trop peu de liens existent entre l’EPS et les activités professionnelles. Les aptitudes physiques sont très différentes d’une spécialité à une autre. En fonction des spécialités, il faudrait ajouter quelques heures EPS dans un module professionnel : exemple-cheval, appréhender une chute via l’EPS. Pour le Sgen-CFDT, il faudrait généraliser ces liens (qui existent au niveau du référentiel CAPa) à l’ensemble des référentiels (y compris BTSA).
Plus d’heures pour la SST et plus de moyens
La délivrance du certificat de Sauveteur Secouriste du Travail (CSST) augmente dans les établissements. Son obtention est pertinente pour les apprenants comme pour les formateurs et enseignants. Le nombre d’heures disponibles est insuffisant pour mener à bien sa réalisation en classe et le nombre de formateurs habilités à le dispenser est parfois insuffisant ou inexistant. Il faut dans ce cas faire appel à un intervenant extérieur, le cout peut être élevé. Les établissements doivent aussi financer sur fonds propres les habilitations et « recyclages » des personnels, la MSA ne prenant à sa charge que les frais de formation initiale.
De plus, pour le Sgen-CFDT, il faut former/ faire passer les profs au 4C et au certiphito. Les élèves que nous formons auront des équivalences après l’obtention de leur diplôme mais les enseignants n’y sont pas éligibles, donc ne l’ont pas.
Le mot de la fin
Il serait intéressant de rendre plus visible, sur le site Chrorophyl, les pages dédiées à cette problématique. Pourquoi ne pas faire un flash info-DGER sur ce sujet ?
L’enseignement agricole doit plus s’engager à mettre l’accent sur la santé sécurité au travail des apprenants et des personnels. Il prépare à des métiers dont certains nécessitent particulièrement d’être préparer aux enjeux de « santé et sécurité au travail« . L’enjeu est de taille. Vous pouvez compter sur les militant.es du Sgen-CFDT pour faire avancer ce dossier avec détermination et pragmatisme. Lire la partie 1 de cet article en cliquant ici.